Cela nous fait au moins apercevoir ce que peut-être un média d'extrême-droite.
Une belle illustration vendredi dernier (ou était-ce samedi?) : un débat cnews sur le programme fiscal du Nouveau Front Populaire. Bon sujet, d'autant que le programme général de ce mouvement implique d'énormes dépenses, qui ne sont pas couvertes par des économies, mais des impôts nouveaux. On a envie de connaître le montant de l'ardoise.
Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre l'animatrice attaquer le sujet par une question aussi sotte que grenue.
La voici : le NFP veut créer 14 tranches d'impôts, savez-vous combien il y en a aujourd'hui ?
Question sotte car on connaît la réponse : tout le plateau (cinq invités) annonce qu'il l'ignore. Et l'animatrice ne le sait pas non plus. Quand on connaît cnews, on est assuré de cette réponse, c'était téléphoné. Et la conclusion qu'on en tire de même : les invités sont soit des imposteurs soit des charlots, les derniers enfin des tocards.
Ceci pour la sottise, mais ici c'est plutôt le grenu qui m'intéresse.
L'animatrice conclut : donc, aucun d'entre nous ne le sait (combien il y a de tranches ; je précise que je ne vais pas jouer les malins, je pensais que c'était 8, ce qui est faux, la réponse c'est 5, Praud l'a dit le lendemain).
Après cette conclusion, il y a un moment – court – de « blanc » chez les invités, ils ne la ramènent pas. Mais la fille reprend aussitôt en suggérant que cette méconnaissance est normale, puisqu'au fond, on s'en fout. Autrement dit, elle valide la conduite de ses intervenants : je peux venir sur un plateau de téléfacho pour jouer les experts alors qu'en fait je me contrefous du sujet traité, je n'ai même pas pris la peine de prendre les infos basiques (c'est quoi ces 14 tranches, y en a combien maintenant, qu'est-ce que ça change, etc.).
Par la suite, ces gugusses vont tenir des propos sur un ton péremptoire, autoritaire, ou professoral (pour l'un d'entre eux) martelant des affirmations sur un sujet dont ils ne connaissent pas le moindre mot, de leur propre aveu.
Ce que ces charlatans, ces enfumeurs ont moins envie d'avouer, c'est que les critiques sérieuses qu'on peut faire en l'espèce, on peut les appliquer au programme fiscal du Rassemblement National. D'où leur répugnance à en causer sérieux (ceci pour faire allusion au contenu politique, qui ne m'intéresse pas ici).
Mais qu'importe, on est au-dessus de cela, le principal c'est de dire du mal de la Gauche.
Il y a quand même un mépris souverain du spectateur, à qui on annonce officiellement que les intervenants ne savent rien de la question qu'ils traitent – ou plutôt ne traitent pas - , mais qu'on s'en tamponne puisque le spectateur s'en tape également.
Pour cnews, on voit bien ici ce qu'est la télé d'extrême-droite. Je récuse par avance l'objection comme quoi les militants d'extrême-gauche ne sont pas mieux, ce qui est parfaitement exact, mais ne touche pas au fond. La différence fondamentale, c'est que le media de gauche te fais croire que si tu l'écoutes et approuves, tu es intelligent. L'auditeur de France Cu ou Inter, ou Arte etc., croit détenir la vérité, et son adhésion (à la vérité) atteste, authentifie cette intelligence. Alors que le média d'extrême-droite te fait sentir que si tu le crois et adhères, c'est parce que tu es un imbécile. Le fait de ne pas penser ou de mal penser (voyez l'usage assez significatif de la notion de « bien pensance », par exemple) est tenu pour une vertu, un mérite particulier.