"Aime et fais ce que tu veux". Cet adage fait partie des citations les plus connues de saint Augustin (354-430, évêque de la ville d’Hippone en Algérie pendant plus de 30 ans), mais aussi souvent les moins bien comprises.
A première vue, il pourrait s’agir d’une invitation à profiter de la vie, une version chrétienne du carpe diem. Tout est permis, du moment que l’on aime ! Il suffit de prononcer cette phrase devant un adolescent et de voir le sourire qui naît sur sa figure, tout en se demandant pourquoi ses parents ne lui ont jamais dit cela. A première vue, il pourrait s’agir d’une invitation à profiter de la vie, une version chrétienne du carpe diem. Tout est permis, du moment que l’on aime ! Il suffit de prononcer cette phrase devant un adolescent et de voir le sourire qui naît sur sa figure, tout en se demandant pourquoi ses parents ne lui ont jamais dit cela…En réalité, cette phrase de saint Augustin a un sens bien différent – qui peut justifier que le même adolescent soit bien puni par ses parents ! – qui nous emmène sur les chemins de la charité et de la correction fraternelle ..........
Cette maxime n’est pas un slogan qui revient régulièrement chez saint Augustin, même si plusieurs citations lui sont apparentées. Il s’agit d’un extrait unique d’une homélie prononcée pendant le temps pascal 407, plus précisément le samedi de l’Octave de Pâques. Augustin en arrive à commenter 1 Jean 4,8-9 : "En ceci s’est manifesté l’amour de Dieu pour nous : il a envoyé son Fils unique en ce monde afin que nous vivions par lui". Le Père a livré son Fils, Judas l’a aussi livré, constate le prédicateur. Quelle est la différence entre les deux ? L’intention : Dieu a livré le Christ par amour pour les hommes, Judas l’a fait par amour de l’argent.
Augustin en profite pour insister sur l’importance de l’intention pour juger de la valeur d’une action. Il arrive au père de famille de frapper son enfant – méthode éducative de l’époque ! – mais c’est pour son bien, tout comme il arrive au marchand d’esclave de cajoler celui qu’il s’apprête à vendre. Augustin conclut ce développement : "Ainsi voilà une fois pour toutes le court précepte qu’on te dicte : « Aime et fais ce que tu veux ». Si tu te tais, tu te tais par amour ; si tu cries, tu cries par amour ; si tu corriges, tu corriges par amour ; si tu épargnes, tu épargnes par amour. Qu’au-dedans se trouve la racine de la charité. De cette racine rien ne peut sortir que de bon."
Pour Augustin, tout procède donc de l’intention qui va donner naissance à une action. Si notre désir est l’amour de Dieu ou de notre prochain, l’action sera bonne. Notons néanmoins qu’Augustin n’oublie pas la matérialité ou la gravité d’un acte, il ne faut pas non plus faire n’importe quoi par amour !
Nous pouvons appliquer ce que nous dit Augustin au cas de la correction fraternelle, objet de notre phrase. Laisser, par facilité ou par manque de courage, notre prochain ou notre frère persévérer dans un mauvais comportement est un manque de charité envers lui : si on ne le reprend pas, il ne pourra jamais se corriger.............
P. Nicolas Potteau, assomptionniste, le 30/09/2016 https://www.la-croix.com/Abonnes/Theologie/Vivre-en-chretien/Aime-et-fais-ce-que-tu-veux