candidus
Je ne crois pas que ce soit si difficile.
Je vous donne deux axes d'abord, pour commencer en gros : l'aspect rationnel et l'aspect empirique historien.
Pour le premier, définissons grossièrement le "socialisme". Comme son nom l'indique, c'est une idéologie qui croit à l'importance déterminante de la société, de l'organisation sociale, dans la vie de l'homme. Les inégalités, par exemple, ne sont pas une donnée naturelle, un fait imposé par la nature, mais un produit de l'homme socialisé. Si cette inégalité est le fait, non de la nature, mais de la volonté et des actions de l'homme social, elle peut être corrigée par une volonté différente : ce que l'homme a fait, il peut aussi le défaire.
Dans la doctrine de Hitler, les inégalités ont un fondement biologique, c'est fondé sur la race, quelque chose que personne ne peut changer. Races qui sont elles-mêmes figées dans un statut de supériorité ou d'infériorité. Idées classiques de droite, auxquelles Hitler ajoute seulement que la supériorité raciale autorise même les meilleurs, non pas seulement à asservir, mais même à éliminer physiquement ceux qui valent moins.
Le socialisme, c'est pas ça.
Au plan empirique maintenant. Pour ce qui concerne la venue au pouvoir de Hitler, le réel est qu'il s'est appuyé sur des partis de droite, dans la phase politicienne. Ces partis se sont ralliés à lui par peur du bolchévisme. La hantise de la droite allemande était que les cocos viennent leur prendre tout leur pognon, et ils savaient qu'avec Hitler, il n'y avait pas de danger de ce côté-là. (Leur crainte n'était pas dépourvue de fondement : en 1918-1920, il y avait un danger bolchévik réel) Sitôt élu (par un putsch parlementaire hautement politicard et pas du tout un mouvement populaire et "social") il s'est empressé de persécuter les communistes, socialistes et même les socio-démocrates.
Parmi les marqueurs classiques du "socialisme", vous avez l'étatisme : on ne croit pas à l'initiative privée, on n'aime pas Bernard Arnaud, les entrepreneurs, tout ça. Est-ce que Hitler est un grand nationalisateur des entreprises, un bolchévik au plan économik ? Nenni, Hitler n'aime pas l'Etat. Sa référence, ce n'est pas l'Etat, au plan politique (c'est le Führerprinzip, qui est tout à fait autre chose : la volonté du Guide suprême. Il ne lutte en aucune manière avec la grande industrie allemande et il a été accueilli comme une bénédiction par le capitalisme allemand.
Ce point mériterait des explications plus détaillées, mais je vais prendre juste un fait particulièrement horrible : vous savez sans doute qu'il y avait à Auschwitz la partie Monowitz (à côté de Auschwitz proprement dit en premier, et Birkenau en deux). A Monowitz était installé I.G Farben, un colosse de l'industrie chimique. Le camp fournissait à ce géant une main d'oeuvre pas cher du tout, vous voyez ? Pas de syndicat, pas de grève, pas de réunions de dialogue social, pas de soviets, pas de négociations salariales puisque pas de paye, vous voyez ? Mais IG Farben n'était pas une entreprise nationalisée, c'était un groupe économique tout à fait libéral, associée à l'entreprise du Reich sur des projets précis, mais pas pilotée par l'Etat et encore moins par Hitler.