La légitimité d'Israël, les fondements juridiques
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Une vidéo et un dossier complet sur les fondements juridiques de la légitimité d’Israël.
Selon le Premier Ministre Benjamin Netanyahu, le conflit entre Israël et les Palestiniens trouve sa vraie origine dans le refus persistant des Palestiniens de reconnaître « le droit du peuple Juif à son propre état dans sa patrie historique »; et il a posé le réglement de cette question comme condition « préalable à tout accord mettant fin au conflit ». Ce faisant, Netanyahu a remis le droit fondamental national juif à l’ordre du jour, droit autrefois évident, mais rarement mentionné de nos jours.
La série Points de Vue de Jérusalem est publiée par l’Institut des Affaires Contemporaines co-fondé avec la famille Wechsler. No 579 Septembre-Octobre 2010
Par Joshua Teitelbaum
Adapté par Dominique Kahtan pour Israel-flash
Quatre-vingt dix ans ont passé depuis la Conférence de San Rémo, qui suivit la première guerre mondiale (1920) et, lors de laquelle, suite à la défaite de l’Empire Ottoman, le Conseil Suprême des principales Puissances Alliées divisa et répartit les territoires du Moyen-Orient. A San Rémo, il fut aussi décidé d’ajouter la Déclaration Balfour de 1917 au Mandat Britannique, déclaration qui soutenait l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif; cette décision signifiait la confirmation et la reconnaissance internationale du droit des Juifs à l’auto-détermination.
Le protocole de San Rémo représenta un triomphe pour le Sionisme qui y vit une solution nationale au problème des Juifs. Il y était reconnu que les Juifs n’existaient pas seulement en tant que simples personnes adhérant à une religion donnée, le Judaïsme, mais existaient aussi et surtout en tant que groupe soudé qui méritait sa propre expression nationale sous la forme d’un foyer national. Et ce foyer serait en Palestine, l’ancienne patrie des Juifs. Le protocole de San Rémo devint, ainsi que l’a fait remarquer Lord Curzon, le Secrétaire britannique aux Affaires Etrangères, la « Magna Carta des sionistes. » En ces temps-là, le terme « foyer national » signifiait réellement et clairement un état.
L’autodétermination juive faisait partie du processus qui mit un terme à la colonisation du Moyen-Orient en un sursaut qui aboutit à l’indépendance aussi bien arabe que juive.
Fait nouveau mais persistant, Israël est accusé de colonialisme, un « canard » sans fondement historique qui fait abstraction du lien plusieurs fois millénaire qui unit les Juifs en tant que peuple indigène à la Terre d’Israël. C’est ignorer les effets positifs du Sionisme sur les Arabes, conséquences du processus de décolonisation. Le Rapport de la Commission britannique Peel de 1937 ne pouvait être plus clair à ce sujet. En vérité, ce fut aussi le retour des Juifs sur leur terre qui donna du poids à l’établissement d’une identité palestinienne unique et distincte.
Les juifs retrouvèrent leur place dans l’histoire avec la création de l’Etat d’Israël. Elle se fit avec l’appui des institutions internationales qui reconnurent la légalité et l’importance de l’auto-détermination nationale juive. Ces institutions nationales reconnurent la validité du Sionisme, le mouvement de libération nationale des Juifs. De nos jours, ceux, qui nient encore le droit juif à l’auto-détermination plus de soixante ans aprés la fondation de l’Etat d’Israël, s’engagent sur la route d’un anti-sémitisme nouveau.
Dans son discours du 14 juin 2009, prononcé à l’Université de Bar-Ilan dans lequel il acceptait le principe d’un état palestinien démilitarisé, Le Premier Ministre, Benjamin Netayahu a souligné à plusieurs reprises la demande expresse d’Israël d’arriver à un accord de paix final, à savoir la reconnaissance d’Israël comme l’état-nation du peuple juif. Netanyahu n’en a pas fait une condition préalable aux négociations. Toutefois, suivant son raisonnement, « l’origine réelle du conflit » entre Israël et les Palestiniens réside dans le refus permanent de ces derniers de reconnaitre « le droit du Peuple Juif à son état propre dans sa patrie historique ». Il a souligné que « le conflit ne pourrait prendre fin qu’une fois cette question réglée.»
La reconnaissance de la validité du droit du peuple juif à sa patrie ancestrale n’est nullement un nouveau concept. En vérité, ses racines historiques remontent loin dans la nuit des temps, mais ont été malheureusement ignorées dans la majorité des débats publics autour du conflit israélo-arabe. De fait, nier ce droit a fait partie intégrante de la campagne internationale organisée pour contester la légitimité d’Israël dans son essence-même.
C’est pour cette raison qu’il est impératif de ré-affirmer les fondements internationaux, légaux et historiques de ce concept pour contrer le discours actuel de déligitimation et ré-instituer et faire accepter le concept de l’autodétermination juive en tant que norme internationale. Ainsi, la demande de Nétanyahu prend une importance qui va bien au-delà du processus de paix, en remettant à l’ordre du jour, sur la scène mondiale, le droit fondamental national juif, droit évident il fut un temps, mais rarement mentionné de nos jours.
Les racines historiques du droit à l’auto-détermination du peuple juif, droit reconnu par les Nations
Quatre-vingt dix ans ont passé depuis la Conférence de San Rémo, qui suivit la première guerre mondiale (1920) et, lors de laquelle, suite à la défaite de l’Empire Ottoman, le Conseil Suprême des principales Puissances Alliées (composé de la Grande-Bretagne, la France et l’Italie) divisa et répartit les territoires du Moyen-Orient. A San Rémo, il fut aussi décidé d’ajouter au Mandat Britannique la Déclaration Balfour de 1917 qui soutenait l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif; cette décision signifia la confirmation et la reconnaissance internationale du droit juif à l’autodétermination dans la région que les juifs appellent « terre d’Israël », (« eretz Israel » en hébreu.).
Certains considéraient le système mandataire comme un prolongement du colonialisme français et anglais, or les mandats n’étaient que provisoires et ce à dessein : ils finirent par faire place aux indépendances arabe et juive. De fait, le système des mandats peut être compris avant tout comme un pas vers la décolonisation (Woodrow Wilson, le Président des Etats-Unis l’a, sans aucun doute, compris comme tel) , un pas vers la restitution d’une grande partie du Moyen-Orient à sa population indigène, libérée ainsi du joug quatre fois centenaire des colonisateurs ottomans.
Le processus de paix de ces dernières décennies, qui a relancé l’idée de la solution à deux Etats permettant la réalisation de l’indépendance juive et de l’indépendance palestinienne, a, ô ironie, ressuscité aussi l’idée de la solution « état unique ». Avec le temps, cette solution permettrait à une majorité arabe de s’établir dans le pays, mettant de ce fait un terme à l’auto-détermination juive. Ainsi, sous le couvert des droits humains, les partisans de la solution à un état ou du « droit au retour » palestinien, refuseraient au peuple juif son droit fondamental à l’auto-détermination, commettant ainsi une immense injustice à l’égard de ce peuple sans pour autant apporter la paix.
Ceux, qui sont vraiment pour la paix et la stabilité, devraient encourager l’auto-détermination pour ces deux peuples dans deux états. En effet, au Moyen-Orient, la solution à un état n’apporterait que mort et destruction. Pensez au Liban, à l’Irak et à la Somalie, et non pas à la Suisse!
LE PRELUDE A SAN REMO
Déjà du temps de la Conférence de San Rémo en avril 1920, les Alliés avaient fait quelque progrès sur la question du partage des possessions territoriales ottomanes. Les Britanniques, sûrs du bien-fondé d’avoir une Palestine Britannique après-guerre, devaient encore en convaincre les Français, puisque, ce faisant, ils iraient à l’encontre des termes de l’accord Sykes-Picot de 1916 qui stipulait que la Palestine devait être placée sous contrôle international.
Pour s’assurer de l’appui français, les Britanniques devaient d’abord convaincre les Français d’apporter leur soutien à l’établissement d’un foyer national Juif en Palestine, ce qui fut chose faite en Juin 1917 . Suite à ces démarches diplomatiques, la Déclaration Balfour fut promulguée le 2 novembre 1917. Le consentement des Français à un gouvernement britannique était dicté par les réalités sur le terrain, les victoires militaires des Britanniques dans les provinces arabes de l’empire Ottoman et, plus particulièrement, en Palestine auxquelles la France n’avait, pour ainsi dire, pas participé.
La Convention de la Société des Nations fut ratifiée par la Conférence de Paix de Paris en avril 1919 et ajoutée plus tard au Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919. Elle reconnaissait le système des mandats de tutelle et lui reconnaissait sa validité internationale dans l’article 22 de la Convention . Toutefois, ce furent les puissances victorieuses, la France et la Grande-Bretagne, réunies pour la première fois à Londres du 12 au 24 février 1920, qui décidèrent de la nature des mandats et des pouvoirs mandataires. La Conférence de Londres, suivie, en avril, de celle de San Rémo, avaient pour mission d’obtenir le consensus des Alliés avant de signer un traité avec l’Empire Ottoman, connu sous le nom de »Traité de Sèvres » (remplacé ultérieurement par le Traité de Lausanne avec la Turquie.)
A SAN REMO
La Grande-Bretagne, La France, le Japon et l’Italie avec les Etats-Unis, comme observateurs, se réunirent, du 18 au 26 avril 1920, en Conseil Suprême des Puissances Alliées Principales, pour discuter des mandats et du futur des Territoires du Moyen-Orient qui avaient été sous le joug de l’Empire Ottoman récemment vaincu et maintenant effondré. La Grande-Bretagne était représentée par David Lloyd George, son premier Ministre et par Lord Nathaniel Curzon, son Secrétaire aux Affaires Etrangères. Les Français, eux, étaient représentés par leur Premier Ministre, Alexandre Millerand et par leur directeur des Affaires Politiques au Ministère des Affaires Etrangères, Philippe Berthelot. La portée des évènements de San Rémo n’a pas vraiment reçu l’attention méritée, or, c’est bien à San Rémo qu’Israël est né.
Le 24 avril, la Grande-Bretagne et la France se réunirent pour discuter de l’avenir de la Palestine. L’Italie présidait et les Etats-Unis observaient. Lloyd George et Lord Curzon, à la tête de la délégation britannique, tenaient à ce que le Mandat sur la Palestine soit confié à la Grande-Bretagne et à inclure le texte de la Déclaration Balfour au traité avec la Turquie.
Les Français, toutefois, se montrèrent fort peu enthousiastes alors que les Britanniques avaient cru à un accord préalable. Berthelot déclara que la Déclaration Balfour était un document unilatéral britannique, « une déclaration officieuse faite par une seule puissance » et que comme telle, elle ne pouvait figurer dans le traité. Ajoutons que les Français tenaient à la reconnaissance de leur charge de gardiens et protecteur des Lieux Saints de la Chrétienté que la Déclaration Balfour avait omis de mentionner.
Lloyd George, toutefois, ne voulut rien entendre et refusa toute présence française. Avoir deux puissances mandataires en Palestine était hors de question et il proféra même une menace plutôt lourde de sens : « Cela pourrait soulever des difficultés en ce qui concerne les relations (de la Grande-Bretagne) avec la France ». La France devait laisser à la Grande-Bretagne seule le soin d’administrer la Palestine et avoir pitié de Londres et de son fardeau : en effet, » gouverner la Palestine n’allait pas être une tâche facile, rendue plus difficile encore du fait qu’elle allait devenir le foyer national des Juifs, une race extraordinairement intelligente, mais difficile à gouverner. »
Les Français finirent par céder, ramenant leurs demandes à une simple exigence, qu’il soit stipulé dans le procés-verbal qui n’y aurait pas de suspension des droits des communautés non-juives. Le 24 avril, l’avant-projet de cette clause fut soumis au Conseil Suprême qui l’approuva officiellement le 25 avril. Les Britanniques l’avaient donc emporté.
Le protocole de la Conférence de San Rémo reprend dans le détail les provisions générales relatives au système mandataire, formulées dans l’article 22 du Pacte de la Société des Nations, mentionné auparavant. Le paragraphe en vigueur stipule :
« le pouvoir mandataire sera responsable de la mise à exécution de la déclaration faite à l’origine le 8 novembre 1917 par le gouvernement britannique et adopté par les autres Forces Alliées, en faveur de l’établissement en Palestine d’un Foyer national pour le peuple juif. Il était entendu que « rien ne sera fait qui puisse porter atteinte ni aux droits civils et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, ni aux droits et au statut politique dont les Juifs jouissent dans tout autre pays »
Les parties ont aussi convenu que la France deviendrait la puissance mandataire pour la Syrie et la Grande-Bretagne pour la Mésopotamie (qui deviendra l’Irak) et la Palestine.
Le protocole relatif à la Palestine, adopté à San Rémo, est remarquable pour diverses raisons. Tout d’abord, il entérinait la reconnaissance des Grandes Puissances du principe d’autodétermination nationale juive.
Ainsi donc, le Sionisme triomphait et voyait là la solution nationale au problème des Juifs contraire aux autres solutions offertes, telle l’assimilation. Le Protocole reconnaissait l’existence des Juifs non pas seulement en tant que personnes adhérant à une certaine religion, le judaïsme, mais plutôt en tant que collectif digne et méritant de pouvoir exprimer son caractère national, et ce, sous la forme d’un foyer national. Et ce foyer se devait d’être en Palestine, le pays ancestral des Juifs. Il est intéressant de noter que les droits des arabes (communautés non-juives) en Palestine n’incluaient que les droits civils et religieux sans mentionner les droits nationaux.
Le protocole est une copie intégrale de la Déclaration Balfour avec, toutefois, une modification d’importance. Alors que dans la Déclaration Balfour, la Grande-Bretagne promettait « d’employer tous ses efforts pour faciliter » l’établissement d’un foyer national juif en Palestine, à San Rémo, cette promesse devint une obligation qui devait prendre effet.
La Grande-Bretagne, en tant que puissance mandataire devenait directement responsable de « l’application da la Déclaration Balfour ». Mais, fait très important, à l’origine, la Déclaration Balfour n’était qu’une simple déclaration politique ; or une fois incorporée au Mandat de la Palestine, elle devint « un acte international législatif » entériné par les Principales Forces Alliées .
Selon la formule de Lord Curzon, le Protocole entériné à San Rémo représentait la « Magna Carta des Sionistes. » Il était alors évident que le terme « foyer national » était synonyme d’état. En 1917, trois mois aprés la publication de sa Déclaration, Lord Balfour avoua : »Quant à moi, j’ose espérer que les Juifs réussiront en Palestine et pourront finalement y créer un Etat Juif ». Les recommandations préliminaires des services de renseignements américains au Président Wilson, lors de la Conférence de la Paix de Paris de 1919, allaient dans le même sens : « la Société des Nations aura pour politique de reconnaître la Palestine comme Etat Juif dès que celle-ci sera devenue un état juif de facto. »
APRES SAN REMO
Le 26 avril 1920, suivant des ordres, Louis Jean Bois, général de division britannique, responsable politique et administrateur principal de l’administration (sud) des territoires ennemis occupés, annonça aux chefs des communautés de Jérusalem que le Conseil Suprême avait approuvé un mandat pour la Palestine qui serait probablement confié à la Grande-Bretagne. Plus important encore, il leur dit que « la Déclaration Balfour relative à un Foyer National Juif serait inclue dans le Traité de Paix avec la Turquie. » selon le Times, cette déclaration fut accueillie dans le calme. » Toutefois on assista à des célébrations dans les communautés juives à travers le monde .
Le Protocole entériné à San Rémo fut incorporé intégralement au Traité de Sèvres signé le 10 août 1920, article 95. Le Traité toutefois ne fut jamais ratifié par la Turquie. En effet, le nouveau mouvement nationaliste qui avait pour chef Mustapha Kemal, le héros de Gallipoli, refusait le traité, invoquant le nombre des clauses (sans rapport avec la Palestine) qu’il trouvait préjudiciables à la Turquie. Au moment de la signature du Traité de Lausanne, le traité de remplacement, le 24 juillet 1923, le Mandat pour la Palestine avait été déjà confirmé dans le Mandat pour la Palestine de la Société des Nations du 24 juillet 1922 . Il prit effet le 26 septembre 1923.
Le Mandat pour la Palestine de la Société des Nations représente un document-clé qui souligne la légitimité internationale du droit à l’auto-détermination juive en Israël ou Palestine que l’on retrouve, selon Howard Grief, dans les trois considérants du Préambule . Le premier considérant figure dans la référence à l’Article 22 de la Charte de la Société des Nations qui implique que l’auto-détermination contribuerait au bien-être et au développement des peuples auparavant assujettis.
Le deuxième considérant reprend la Déclaration Balfour, modifiée à San Rémo, qui confie à la Grande-Bretagne la responsabilité de la mise à exécution de la déclaration et de ses intentions.
Pour finir, le troisième et sans doute le plus important considérant, contenu dans le Préambule, rappelle et souligne que la « reconnaissance est ainsi accordée au lien historique du peuple Juif avec la Palestine »; il souligne aussi que ceci constitue une « raison suffisante et valable pour ré-établir le foyer national du peuple juif dans ce pays. »
Ce qui précède montre de façon claire et nette que l’auto-détermination juive faisait partie d’un processus qui mit fin, peut-être même involontairement, à la colonisation au Moyen-Orient. Cet effort apporta l’indépendance aux Arabes aussi bien qu’aux Juifs. Les allusions récentes et souvent répétées associant Israël et colonialisme -canard sans fondement historique qui veut effacer l’attachement plusieurs fois millénaire des Juifs à la terre d’Israël dont ils sont originaires- tait les avantages (ô ironie du sort !) que le Sionisme a, de fait, apportés aux Arabes pendant le processus de décolonisation. Le Rapport de la Commission Peel de 1937 était trés clair à ce sujet :
« Que la Déclaration Balfour ait eu pour but d’assurer le soutien juif aux Alliés et que ce soutien leur ait été acquis est un fait insuffisamment apprécié en Palestine. Les Arabes ne semblent pas réaliser que, tout d’abord, la situation actuelle du monde arabe dans son entier repose sur les sacrifices encourus par les Puissances Alliées et Associées au cours de la guerre et, que si la Déclaration Balfour a bien contribué à la victoire des Alliés, elle a aussi contribué à l’émancipation de tous les pays arabes sous la férule turque. Si les Turcs et leurs alliés germaniques avaient gagné la guerre, il est fort peu probable que tous les pays arabes, la Palestine exceptée, aient gagné ou soient en passe de gagner leur indépendance . »
Quant aux Palestiniens, il est clair que, pendant de nombreuses années après la première guerre mondiale, eux-mêmes se considéraient comme une partie intégrante de la Syrie ; toutefois, ultérieurement, au contact permanent du Sionisme et de ses « défis », et aussi de l’indépendance des états arabes, ils se forgèrent une identité palestinienne.
Ce fut, en effet, le retour des Juifs sur la Terre d’Israël qui a contribué au mouvement populaire important pour une identité palestinienne distincte et unique. On peut se demander si une nation palestinienne totalement séparée aurait vu le jour sans le succès de l’auto-détermination juive. Le délégué syrien a soulevé cette même question aux Nations-Unies lors du débat sur le plan de partage de 1947 :
« La Palestine était une province syrienne. On ne peut nier l’existence des liens géographiques, historiques, raciaux et religieux. On ne peut distinguer les Palestiniens des Syriens et « sans la Déclaration Balfour et les termes du Mandat, la Palestine serait restée une province syrienne »(souligné par l’auteur J.T).
MISE EN OEUVRE DE L’AUTO-DETERMINATION JUIVE : LE PARTAGE DE LA PALESTINE ET L’ADMISSION D’ISRAEL AUX NATIONS-UNIES.
Si la communauté internationale avait encore quelques doutes quant au bien-fondé d’un état juif, celui-ci devint une nécessité absolue suite aux horreurs de l’Holocauste perpétrées par les Nazis allemands. Le 29 novembre 1947, les Nations- Unies, de par la Résolution 181 de l’Assemblée Générale , acceptèrent le Partage de la Palestine en un état juif et un état arabe , liés dans le cadre d’une union économique, la ville de Jérusalem devant recevoir un statut international spécial.
Le décompte des voix : 33 pour, 14 contre, 10 abstentions, 1 absent. A l’époque, sur la scène internationale, l’idée d’un état-nation juif avait été acceptée, considérée comme acquise même. Le document des Nations Unies, dans son entier, faisait référence aux Juifs en termes nationaux et non religieux, il en était de même pour les arabes. Le terme « Etat Juif » est mentionné 27 fois dans la Résolution.
Israël est à la fois un état-nation juif et un état démocratique, ce que les auteurs de la résolution du partage ne considéraient ni comme un exploit ni comme une contradiction des termes. Ils stipulaient que les deux états, juif et arabe, dans la Palestine partitionnée, devaient être des états démocratiques et devaient, chacun, protéger les droits de leurs minorités nationales . Mais la légitimité d’Israël en tant qu’Etat n’est pas, par définition, liée à sa nature démocratique. Que la démocratie en Israël ne soit pas parfaite -quelle démocratie l’est?- ne diminue en rien sa légitimité. Ainsi que l’écrivent Alexander Yakobson et Amnon Rubinstein :
« Même les nations sans semblant de démocratie se voient universellement accordées le droit à l’indépendance nationale, et dans de tels cas (pas si exceptionnels au Moyen-Orient), il ne se trouve personne pour venir affirmer que l’idée d’une indépendance nationale est antidémocratique . »
Israël a permis à une large minorité nationale de rester sur son territoire après la guerre de 1948 (la Jordanie et l’Egypte n’ont pas permis aux Juifs de rester dans les territoires qu’elles avaient conquis, territoires qui avaient été attribués par l’ONU à l’état arabe qui devait être crée en Palestine). Tout naturellement, l’expression de la majorité juive s’est exprimée par les symboles juifs, tel le drapeau et le sceau, par une culture nationale et en désignant le samedi comme jour du repos.
Aucune différence avec les nombreuses démocraties qui ont donné une expression à l’identité chrétienne de leurs populations majoritaires. Ainsi, plusieurs états ont une croix sur leurs drapeaux : Le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l’Australie (ces derniers en ont trois), la Suisse, la Norvège, la Finlande, le Danemark et la Grèce. Le Pakistan et la Turquie ont le croissant islamique sur leur drapeau et l’Inde, elle, a un symbole religieux sur son drapeau. La reine, Le chef d’état de la Grande-Bretagne est aussi le chef de l’Eglise Anglicane.
Les liens historiques des Juifs avec la Terre d’Israël paraissaient évidents à la communauté internationale ainsi que l’a reconnu la Société des Nations dans son mandat qui « reconnaissait le lien historique du peuple juif et de la Palestine » et le droit de ré-établir son foyer national dans ce pays ». L’UNSCOP, Le Comité spécial des Nations Unies pour la Palestine, qui recommanda le partage, avait clairement reconnu l’attachement historique des juifs à la Terre d’Israël et son rapport le mentionne à plusieurs reprises.
Le 11 mai 1949, l’ONU reconnut et admit Israël, l’état juif créé par les Nations-Unies, en tant « qu’état pacifique qui accepte les obligations contenues dans la Charte et prêt à remplir ces obligations ».
L’EUROPE ET L’AMERIQUE : NIER LA LEGITIMITE DE L’AUTODETERMINATION JUIVE EST UN ACTE ANTISÉMITE
Le droit à l’autodétermination du peuple juif est non seulement un droit qui a été reconnu par la communauté internationale depuis presqu’un siècle déjà mais aussi un droit qui a été accepté et reconnu récemment comme tel par l’Union Européenne et le Département d’Etat des U.S.A. Le rejet de ce droit est condamné comme acte antisémite.
En 2005, l’Observatoire Européen des Phénomènes Racistes et Xénophobes de L’UE parvint à formuler une « définition de travail de l’Antisémitisme ». Passant en revue les manifestations diverses et variées de l’antisémitisme, le document note que l’Etat d’Israël est « perçu comme collectivité juive » et cite un exemple d’antisémitisme :
« Nier au peuple juif le droit à l’autodétermination, en prétendant par exemple que l’existence de l’Etat d’Israël est une entreprise raciste. »
En mars 2008, le Département d’Etat des U.S.A a adopté le verbatim de cette définition .
LE STATUT LEGAL INTERNATIONAL DE L’ETAT D’ISRAEL
Selon la théorie légale coutumière des relations internationales, les Etats dignes d’être reconnus comme tels sont ceux qui « ont un territoire bien défini, une population qui lui est propre, un gouvernement effectif et la capacité d’établir des relations avec d’autres Etats ».
En mars 2008, le Département d’Etat des U.S.A a adopté le verbatim de cette définition. Israël a répondu et continue de répondre à ces critères. Le fait qu’Israël soit un état juif n’a pas contribué à son acceptation (ni entravé celle-ci) en tant qu’état légitime au sein des nations. Cet état est légitime parce qu’il répond à tous ces critères.
L’Etat d’Israël est l’expression légitime de l’autodétermination du peuple juif, conforme aux droits humains universels, le droit à l’autodétermination inclus. Certains refusent l’autodétermination juive, invoquant qu’être juif signifie adhérer à une religion seulement, ce qui est contraire à la position historique de la communauté internationale. Ceci s’explique par l’attachement historique des Juifs à la Terre d’israël et leur désir constant d’y retourner, que cette aspiration soit physique et actuelle ou métaphysique et ancrée dans les prophéties des temps messianiques.
Le terme « Etat Juif » réfère à l’identité nationale et non religieuse. La majorité des Israéliens affirmeraient qu’ils font partie du peuple juif même s’ils ne sont pas religieux. Comme le reconnait et l’explique Ruth Gavon, la relation entre les Juifs et le judaïsme est unique, exceptionnelle : en effet,
« Aucun autre peuple n’a sa religion propre. Les peuplades arabes, par exemple, comprennent des chrétiens, des musulmans et des druzes. Alors qu’à une certaine époque, la plupart des français étaient catholiques, ou anciennement catholiques, ils se battaient contre les huguenots et, de nos jours, un grand nombre de français sont musulmans. Ajoutons qu’aucune autre religion ne présente un caractère national propre : les chrétiens peuvent être français, américains, mexicains ou arabes ; les musulmans, eux, peuvent être arabes, persans ou africains-américains.
Cette distinction ne résulte pas seulement de la sécularisation : le judaïsme, du moins, tel qu’il est perçu historiquement, n’a jamais fait de dinstinction entre son peuple et sa religion. Aucun développement tardif n’est venu modifier cet état de fait unique en soi : le stéréotype social n’a jamais permis qu’un individu fasse partie du peuple juif tout en adhérant à une autre religion ou qu’un juif soit observant sans appartenir au peuple juif »
NEGATION DE LA LEGITIMITE D’ISRAEL : REFLEXIONS SUR SON ORIGINE ET SON FONDEMENT
Lorsque le Plan de Partage de l’O.N.U fut approuvé en 1947 et que l’Etat d’Israël fut admis aux Nations-Unies l’année qui suivit, la légitimité d’Israël en tant qu’état-nation pour le peuple juif semblait inattaquable. Comment expliquer ce revirement?
Les partisans d’Israël continuent d’être déroutés par le déluge incessant des attaques médiatiques qu’essuie Israël quoique celui-ci fasse. Bien sûr, Israël contrôle encore la Judée-Samarie et sa politique de colonisation reste contreversée mais ce n’est pas faute d’essayer de parvenir à un accord reposant sur des offres sérieuses et radicales avec les Palestiniens (Camp David en 2000, Taba, en 2001 et les propositions du Premier Ministe, Ehud Olmert en 2008). Et pourtant, Jérusalem ne s’est vue attribuée aucun mérite aprés les retraits du Sinaï (1982), du Liban (2000) et de Gaza(2005).
Ajoutons à cela que les actes de légitime défense, au-dessus de tout soupçon, en réponse aux attaques en provenance des régions du Liban (2006) et Gaza (2008-9) ainsi que la défense du blocus légal contre les forceurs turcs de blocus (2010) n’ont reçu que peu de sympathie de la part des experts et des fonctionnaires.
En septembre 2010, le Time Magazine a publié un article de couverture intitulé : « Pourquoi Israël ne se soucie pas de la paix », et ce, au moment-même où Israël et les Palestiniens reprenaient le chemin des négociations directes, retardées d’un an et- demi par l’intransigeance palestinienne. L’article dans sa totalité insinue que les israéliens (lire les Juifs) s’intéressent plus à l’argent qu’à la paix .
Une partie du public américain a du mal à concilier ses notions politiques de liberté démocratique avec celles d’Israël. Ceci est dû au fait que l’idée américaine de la liberté tourne autour du droit de l’individu à être libre de toute tyrannie, étrangère ou nationale, alors que les Pères fondateurs d’Israël, héritiers d’un legs du nationalisme européen, concevait la liberté comme les droits collectifs d’une nation définie ou d’un peuple, donc ici, ceux du peuple juif.
Daniel Gordis écrit que, bien que le projet israélien se soit fortement inspiré de l’Amérique, ces deux pays différaient par leur philosophie fondatrice. L’Amérique représentait la liberté qui se définissait par une rupture avec une monarchie antidémocratique, destinée à mettre un terme à « une longue suite d’abus et d’usurpations » comme inscrit dans la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique, alors que la Déclaration d’Indépendance d’Israël repose sur le fait que la terre d’Israël est le berceau du peuple juif ».
Edward Said, s’inspirant de Michel Foucault et de bien d’autres, nous a appris l’importance du narratif et du discours sur le conflit israélo-arabe . Il fit particulièrement attention au discours, à la façon de cerner cette construction de langage, source de savoir et de pouvoir, indispensable à la promotion de la cause palestinienne. Said et ses partisans ont connu un énorme succès. Israël est souvent vu comme un état colonialiste, et les termes et locutions tels qu’ »occupation » et « droit au retour » sont devenus des expressions saturées politiquement, n’ayant qu’un seul sens. Ces expressions ont ensuite joué un rôle insidieux et psychologique en donnant forme et poids aux discours contre Israël.
Certains cercles-élites d’Europe ont leurs propres raisons pour nier la légitimité d’Israël, et en particulier nier le droit du peuple juif à son propre Etat-nation. Daniel Hannan, membre britannique du parti conservateur au Parlement européen, a fait remarquer lors d’un discours à Jérusalem, début 2010, qu’Israël, de par sa seule existence, lançait un défi au fondement intellectuel de l’intégration européenne, qui cherche à supplanter l’idéal national vétuste du continent européen en lui substituant l’Union Européenne.
Hannan fait valoir, qu’après tout, la création de l’Europe repose sur l’idée que les anciennes loyautés nationales sont arbitraires, éphémères qu’elles ont, en fin de compte, été discréditées, étant à l’origine de beaucoup de grandes guerres en Europe. Par contre, Israël, resuscité aprés 2000 ans, incarne l’idéal national. Hannan conclut en disant que si Israël a eu raison de re-fonder un foyer national, et si l’idéal national est vrai, certains en Europe pourraient penser que leur alternative multinationale est une erreur, ce qui expliquerait leur beoin d’attaquer Israël pour saper sa légitimité .
Il y a quelque chose de particulièrement irritant à voir nier l’existence du peuple juif et son droit à l’autodétermination. Une identité, par définition, se définit elle-même. Les juifs se définissent comme un peuple et approuvent par une majorité écrasante l’autodétermination juive telle qu’elle se manifeste dans l’Etat d’Israël.Tout comme il peut y avoir un état palestinien, les Palestiniens s’étant choisi une identié unique, il peut y avoir un état juif.
Reconnaître et affirmer le droit du peuple juif à un Etat-nation, n’est pas seulement important dans le contexte du processus de paix israélo-arabe. Il est essentiel de le faire pour contrer les puissances qui veulent délégitimer l’état juif pour des raisons de politique intérieure.
Les juifs ont retrouvé leur place dans l’histoire, suite à l’établissement de l’Etat d’Israël avec l’aide des institutions internationales, qui avaient reconnu la justice et l’importance de l’autodétermination nationale juive. Ces institutions ont reconnu la validité du Sionisme, le mouvement de libération national des Juifs. Ceux qui, de nos jours, nient encore le droit juif à l’autodétermination nationale, et ce plus de soixante ans aprés la fondation d’Israël, s’engagent dans un nouveau genre d’antisémitisme, un antisémitisme qui réclame l’élimination d’un Etat créé par les Nations Unies.
Cette position est inacceptable. Les circonstances qui ont poussé la communauté internationale à apporter son soutien à l’établissement d’un état juif et d’un état arabe (l’état arabe n’a pas vu le jour, les Arabes ayant déclaré la guerre à Israël et s’étant emparé des territoires attribués aux Palestiniens), sont encore actuelles. La communauté internationale se doit donc, non seulement, d’oeuvrer pour la paix et pour la solution à deux états, mais aussi de rester fidèle à ses décisions antérieures et de mettre un terme à la campagne pour délégitimer Israël en tant qu’ Etat-nation des Juifs.
Joshua Teitelbaum, Ph.D., est le responsable du comité pour la recherche au Centre des Affaires Publiques et de l’Etat à Jérusalem. Il occupe aussi un poste de chercheur au Centre Gloria, à IDCHerzliya et au Centre Dayan de l’Université de Tel-Aviv. Il est aussi maître de conférence associé à l’Institut Hoover et au Centre pour la Démocratie, le Développement et la Séparation Constitutionnelle de la Justice et du Pouvoir, tous deux dépendants de l’Université de Stanford. Il est l’auteur de nombreuses études pour le Centre de Jérusalem, telles que : « Ce que les Dirigeants Iraniens entendent par : Annihilation totale d’Israël » (2008) et « l’Initiative Arabe : une Première et ses Prospectives (2009). Son dernier livre paru, « Libéralisation Politique dans le Golfe Persique (Columbia University Press, 2009).