Hanoi silencieuse et déserte offrait le spectacle d'une ville morte où les animaux erraient en liberté dans les rues. On attendait la venue des premières troupes Vietminh tandis qu'à quatre kilomètres d'Hanoi, un officier Français accueillait le premier détachement Vietminh sur le pont des Rapides. (1954)

Les troupes du Vietminh prennent la relève à Hanoi. (1954)

Des foules agitant des drapeaux du Vietminh saluent l'arrivée des troupes communistes. La division 308 de Dien Bien Phu arrive en ville et est accueillie et saluée par la foule, certains hommes portent des fleurs.

La France a perdu ses colonies indochinoises pas seulement en raison de facteurs militaires, mais aussi politiques, diplomatiques, économiques et socio-culturels.

Il est certain que la chute de Dien bien Phu a marqué une perte de puissance française qui n'a pas échappé aux yeux des populations colonisées. Les Etats-Unis ont fourni un soutien important en matériel et logistique et financé une grande partie de l'effort de guerre contre la menace communiste. Cependant, ils n'ont pas engagé les forces militaires nécessaires pour aider les garnisons assiégées. Ce n'est pas un blâme mais une constatation. Ce qui est surtout à blâmer, c'est l'attitude ou l'opinion publique française qui a érodé le moral de notre corps expéditionnaire.

En ce qui concerne le facteur politique, il faut se rappeler qu'en 1945, Ho Chi Minh a comblé le vide du pouvoir en offrant aux Vietnamiens leur indépendance vis-à-vis de tout étranger. L'apparition des élites vietnamiennes éduquées marque cette transformation intellectuelle, comme condition préalable à la mobilisation de masse sous la révolution. N'oublions surtout pas que la gauche française a également beaucoup inspiré Ho Chi Minh, qui revendiquait l'autorité morale pour rallier les Vietnamiens.

Sur le plan diplomatique, on peut blâmer le gouvernement français de ne pas pleinement réaliser qu'à l'époque, la pacification était terminée et que la décolonisation avait commencé. Il faut se rappeler qu;en 1944, lors de la Conférence de Brazzaville, les inspirations nationalistes vietnamiennes avaient été rejetées. Egalement important est le fait que le président Roosevelt était contre le soutien au retour du colonialisme français en Asie. Les Américains se sont souvent opposés à la France, tout en faisant tout ce qui était en leur pouvoir pour protéger Ho Chi Minh et faire avancer la cause de ses communistes vietnamiens car ce sont eux qui ont formé le VietMinh. Il y avait même un bref flirt avec l'OSS américain qui d'ailleurs s'est vite détérioré.

Le facteur économique est tout aussi important car le résultat de l'expérience coloniale française en Indochine n'a pas été la création d'une société au bord d'un développement économique rapide. Ce fut un exemple classique d'une économie duale avec un petit secteur commercial à prédominance étrangère dans les villes entourées d'une masse de paysans sans formation et souvent miséreux dans les villages. Le mécontentement dans les terres agraires et dans les zones urbanisées, a très certainement fermenté des troubles qui ont défié l'autorité française et brutalement réprimés.

Et puis, le facteur socio-culturel n'est pas à négliger car Ho Chi Minh a su étendre la notion d'une nation vietnamienne une et indivisible parmi les populations. La France a apporté les bienfaits de la civilisation en Indochine mais elle a mené une mission civilisatrice imparfaite dans cette colonie lointaine. L'Empire français est resté très centralisé et dans la majorité des cas, la France a utilisé ses propres colons et agents pour contrôler l'économie. Ce qui eu pour effet sur les Vietnamiens, de se sentir marginalisés dans leur propre société traditionnelle. Ils se sont sentis comme des citoyens de seconde classe. Et comme il fallait s'y attendre, les nationalistes n'ont pas tardé à exploiter ce sentiment de grief de longue date. Ils sont devenus des étrangers dans leur propre pays étant à la fois patronnés et subjugués par une puisssance étrangère indésirable.

    chevalier-du-temple La France a largement sous-estimé et méprisé la réalité de l'intelligentsia tonkinoise dont le niveau de formation était largement au niveau de la France - et ne parlons pas, par décence, des niveaux comparés d'éducation.

      candidus Je dirais plutôt l'intelligentsia indochinoise que tonkinoise.

      Il ne faut pas oublier que l'intelligentsia indochinoise exprimait des velléités de révolte jusqu'à l'obtention de l'indépendance. Peut-être y avait-il une relation avec ce mépris dont vous parlez ?

      En ce qui concerne le niveau de formation, l'intelligentsia indochinoise a bénéficié du même training et de la même éducation que les Français en France métropolitaine. Les opportunités pour les populations indochinoises dans l'enseignement supérieur étaient équitables. C'était le désir de la France de créer une génération de fonctionnaires indigènes. Le développement de l'éducation supérieure en Indochine par la France, a apporté l'avantage de l'enseignement moderne, plutôt que l'enseignement dictatique et obsolète des écoles confucéennes. L'intelligentsia indochinoise a bénéficié d'un enseigneent de pointe, riche de méthodes pédagogiques et de réalisations des sciences.

      La France peut être fière d'avoir ouvert une perspective lumineuse pour le développement du peuple vietnamien. Durant la période coloniale, la France a fait des efforts considérables auprès des populations dans les domaines éducatifs et médicaux. Elle fut une grande formatrice de plusieurs intelligentsias vietnamiennes. Notre système d'éducation moderne a été crucial dans la formation de l'intelligentsia locale. Ces personnes sont devenues une génération d'enseignants et de chercheurs pour l'éducation vietnamienne.

        chevalier-du-temple Non, j'ai bien dit l'intelligentsia tonkinoise (Hanoï) et cela, séparément des actions françaises qui l'ont en quelque sorte snobée alors qu'elles auraient dû au contraire la valoriser et la démultiplier.

        Je pense que sur le fond, nos avis sont diamétralement opposés.

          candidus Très bien mais j'ai une vue d'esprit beaucoup plus large concernant cette question. C'est tout à fait normal que vous ayez un avis différent du mien, c'est votre droit absolu. Mais voyez-vous, je suis de ceux qui croient mordicus dans les bienfaits de la France civilisatrice. Je ne comprends pas pourquoi nous aurions à rougir, à nous justifier, à battre notre coulpe et à faire repentance pour notre passé colonial. Je ne dis pas que notre colonisation a été parfaite, loin de là car il est certain que des erreurs ont été commises. Cependant, il est important de remettre les pendules à l'heure et de dénoncer certaines contrevérités, mensonges et affabulations véhiculés principalement par les gauchistes et les médias.

          Certes. tout ne fut pas idyllique ou irréprochable dans notre conquête coloniale mais je pense qu'il faut arrêter de juger notre passé avec des mentalités d'occidentaux décadents du vingt et unième siècle. Rien ne prédestinait l'Indochine à devenir une colonie française. La France a été impliquée en Indochine dans le cadre de la protection des missionnaires catholiques qui se faisaient massacrer. Puis elle s'est progressivement créée une importante colonie à partir de 1887, qui est devenue la perle d son Empire. En arrivant dans cette région, la France mettait actuellement fin à mille an de domination chinoise.

          L'Indochine francaise était une colonie d'exploitation du fait de la richesse de ses terres. En échange de l'exploitation de ces ressources, la France s'est investie dans les équipements et les infrastructures. L'entreprise coloniale a permis aux populations indochinoises de se moderniser considérablement.

            chevalier-du-temple Nous avons aussi de nombreux points d'accord : je souscris à l'ensemble de votre dernier message.

            La "colonisation" ne peut pas être vue comme un phénomène identique sur toutes nos "colonies", terme dont le sens a été perdu de vue.
            Il n'y a jamais eu de colons français en Indochine. Probablement aurait-il mieux valu parler de protectorat ou alors créer un mot pour désigner la prise de pouvoir et d'intérêts.

              Napoléon III avait des rêves de conquête et de grandeur.

              A cette époque l'Annam comptait environ 600 mille chrétiens dont beaucoup de missionnaires catholiques qui étaient de véritables broussards qui partaient évangéliser les tribus primitives. Beaucoup de ces missionnaires étaient cruellement persécutés. Napoléon III fut poussé par sa volonté de satisfaire son électorat catholique. Mais actuellement, ne nous faisons aucune illusion, l'enjeu véritable était de ne pas laisser la perfide Albion, seule maîtresse du commerce avec l'Extrême-Orient. La France espérait obtenir une base voire un comptoir en Cochinchine. Elle commença donc à explorer la vallée du Mékong et cette implantation se fit par la seule supériorité de nos forces armées. Notre conquête du Tonkin allait permettre à notre oeuvre coloniale de réaliser de grandes et belles choses, comme expliqué précédemment.

                chevalier-du-temple Mais actuellement, ne nous faisons aucune illusion, l'enjeu véritable était de ne pas laisser la perfide Albion, seule maîtresse du commerce etc...

                En ce qui concerne la dynamique de colonisation, à cheval sur les XIX et XXème siècle, le déplorable récit qu'en fait le pouvoir woke actuel fait l'impasse sur le ressort essentiel qui était la compétition entre nations européennes. Il ne s'agissait pas d'établir des colonies mais d'assurer des routes commerciales et d'engranger des latitudes et longitudes. Dominer des indigènes n'était vraiment pas la problématique.

                  candidus Le pouvoir "woke" est composé de brutes et de destructeurs.

                  En ce temps-là la compétition commerciale était féroce entre les grandes nations de ce monde. La France qui était en compétition avec l'Angleterre, voulait une porte dérobée vers la Chine. Le commerce sur la côte chinoise était rentable et les Français pensaient que le commerce pourrait être plus rentable encore s'ils pouvaient contourner les marchands côtiers et pénétrer directement dans les pays voisins. Dans ces régions sous-développées, les grands fleuves faisaient office d'autoroutes. Le Mékong en particulier ainsi que le fleuve Rouge atteignaient la mer au Vietnam. Donc, la France s'est emparée du cours inférieur du Mekong qui, actuellement, n'était pas navigable jusqu'en Chine. Plus tard, la France s'est emparée du fleuve Rouge qui s'est avéré être cette fameuse porte dérobée de la province du Yunnan.

                  Vous avez raison de dire que "dominer des indigènes n'était pas la problèmatique". Au début de la colonisation qui était faite de rivalités entre nations, il n'était question que de commerce. Notre colonisation de l'Indochine était principalement motivée pr des intérêts économiques et des considérations stratégiques. Les Français ont commencé leur colonisation de l'Indochine au 19ème siècle. Ce pays était riche en ressources naturelles, très recherchées pour le commerce et l'exploitation économique. En ce qui concerne la considération stratégique, la situation de l'Indochine en Asie du Sud-Est en faisait un atout précieux pour la France, en termes de sécurisation des routes commerciales.

                  Lorsque l'on pense à l'Indochine, on ne peut pas parler de colonisation de peuplement car les Français y étaient peu nombreux, quelques dizaines de milliers tout au plus. L'Indochine était plutôt une colonisation d'exploitation économique et de plantation.

                  Notre arrivée en Indochine mettra donc fin à mille an de domination chinoise, et la Chine qui nous percevra comme étant des agresseurs, ne pensera qu'à se venger de nous. L'opportunité se présentera grâce à la montée du nationalisme vietnamien. En effet, elle va enfin pouvoir se venger de la France en nourrissant ce nationalisme au début du 20ème siècle. Bénéficiant du soutien dont il avait besoin, Ho Chi Minh diffusera ses idées communistes dès 1920 parmi les paysans vietnamiens. La Chine nous mènera une guerre par l'intermédiaire du Viet Minh communiste.

                  En Indochine, notre Corps Expéditionnaire a mené une guerre héroïque mais tout se terminera par des combats à un contre dix. Si seulement le général de Lattre avait pu vivre plus longtemps car sa tactique militaire a fonctionné à merveille. Elle consistait à combiner des positions défensives statiques et des troupes en mouvement rapide. Le général de Lattre a causé des pertes considérables au Viet Minh. Si seulement l'opinion publique n'avait pas été contre la guerre et avait supporté nos soldats qui, eux, ont tout donné pour la France.

                  Avant de conclure mon traitement de la guerre d'Indochine, j'aimerais présenter un film qui est le premier film français sur la guerre d'Indochine. (1956) Il a été écrit et réalisé par Claude Bernard- Aubert Ogrel qui était correspondant de guerre en Indochine de 1949 à 1954.

                  " Pendant la guerre d'Indochine le lieutenant Perrin qui est à la tête d'un groupe de soldats français dans un poste isolé, s'attend à subir un assaut du VietMinh. Pendant un certain temps, la région jouit d'une tranquillité presque irréelle mais cette paix va bientôt prendre fin car les Viets convergent vers la garnison dans l'intention de la prendre d'assaut. Perrin et ses hommes ne peuvent opposer qu'une résistance symbolique, dépassés en nombre par les attaquants. Le sombre résultat n'est que trop certain. "

                  A la fin de la Deuxiême Guerre mondiale, les nationalistes algériens revendiquèrent l'indépendance de l'Algérie. Le 8 mai 1945 qui était supposé être un jour de joie, tourna à la tragédie. Des milliers d'algériens manifestèrent dans plusieurs villes, notamment à Sétif, malheureusement, la manifestation tourna à l'émeute et fit 102 morts parmi les Français. La répression militaire française fut terrible, avec des milliers de victimes algériennes. Les nationalistes algériens préparèrent la lutte armée pour l'indépendance.

                  Rappelons que Jules César n'était pas catholique pourtant il fut un grand dirigeant.

                  Depuis plusieurs années, la domination française de l'Algérie est contestée par les nationalistes algériens, et les troubles se multiplient sur pratiquement tout le territoire. La communauté musulmane travaillée par la propagande nationaliste, est de plus en plus hostile à la France.

                  Le 1 novembre 1954, marque le début de la guerre d'Algérie. Une vague d'attentats meurtriers sur l'ensemble du territoire algérien, est déclenchée par les nationalistes algériens au nom de l'indépendance. Le FLN ou Front de Libération National souhaite émanciper le pays de la présence française. Ces graves évènements inaugurent une nouvelle guerre de presque huit ans. Cette guerre sera une guerre entre l'armée française et les nationalistes mais aussi une guerre entre algériens. Une guerre qui non seulement va diviser notre pays mais aussi le terroriser pendant des années.

                  L'année 1955 sera une année de massacres perpétrés par le FLN suivi par des représailles en provenance de l'armée française et des pieds-noirs armés. Le FLN s'attaque principalement aux civils européens et aux musulmans loyalistes. Les terroristes voulaient semer la terreur dans les populations fidèles à la France.

                  Le 20 août 1955 sera particulièrement terrible. Les moudjahidins qui encadraient plusieurs milliers de combattants, se lancent à l'assaut d'une quarantaine de villes et de villages et massacrent les français copieusement. Notre armée qui a reçu l'ordre d'abattre sur le champ tout rebel trouvé les armes à la main, va employer des méthodes radicales et impitoyables pour mater la rebellion.

                  En 1955 après tant de massacres, on prône une justice expéditive envers les rebelles : tous fellaghas pris les armes à la main seront châtiés à l'instant. A partir de l'été 1955, les embuscades, les attentats meurtriers et les attaques sur les gendarmeries et les postes de police sont en augmentation. La situation se dégrade progressivement et la population est terrorisée.

                  A cette époque les services de renseignements de notre armée sont mal informés et peu efficace. Le commandement commet l'erreur de sous-estimer les rebelles et leurs intentions. On croit faire face à une banale insurrection alors qu'il s'agit d'une véritable guerre de libération.

                  Au début des hostilités l'ennemi était mobile et discret, pas du tout enclin à affronter notre armée en rase campagne. Mais avec le temps, les bandes ennemies sont de mieux en mieux structurées et dotées d'un équipement et d'un armement modernes. Malgré les opérations militaires destinées à les déloger, les rebelles tiennent les Aurès.

                  Le 24 octobre 1955, le lieutenant-colonel Marcel Bigeard arrive à Alger. Les violences sont de plus en plus fréquentes et les massacres plus nombreux. Il prend le commandement du 3ème RPC (Régiment de Parachutistes Coloniaux) et comme en Indochine, il va adopter les méthodes de l'ennemi qu'il traquera sans cesse.