zenon
C'est vrai, il y a un aspect économique évident. L'information, c'est ce qui coûte le plus cher. Une chaîne qui balance des fictions (films, séries), ou des jeux, cela coûte un peu de sous, mais rien auprès des infos. Exemple entre mille : avoir des correspondants dans tous les pays du monde, avec des journalistes qui sont sur le terrain comme envoyés spéciaux pendant des années, ça coûte la peau du dos et Bolloré ne peut pas se permettre, ses danseuses lui en coûtent déjà bien assez.
Mais je crains de me redire : le fait divers, c'est pain bénit pour l'extrême-droite. Pourquoi ? Parce que ça m'interdit de penser. Ceci d'autant plus que cnews cherche bien à exploiter les faits divers les plus glauques. Avec une nette dilection pour ceux qui concernent les Arabes. Quand ce n'est pas le cas, on "invente" cette info, quitte à se rétracter piteusement lorsque le fake est avéré.
Mise en scène invariable : on suit pendant des heures un journaleux poireautant dans le hall du Tribunal, attendant l'intervention des parties à son micro. Pour occuper le temps, on rappelle et on rappelle et on rappelle l'histoire de ce prévenu, d'origine sub-saharienne, fiché S, qui a égorgé une jeune chrétienne, puis a bu son sang en s'écriant allahou akh bar.
En écoutant de telles nouvelles à longueur de journée, vous voulez que je pense quoi ? Plutôt quelque chose de mal, mais - comme je l'ai dit ci-dessus - le vrai, c'est plutôt que je ne pense rien. Et c'est fait pour ça : surtout, ne pas penser.
Quand je parle de "facho", je l'entends pas au sens mussolinien, avec le côté totalitaire. Je ne suis pas aussi sûr qu'Arendt de la pertinence de ce terme. J'ai préféré Orwell et son fameux 1984, d'où il ressort que le sommet de ce totalitarisme, ce n'est pas d'avoir une seule idée, mais d'en avoir deux. Il appelle ça "la double pensée" dans le bouquin. C'est-à-dire j'en arrive à dire, et surtout à penser "la guerre, c'est la paix", "le Parti, c'est la vérité", etc. Pour cela, il me faut deux idées. Elles s'excluent l'une l'autre et sont absolument contradictoires, mais je tiens les deux.
Dans le cas du fait divers, je n'ai pas besoin d'en avoir tant que cela, des idées. Je n'en ai même pas une seule, tellement la glaucité absolue, fumier sur lequel l'extrême-droite veut faire advenir ses funestes projets, me contraint au réflexe, au tripal, à me précipiter dans la rue en brandissant la pancarte "A mort !".
Il y a moins qu'une seule idée.