1- Dès lors que la discussion se fait entre idées différentes, elle implique guerre, opposition si vous préférez. Pour qu'elle puisse être possible, il faut alors se soumettre à des règles de guerre juste : certaines sont de l'ordre du droit, sur fopo, ne pas insulter, par exemple en tant que l'action contraire implique sanction. D'autres seront de l'ordre d'une éthique de la discussion, car il est tout à fait possible de ne pas être disposé au dialogue, tout en respectant les règles précédentes. Si l'objet de cette éthique, qui reste à préciser, est de permettre une discussion respectueuse, il me semble tout aussi nécessaire que la raison impose le silence au passion, comme en toute éthique plus généralement, même face à des idées très déplaisantes, que de s'interdire certains arguments, afin de ne pas tomber dans la sophistique, forme de guerre injuste dans la discussion.
2- Des critères comme la présumée plus grande « raison » soit d'un très grand nombre, soit de la simple majorité, soit de la meilleure part… peuvent être effectivement utilisés pour trancher un débat d'opinion, faute de mieux, lorsque cela est nécessaire : par exemple, au sein d'une assemblée, même qui délibère vraiment, il faut bien que la discussion prenne fin, l'objet étant de décider. Il n'en demeure pas moins qu'ils ne sont que l'expression du règne de la force, que si l'on s'en tient à la spéculation, non à la pratique, ils ne sont d'aucune valeur. Encore moins, suffiraient-ils à ne plus avoir à exposer ses arguments.
3- En toute société, il existe des opinions droites, qui peuvent être relatives à une religion, ou philosophie donnée, qui éventuellement peuvent être exprimées en des textes fondamentaux. A mesure que les idées en question sont établies, les hétérodoxes seront haïs ou sujets de ridicule: il leur sera reproché d'avoir l'outrecuidance de ne pas aimer les idées en question, d'en aimer d'autres, d'autant plus si ces dernières tendent à impliquer d'autres mœurs, coutumes… L'hétérodoxe tend ainsi, ou s'expose, à devenir paria lorsqu'il assume et affiche son hétérodoxie, dans la mesure de son hétérodoxie.
Selon la cité : ses principes, ses lois, ses mœurs… il risque même aussi bien les persécutions légales que celles disons de ses concitoyens, les pires n'étant probablement pas les premières. D'une cité à l'autre, précisons tout de même que leur intensité varie considérablement : de la simple disqualification, du procès d'intention, de la raillerie, la condamnation par l'opinion, basse intensité ; à la guerre, au massacre, la plus haute intensité.
En raison de l'orthodoxie de note cité : plus spécifiquement d'une liberté de l'opinion quasiment illimitée quant à son contenu, admise comme droit fondamental que le souverain doit protéger, nos hétérodoxes ne sont pas vraiment les plus à plaindre. Au pire, risquent-ils à mesure qu'ils s'éloignent de l'orthodoxie, dont les idées sont exprimées dans nos textes fondamentaux, à commencer par la DDHC, la disqualification, le blâme ou mépris de leurs concitoyens.
Seulement en raison même d'une autre idée fondamentale de notre cité : la souveraineté dite du « peuple », ou de la « nation », la bonne opinion à un instant donné semble être l'opinion que l'on dit « publique » ; le critère de conformité précédent tend à être oublié au profit des deux premiers du point 2 : l'immense majorité voire consensus, ou la majorité, expression du simple règne de la force, sorte d'arbitraire « démocratique », si l'on entend par démocratie, la souveraineté du peuple traduite en règne de l'opinion. Les hétérodoxes deviennent alors, non pas seulement ceux qui s'opposent aux idées de la cité, mais tous ceux qui présentent une opinion divergente soit de celle qui fait consensus, soit de celle qui est majoritaire, et en subissent les conséquences : blâme, disqualification…
4- Je conseille personnellement, aux hétérodoxes de fopo, de se soumettre d'autant plus à une éthique de la discussion, point certes à peine ébauché précédemment, en tant qu'il s'agit d'un moyen possible de diminuer le risque de persécution. Soyez hétérodoxes, mais irréprochables, évitez si possible d'y ajouter la provocation, votre propos suffit ; lorsque votre interlocuteur vous y incite, concentrez-vous sur le sujet du débat, ce qui implique de maîtriser ses sujets, de ne pas contester sans une mûre réflexion. Gardez à l'esprit le positif : internet reste pour le moment un refuge.