- Modifié
1- Vous m'avez bien compris : je vise l'existentialisme, comme lorsque je parle de l'homosexuel. Disons que l'existentialisme me semble être la misère de la philosophie, sa crise.
Si j'attaque Camus, car toute critique est effectivement œuvre de destruction, je n'oublie pas qu'il décrit très bien une réalité : l'homme d'aujourd'hui face à ses interrogations, la douleur qui en résulte. Je pense qu'il peut tout à fait avoir sa place dans nos écoles comme étude du symptôme.
Je ne m'attaque pas à l'homme, que je connais assez peu d'ailleurs. Cela aurait été aussi différent si nous avions parlé de Sartre : à mon avis, nous partageons le même sentiment à son sujet. Même si cette question n'est pas pertinente en philosophie : il ne suffit pas qu'un homme soit con, pour que l'on supprime son étude ; il faudra juste préciser qu'il ne s'agit pas d'un modèle à suivre. La question est plutôt de savoir si l'on devient bon philosophe en étudiant Sartre...
2- Ce serait tentant de limiter cela à la voix de Dieu, mais ce serait aussi inexact. La distinction que j'établis est entre vivre dans une religion ou culture, et disposer d'une culture : être et avoir.
Permettez-moi un exemple afin d'être plus compréhensible. Le romain n'est pas creux. Il a ses rites, ses dieux : il vit dans sa religion. Auguste se venge : il dédie un temple à Mars Ultor. Au contraire, le peintre de la Renaissance s'inspire de fables -donc de mensonges- pour produire ses tableaux. Dans un cas la culture est vie, dans l'autre elle est avoir rattachée à l'homme. Si ce même peintre se fait païen, il sera moins creux, bien qu'un peu insensé.
Je dirais que l'emprunt au passé ou à l'ailleurs, dans les arts est symptôme de vacuité, sans déprécier la qualité des œuvres produites. Même quand l'artiste est bon, il a besoin qu'on lui donne du contenu. L'art est en fait coupé d'une source, alors il emprunte à d'autres : il n'est plus homme de cette religion ou culture, qui sait ce qu'il aime, ce qu'il veut représenter ; il compense alors par son érudition.
Il existe me semble-t-il un autre palliatif, plus utilisé par nos contemporains : l'interrogation sur la technique, le moyen de produire l’œuvre, comme fin. Pour produire une bonne œuvre, il ne s'agit plus d'avoir un bon sujet, et de le travailler ; mais d'utiliser de nouvelles techniques, de travailler le style, de travailler le moyen. L'analogie par exemple ne sert plus le fond, mais à démontrer la virtuosité de l'auteur. J'ai encore un peu de mal à analyser ce phénomène.
J'ai une dernière hypothèse tout à fait différente : elle concerne la relativisation des sujets. L'homme moderne ne sait plus différencier l'important de l'accessoire. Tout est sujet pour lui, culture, même le pittoresque, le fait divers. Cela commence au début du XIXème avec Géricault qui peint un fait divers, en format peinture d'histoire : très beau tableau certainement, le radeau de la méduse, mais un sujet bidon.