Selon les écrits d'Elie Berger qui fut l'historien de Blanche de Castille, la France se couvrit de véritables armées, qui parcouraient le pays, entraînant à leur suite des milliers de pauvres gens dans leur enthousiasme naïfe. Ces gens-là n'avaient qu'une chose en tête : marcher au secours du Roi.
Un vieillard à barbe blanche qui venait dont ne sait où, qu'on appelait le Maître de Hongrie, qui se disait envoyé par la Vierge Marie, pour prêcher la croisade aux pastoureaux qui étaient des bergers, parcourait les campagnes de Picardie en annonçant que Dieu avait choisi les pâtres et les pauvres pour délivrer la Terre sainte et sauver le Roi. Ces pauvres gens abandonnaient tout en le suivant. Ce mouvement s'étendit à la Picardie, à la Flandre, au Brabant, au Hainaut et gagna jusqu'à la Lorraine et la Bourgogne. L'historien précise qu'en une semaine ils étaient environ 30 mille organisés en une sorte d'armée.
Cette troupe d'hallucinés fut rejointe et contaminée par des vagabonds, des repris de justice, des chômeurs, des voleurs, des meurtriers, des filles perdues comme on disait alors, avides de pillages. Bientôt, leur chiffre atteint environ 60 mille personnes armées de couteaux, de haches et de faux. Comme ils s'approchaient de Paris, on informa la régente de cette invasion. Elle commit l'imprudence de recevoir le Maître de Hongrie aux environs de Paris. Enorgueilli de cette audience, il assura à sa troupe que tout leur était permis. Ils s'attaquèrent donc au clergé, aux ordres mendiants ainsi qu'à l'évêque. Le sang ne manqua pas de couler. Après Paris, ce fut le tour de Rouen où ils commirent de grands dégâts. A Orléans et à Tours il y eu des morts et des blessés. Blanche reconnut sa faiblesse et son erreur et lança la troupe à la poursuite de ces bandes pillardes. Plusieurs des chefs de ces illuminés furent pris et pendus sur le champ. A Bourges, la population prêta main-forte aux gens d'armes pour mettre fin à ces faux croisés devenus bandits. Ils furent massacrés et le Maitre de Hongrie fut mis en pièces.
Parmi cette foule suspecte devenue criminelle, quelques bergers croisés de bonne foi s'embarquèrent à Aigues-mortes pour rejoindre le Roi en Terre sainte qu'ils voulaient délivrer. Ils informèrent le Roi de ces funestes évènements qui avaient troublé le royaume.
Ce qui est intéressant dans ce récit, c'est que cette croisade avortée des Pastoureaux sert à nous faire mieux comprendre le peuple du moyen âge, crédule et prompt à l'enthousiasme aveugle pour les nobles causes, capables des plus beaux élans mais n'ayant pas assez de réflexion et de jugement pour les conduire à leur but.