Une des marottes des néolibéraux/libertariens consiste à asséner que la France est le pays qui dépense le plus en matière de protection sociale pour un résultat médiocre. L’expression qu’ils adorent employer ironiquement pour désigner notre système de protection sociale parle d’elle-même : « le modèle social que le monde entier nous envie ».

S’il est vrai, lorsqu’on regarde le ratio dépenses sociales (publiques)/PIB, que la France se classe première et mis à part le fait que cet indicateur n’est peut-être pas le plus pertinent comme expliqué ici, une analyse plus détaillée et moins superficielle des données dessine une tout autre réalité.

La France en 8ème position

Pour comparer les pays, plutôt que de considérer le ratio dépenses/PIB, j’ai choisi de regarder les dépenses sociales par habitant, car après tout pour juger de la générosité d’un système ce qui compte c’est de savoir combien chaque individu reçoit (en moyenne). J’ai utilisé la base de données de l’OCDE disponible ici ou (fichier excel des données téléchargées). Pour que les comparaisons soient valables les dépenses sont mesurées en Parité de Pouvoir d’Achat (PPA).

Le premier graphique représente les dépenses sociales publiques par habitant d’une cohorte de pays de l’OCDE.

La France se classe non pas en première position mais en 6ème.

Toutefois, étant donné la disparité des modèles de protection sociale, il convient d’ajouter aux dépenses publiques les dépenses sociales privées obligatoires afin de supprimer certains biais. Cela donne le graphique suivant :

La France se place alors en 8ème position en matière de dépenses sociales. Quel que soit l’indicateur choisi la première partie du leitmotiv néolibéral est ainsi infirmée.

Une protection sociale efficace

On pourrait se dire : « certes, la France n’est pas le pays qui dépense le plus mais ce qu’elle dépense elle le dépense mal pour des résultats médiocres ». Qu’en est-il ? Pour répondre j’ai utilisé les données de l’OCDE relatives au taux de pauvreté et calculé la différence entre le taux de pauvreté avant redistribution et le taux de pauvreté après. Puisque l’OCDE utilise deux indicateurs du taux de pauvreté (le premier dont le seuil de pauvreté est fixé à 60% du revenu médian, le second dont le seuil est fixé à 50% du revenu médian) j’ai construit deux graphiques.

Que constate-t-on ? La France est le pays qui réduit le plus le taux de pauvreté grâce à son système de redistribution et de protection sociale ! Difficile de prétendre alors que les dépenses sociales (publiques et privées obligatoires) sont mal utilisées.

Pour finir deux graphiques qui « mesurent » l’efficacité du système de protection sociale. Il s’agit du ratio dépenses sociales/écart (calculé dans les graphiques précédents). On a ainsi une idée du montant à dépenser pour faire baisser le taux de pauvreté d’un point. Plus la dépense est faible, plus le système est efficace.

Même si la France ne se place pas en tête constatons qu’elle est beaucoup plus performante que de nombreux pays.

Voilà qui démonte un poncif trop souvent entendu et lu.

    • [supprimé]

    • Modifié

    La France dépense-t-elle trop pour la protection sociale ?

    Une Lapalissade:
    Manifestement non ... en tout cas elle dépense mal, pas là où il faudrait ... vue la récurrence des manifestations sociales et le climat insurrectionnel en jaune qu'il y a France comme nulle part ailleurs sur la planète.

      [supprimé] vue la récurrence des manifestations sociales et le climat insurrectionnel en jaune qu'il y a France

      Quand tu as faim, tu cherches à manger, tu ne glandes pas dans des défilés à scander des slogans stupides!

        • [supprimé]

        • Modifié

        sangtriste Quand tu as faim, tu cherches à manger, tu ne glandes pas dans des défilés à scander des slogans stupides!

        L'un n'empêche pas l'autre, le sport c'est un coupe faim (sauf chez les sumotoris), une addiction comme une autre .

        Bonjour,

        Ce sont des statistiques que l'on peut retourner à volonté. Il suffit de redéfinir ce que l'on englobe dans "dépenses sociales".

        Cordialement.

          [supprimé] Exact, si on intègre les fonctionnaires qui ne servent à rien et démontrent au quotidien qu'ils sont inaptes au travail, cela peut vite faire monter le niveau d'aide sociale!

          SagesseLiberale
          Il me semble qu'une mesure intéressante de l'efficacité des aides sociales serait de connaitre le nombre de personnes qui sortent, par exemple chaque année, de l'assistanat.
          Le problème n'est pas tant le montant des aides diverses ni le taux de prélèvement -tout ça compte évidemment- mais est-ce que ces aides permettent à la personne de se rétablir et de quitter sa situation d'assisté, ou bien est ce que ces aides enfoncent au contraire les personnes dans l'assistanat sans grand espoir d'en sortir.
          Parce que dans le 2ème cas, on atteint un jour ou l'autre une limite infranchissable: le financement des dépenses et l'acceptabilité des prélèvements.

            @SagesseLiberale Excellent article, cela nous change des articles haineux habituels.
            Je remarque l'absence des USA dans vos tableaux, et aussi d'Etats-Cité comme Singapour ou la Hong Kong SAR. Supposez-vous qu'ils n'ont aucun système social ?
            Je suis toujours perplexe quant aux calculs de ce type. Le problème de la France n'est pas vraiment de savoir si elle dépense efficacement en relatif par rapport aux autres pays de l'OCDE, mais bien qu'elle dépense beaucoup et trop dans l'absolu avec un déficit structurel de 70-90 milliards d'€ par an et qu'elle creuse une dette abyssale. A partir de là, l'analyse de ce qui est dépensé, où, pour faire quoi et avec quelle efficacité devient pertinente, et elle permet de dégager des pistes de réduction de dépenses publiques.

            • [supprimé]

            • Modifié

            Bonjour,

            Ce qu'il faut comprendre dans l'invention du taux de pauvreté est qu'il s'agit d'un taux de pauvreté mathématique. Dans la pauvreté réelle il y a des passagers clandestins aux deux extrémités ( les moins pauvres et les plus pauvres ).

            Le titre porte sur la protection sociale et les tableaux eux sont ceux des dépenses sociales. Protection, dépenses, politiques, actions bref du moment que c'est social. c'est béni.

            Cordialement.

              Bonjour, voici la définition de l'OCDE dont je tire les données.

              Les dépenses sociales couvrent les prestations en espèces, les biens et services fournis directement et les allègements fiscaux à visées sociales. Les prestations peuvent être ciblées sur les ménages à faible revenu, les personnes âgées, les handicapés, les personnes malades, les chômeurs ou les jeunes.

              Cdlmt

              Malouin

              Bonjour,

              vous avez raison, mais c'est pour cela que j'ai comparé le taux de pauvreté avant et après redistribution.

              Cdlmt

              Bonjour, merci de votre réponse.

              Pour les Etats-Unis, il me semble qu'ils y sont dans les graphes. Pour HK et Singapour c'est exact. Ils ne figurent pas dans les pays de l'OCDE c'est pourquoi je les ai oublié.

              Sur les calculs (quels qu'ils soient) vous avez raison, il ne faut pas en faire un absolu, ce sont des outils qui ont leur limite

              Cdlmt

              [supprimé]

              Bonjour, il est vrai qu'il est toujours difficile de donne une bonne définition de pauvreté. L'indicateur que l'OCDE utilise et que je reprends est loin d'être parfait. Il en existe d'autres d'ailleurs. Ca mériterait une amélioration

              7 jours plus tard

              SagesseLiberale Il semble évident qu'un habitant du Luxembourg qui gagnerait 1200 euros par mois sera considéré comme pauvre puisque le niveau de vie moyen y est beaucoup plus élevé qu'en France donc les aides sociales devraient être proportionnellement plus du double de celle octroyées chez nous.
              Le taux de pauvreté à 60% en France est établi à 1041 euros par mois mais encore une fois ce chiffre n'est pas vraiment révélateur et dépend de la situation géographique, familiale et personnelle car celui qui gagne cette somme en travaillant aura des charges supérieures (frais d'essence, restauration, pressing) à celui qui vit d'aides sociales.

              3 mois plus tard

              Idiotie trop souvent entendue : « les assistés sont ceux qui touchent le RSA ».

              Pour notre droite et notre extrême-droite, ceux qui touchent le RSA sont des profiteurs, des parasites, des fainéants qui ne veulent pas travailler et vivent aux crochets des autres. Est-ce la réalité ?

              • En 2016, plus du quart des Contrats Uniques d'Insertion (CUI) était conclu avec des personnes touchant le RSA-socle. Et oui, être au RSA n'est pas synonyme de ne pas travailler n'en déplaise à certains.

              • En 2013 (je n'ai pas d'enquête plus récente) la Caf a étudié les profils des bénéficiaires du RSA, plus du tiers de ceux-ci étaient des chômeurs en fin de droits, donc des gens qui ont travaillé.

              Difficile alors de les taxer de fainéants !

              Autre pseudo-argument avancé : « il y a en France 350 000, 400 000, 450 000 emplois non pourvus ! Cela prouve que si on veut trouver du travail, on en trouve ! »

              Ben non ! Ceux qui disent ça, vous prouvez que vous ne connaissez rien à ce dont vous parlez. Vous confondez deux choses : les emplois vacants et les offres non pourvues.

              Explications :

              Les emplois vacants représentent à un instant t les offres d'emploi mises sur le marché. Une partie de ces offres d'emploi sera pourvue, soit au moment t, soit à un moment ultérieur t+dt. En fait, plus une économie est dynamique, plus le taux d'emplois vacants est important, puisque cela signifie que cette économie crée des emplois ! Tout le contraire de ce que racontent nos idiots de droite, d'extrême-droite et nos pseudos socialistes. Par exemple, le taux d'emplois vacants au deuxième trimestre 2021en France était de 1.9% alors qu'en Allemagne il était de 2.9%, aux Pays-Bas 3.8%, en Autriche il était de 3.4%, au Danemark il était de 3.1%, des pays qui ont un faible taux de chômage. CQFD

              Bon, mais alors, qu'en est-il des offres qui ne prennent pas preneur ? On appelle cela les offres non pourvues. En 2018, elles étaient environ de 157 000.

              Faisons les calculs : nous avons eu en 2018, 1,9 millions d'allocataires du RSA socle. Il y avait 157 000 offres non pourvues. Cela signifie que même si on oblige les allocataires du RSA à les pourvoir (en supposant qu'ils aient la formation pour), il reste tout de même plus de 90 % des allocataires du RSA qui n'auront pas de travail faute d'emplois créés !

              Voilà une nouvelle INFOX anti-pauvres démontées !

                SagesseLiberale
                Quelques remarques allant dans le même sens.

                • Un CDD très bref; souvent à 50 km du domicile, et sous payé, ne trouvera pas preneur, et c'est normal.
                • Nombre de métiers demandent une compétence: Cuisinier, électricien, plombier.
                • D'autres métiers demandent de la force physique et de l'endurance, comme livreur de caisses de bières, ou maçon. Passé un certain âge, ça ne le fait plus.
                • Bref, quand l'offre est intéressante, elle est vite pourvue. Quant au RSA, ça couvre le loyer, mais pas plus. Soit on mange, soit on dort dans un lit.

                Merci pour ces remarques que j'approuve sans réserves

                • [supprimé]

                SagesseLiberale les assistés sont ceux qui touchent le RSA

                Le RSA est un revenu d'assistance. Les bénéficiaires sont donc des assistés.

                Il faut arrêter de culpabiliser les personnes charitables. Genre: "Ne donne rien à ce mendiant, ça va l'encourager à glander."
                Ca me fait penser à ceux qui voudraient embastiller ceux qui aident les migrants. Pas très élégant, si vous voulez mon avis. Bout... de chrétiens qui préfèrent l'antéchrist Zemmour à la gentille Bépierre. Ceci dit, le béret...

                Faire un travail de forçat pour toucher un smic, c'est sûr que ce n'est pas motivant. Bon, certains profitent du système comme partout mais la majorité cumulent les petits boulots pour s'en sortir.