Quand on observe la vie des cités, l'existence d'idées admises par tous, ou reconnues comme orthodoxes, n'empêche pas la cité d'être divisée en divers segments ou mouvements d'opinion. Selon la cité, sont concernés, les sujets ou citoyens qui s'intéressent ou s'occupent de politique. Dans nos cités, qui admettent la volonté générale du peuple ou de la nation, qui sont fondées sur l'opinion publique en tant qu'elle est considérée comme sa possible traduction, tous les citoyens sont susceptibles d'être partie prenante de tel ou tel mouvement d'opinion.
Plus un mouvement d'opinion s'éloigne d'un autre par les idées, plus la discussion est difficile, car il tend à mesure qu'il s'en éloigne, à être son ennemi. Plus il est question d'ennemi, moins le point de vue de l'autre est examiné : moins l'on se demande, ce qu'il peut y avoir de vrai dans sa position, moins l'on se demande comment il en arrive à une telle position, même dans le cas où l'on pense qu'il se trompe ; en général, il est simplement question d'écarter d'un revers de main ce qu'il peut affirmer, le moindre soupçon d'intelligibilité ne lui est pas accordé.
Dans notre cas, les partisans de Trump en sont arrivés à une conviction : sécession des élites, ou d'une grande partie de l'aristocratie, politique et économique, qui conduit à une « démocratie » confisquée ; ou, régime politique qui n'est pas du tout à l'image de la « volonté » dite du peuple, ou de la nation. Le véritable travail consiste à examiner l'opinion en question, ce qu'elle contient de vrai, quand bien même elle serait très fausse. Comment et pourquoi en sont-ils arrivés à une telle conviction sont des questions subséquentes possibles : c'est-à-dire qui ne doivent pas se substituer à ce premier examen.