hubert
Le singe, le boeuf et le gland
Par un froid jour d'automne, l'on vit belle compagnie.
Celle d'un singe, poilu et grimaçant, sans esprit.
D'un bœuf tirant, suant, pédant, éructant tant.
Puis d'un gland, sans chêne ni entrave, et sifflotant.
"Hola, ami gland", lui dit le primate, "oyez !
De qui donc vous moquez-vous, sur qui sifflez-vous ?"
Le boeuf, tournant une face sans étincelle, pouffa.
Le gland, lui, nullement impressionné, persiffla.
"Allons donc compaings, qu'est-ce que cette irritation ?
L'un de vous serait-il tant fâché, tant peiné ?
Aurais-je en mes saillies brisé un beau reflet ?
Celui dont vous vous illusionnez, sans raison ?"
Le boeuf gratte du sabot, souffle, vaporise, vexé.
Le singe fuit, frêle, il craint la ramonée.
Le boeuf, ruisselant, en nage, voue au gland sa rage.
Il trépigne, bondit, remue sa masse. Au carnage !
Le gland s'efface, svelte et agile, sent le vent.
Le boeuf fonce, sans bien réfléchir, et heurte un chêne.
L’œil éteint, iI titube et s’affale sans arène.
"Ah ça !" lui dit le gland, "j'en ai vu si souvent
De ces narcisses tant assurés et sûrs d'eux-mêmes.
Se jeter dans la mêlée sans être trop armés
A vouloir dominer et foncer tête baissée.
Pour bêtement, ployer face au fruit d'un chêne."