Les combats de Zineb, née en 1982 à Casablanca d’un père marocain et d’une mère Française, se nourrissent davantage de son expérience intime. Très jeune, elle se questionne sur le destin qui l’attend en tant que femme musulmane. «Comme toutes les Marocaines, j’ai grandi dans une société où j’étais entourée de femmes qui souffraient, se souvient-elle. C’était une société où les femmes recevaient leurs lettres de répudiation par la poste, étaient spoliées de leurs biens. Mon grand-père était polygame et pendant des années, j’ai vu ma grand-mère somatiser…» À l’âge de 8 ans, lorsqu’elle vient en vacances en France, elle découvre que les femmes y sont plus libres. «Je voyais bien, même à cet âge-là, que ceux qui n’étaient pas musulmans vivaient bien mieux, vivaient plus heureux.» Mais Zineb idéalisait peut-être trop le pays des droits de l’homme. Jamais elle n’aurait pu imaginer y être rattrapée par l’islamisme meurtrier.
La jeune femme se souvient d’un Maroc où le voile était encore anecdotique, puis du moment de basculement où elle a vu la société se voiler, comme cela est arrivé aussi en Algérie. «Le voilement des femmes est l’indice premier qui nous renseigne sur le taux de pénétration de l’idéologie islamiste dans une société. C’est le marqueur visuel d’une adhésion ou pas à cette idéologie. C’est à ça qu’il sert dans les pays où l’islamisme progresse, constate-t-elle. Quel choc pour moi de voir que ce débat se pose aujourd’hui en France et qu’il est accueilli avec beaucoup d’inculture, de mauvaise foi…»
Le diagnostic de Zineb est encore plus sombre. «Le communautarisme mène fatalement à la guerre, assène-t-elle. Je ne peux pas m’empêcher de comparer ce qui se passe ici sur notre sol à ce qui s’est passé au Liban, pays qui est allé jusqu’au bout du cauchemar communautariste.»
https://www.lefigaro.fr/vox/societe/elisabeth-badinter-zineb-el-rhazoui-les-insoumises-20191129