Ta question sur une implication financière russe, directe ou masquée, dans les réussites de Donald Trump est complexe et touche à des zones où les faits établis se mêlent à des spéculations persistantes. Je vais examiner ça étape par étape, en m’appuyant sur ce qu’on sait et en soulignant les limites des preuves disponibles.
Trump a bâti une partie de sa fortune dans l’immobilier, souvent en s’appuyant sur des financements extérieurs, surtout après ses déboires financiers des années 1990, quand les grandes banques américaines ont commencé à le fuir à cause de ses multiples faillites (notamment les casinos d’Atlantic City). À ce moment-là, il a dû trouver d’autres sources de capitaux, et c’est là que des liens avec des entités ou individus russes apparaissent dans le tableau.
Un exemple concret : en 2008, Trump vend une propriété à Palm Beach, en Floride, à Dmitry Rybolovlev, un oligarque russe, pour 95 millions de dollars. Il avait acheté ce manoir quatre ans plus tôt pour environ 41 millions. Sur le papier, c’est une plus-value impressionnante, mais le timing est suspect : on est en pleine crise immobilière mondiale, et le prix semble exorbitant pour une maison qu’il n’avait presque pas rénovée. Certains, comme le sénateur démocrate Ron Wyden, ont suggéré que cette transaction pourrait masquer un transfert de fonds douteux, peut-être une forme de "soutien" déguisé. Cependant, aucune preuve formelle ne montre que cet argent venait directement de Moscou ou d’une entité étatique russe – Rybolovlev était un milliardaire privé, pas un fonctionnaire du Kremlin.
Ensuite, il y a le cas de Bayrock Group, une société immobilière qui a collaboré avec Trump sur des projets comme le Trump SoHo à New York. Bayrock était dirigée par Tevfik Arif, un ex-officiel soviétique du Kazakhstan, et Felix Sater, un Russo-Américain avec un passé trouble (fraude boursière liée à la mafia russe dans les années 1990). Bayrock a apporté des fonds essentiels à Trump à une époque où il peinait à obtenir des prêts classiques. Des rapports, comme ceux de Foreign Policy ou du Washington Post, indiquent que ces capitaux provenaient en partie de sources de l’ex-Union soviétique, mais rien n’établit un lien direct avec le gouvernement russe. Les flux d’argent étaient souvent opaques, passant par des sociétés-écrans ou des paradis fiscaux, ce qui rend difficile de tracer une ligne claire jusqu’à Moscou.
Un autre point : les déclarations des fils de Trump. En 2008, Donald Trump Jr. a dit lors d’une conférence immobilière que "les Russes représentent une part disproportionnée de nos actifs" et que "beaucoup d’argent vient de Russie". Eric Trump aurait aussi affirmé en 2014 que leur expansion pendant la crise financière s’expliquait par des fonds russes, car "nous n’avons pas besoin des banques américaines". Ces propos suggèrent une dépendance envers des investisseurs russes, mais ils ne précisent pas si cet argent était lié à l’État ou à des oligarques indépendants.
Des transactions plus récentes soulèvent aussi des questions. En 2022, Trump Media, la société derrière Truth Social, a reçu des prêts d’urgence via ES Family Trust, une entité liée à Anton Postolnikov, un Russo-Américain qui co-dirige Paxum Bank, une banque des Caraïbes sous enquête fédérale aux États-Unis. Les documents obtenus par The Guardian montrent que ce trust, créé par un avocat de Saint-Pétersbourg, a servi à injecter des fonds dans Trump Media alors que la fusion avec Digital World était en péril. Postolnikov est le neveu d’Aleksandr Smirnov, un proche de Poutine, mais là encore, pas de preuve directe que cet argent venait du Kremlin plutôt que d’intérêts privés.
L’opacité est un thème récurrent. Trump utilise souvent des sociétés-écrans et des structures offshore, une pratique courante dans l’immobilier mais aussi idéale pour masquer l’origine des fonds. Des enquêtes, comme celle de Reuters en 2017, ont révélé que des Russes (63 individus avec passeports ou adresses russes) ont investi au moins 98,4 millions de dollars dans des tours de luxe estampillées Trump en Floride. Était-ce de l’argent "propre" d’oligarques ou un canal pour des intérêts russes plus larges ? Impossible de le dire sans accès à ses registres financiers complets ou à ses déclarations fiscales, qu’il n’a jamais rendues publiques.
Les soupçons d’implication masquée se renforcent avec des affaires comme celle de Deutsche Bank, qui a prêté des centaines de millions à Trump quand personne d’autre ne voulait. En 2017, cette banque a été condamnée à payer 630 millions de dollars pour avoir blanchi 10 milliards de fonds russes via des "mirror trades". Coïncidence ou connexion ? Les enquêteurs de Robert Mueller et du Congrès ont exploré cette piste, mais sans conclusion décisive (conclusion décisive).
En résumé, oui, il y a des indices d’une implication financière russe dans les réussites de Trump – via des oligarques, des partenaires douteux comme Bayrock, ou des transactions opaques. Mais une implication directe et prouvée de l’État russe, masquée ou non, reste hors de portée des preuves publiques. Si Moscou avait orchestré un soutien discret, ils auraient effectivement eu intérêt à éviter des liens trop évidents pour ne pas attirer l’attention, comme tu le suggères. Cela dit, les oligarques russes opèrent souvent dans une zone grise où leurs intérêts personnels et ceux du Kremlin se chevauchent, rendant la distinction floue. Sans documents déclassifiés ou une percée judiciaire, on en est réduit à assembler un puzzle incomplet. Qu’en penses-tu toi-même face à ces éléments ?