https://www.lefigaro.fr/vox/histoire/l-antisemitisme-de-gauche-une-vieille-histoire-depuis-200-ans-20231117
Les propos de Mélenchon et ses proches sur Israël et le Hamas n’ont rien d’un «dérapage» isolé. L’antisémitisme existe, à gauche, depuis deux siècles, mais a été occulté, refoulé. Il y a des épisodes sur lesquels on préfère garder le silence. Or ce passé peu connu est éclairant.[…]
À gauche, une partie importante des socialistes pré-marxistes (également appelés socialistes utopiques) portent ainsi un regard de réprobation morale envers les Juifs, symboles pour eux du monde nouveau en train de s’imposer et qui déstabilise une société encore rurale et traditionnelle. En 1838-1839, la romancière George Sand, dont le cœur vibrera pour les ouvriers insurgés en juin 1848 et conspuera la majorité conservatrice de l’Assemblée, séjourne à Majorque avec Chopin. Or elle juge que les Juifs sont, dans l’île, en train d’accaparer la richesse. Dans vingt ans, ils « pourront s’y constituer à l’état de puissance comme ils l’ont fait chez nous », ajoute-t-elle. En 1857, elle écrit encore, comme une conséquence du triomphe du capitalisme industriel et financier : « dans cinquante ans, la France sera juive » (cité par l’historien Michel Dreyfus dans son livre). L’inventeur du mot « socialisme », le Français Pierre Leroux (1797-1871), décrit les « plus grands capitalistes de France [comme] des juifs qui ne sont pas des citoyens français mais des agioteurs de tous les pays » (De la Ploutocratie, 1843). Trois ans plus tard, Leroux publie, dans la Revue sociale, financée par George Sand, un article où il assure ne pas incriminer les Juifs en tant que tels, qu’il qualifie de « race humiliée » mais affirme s’attaquer à l’«esprit juif, c’est-à-dire à l’esprit de gain, de lucre, de bénéfice, à l’esprit de négoce et d’agio». ....