Audition parlementaire de Yves Bréchet, Haut-Commissaire à l'énergie atomique de 2012 à 2018.
« La faiblesse des analyses conduisant aux décisions de l'État pose question »
« La doxa prônant le passage de 75 à 50 % de la capacité électro-nucléaire, la confusion entre la puissance installée et la puissance délivrée, l'omission des coûts de réseau et de stockage dans l'évaluation des aspects économiques des différentes sources d'électricité, le refus de procéder à une analyse de fond des expériences faites chez nos voisins, témoignent au mieux d'une naïveté confondante »
« la procrastination sur toutes les décisions concernant le nucléaire et la politique d'annonces dans l'attente de décisions concrètes de mise en chantier montrent une ignorance stupéfiante de l'inertie intrinsèque des industries lourdes et de la nécessité d'une vision stable à long terme pour conserver l'outil industriel au bon niveau. »
« L'incapacité à penser l'ensemble d'un système énergétique conduit à des Programmations pluriannuelles de l'énergie qui sont un collier de perles gadget au moment où on aurait besoin d'un câble robuste. »
« Ces constatations sont autant de signes que l'analyse scientifique et technique a déserté les rouages décisionnels de l'État sur ces sujets »
« Au-delà des anciens ministres que vous pouvez auditionner pour le fun, en étant à peu près sûr de n'avoir que des effets de manche, c'est dans les structures des cabinets et de la haute administration, qui sont censés analyser les dossiers pour instruire la décision politique, qu'il faut chercher les rouages de la machine infernale qui détruit mécaniquement notre souveraineté énergétique et industrielle. »
« Dans la génération qui a reconstruit le pays, les élèves de l'ENA recevait un cours de Louis Armand sur les sciences et les technologies de la France industrielle. Il faut avoir eu ce cours entre les mains pour comprendre ce que ça voulait dire : ça ne faisait pas d'eux des ingénieurs, cela leur donnait la mesure du problème. »
« Quel que soit le prestige des diplômes des conseillers gouvernementaux, ils se retrouvent à conseiller sur des sujets qu'ils ne maîtrisent généralement pas un ministre qui ne se pose même pas la question. Leur première préoccupation sera trop souvent de ne dire à leurs ministres que ce qu'il a envie d'entendre pour ne pas nuire à leurs carrières à venir. »