La période ressemble étrangement à celle du génocide de 1915 ou de l’année 1917 lorsque les troupes russes victorieuses sur le front de l’est de la Turquie autour d’Erzeroum, l’ont abandonné à l’appel de la Grande Révolution bolchévique, laissant les Arméniens démunis face à l’armée turque.
Depuis le 27 septembre 2020 et de la vaste offensive turco-azérie sur l’Artsakh puis sur l’Arménie, l’histoire du peuple arménien semble se répéter en drames, massacres et génocides.
Face à une Russie embourbée dans la guerre en Ukraine, faisant face non pas aux Ukrainiens mais l’ensemble des membres de l’OTAN, une Russie qui semble délaisser d’autres fronts dont celui du Sud-Caucase, le risque d’un second génocide est grand avec une Arménie de 3 millions d’habitants, faisant face au monde turco-azéri et ses 90 millions de citoyens bercés dans une culture politique anti-arménienne. Un monde pantouranien qui désire rayer de la carte l’Arménie et le peuple arménien. Renouant ainsi à la première tentative inaboutie de 1915 et désirant mettre un terme final au dossier arménien.
Cette période d’un monde nouveau que connait la planète ressemble étrangement à celle du début du 20e siècle qui vit la disparition de la grande partie du peuple arménien ainsi que d’autres drames au sein des peuples de l’Europe.
De Jean Jaurès à Clemenceau en passant par Anatole France ou Pierre Quillard, les amis des nobles causes avaient dénoncé du haut des tribunes de l’Assemblée nationale ou dans la presse, le massacre des Arméniens par les Turcs.
Ils avaient évoqué et dénoncé le « Crime de lèse-majesté » nom précurseur de « Crime contre l’Humanité » et plus tard de « Génocide » pour désigner le sort des Arméniens en Arménie historique, à l’est de la Turquie. L’émotion était alors intense auprès des citoyens et politiques Français. Mais à part les deux bateaux français qui contre l’avis des autorités militaires avaient sauvé d’une mort certaine près de 5 000 Arméniens à Musa Dagh, sur les rives orientales de la Méditerranée, l’action de la France s’était résumée en déclarations et communiqués. Et restée au stade de l’émotion. Rien de plus ! Une inaction qui avait laissé libre-cours au gouvernement Jeune-Turc de continuer son plan d’extermination des Arméniens.
Aujourd’hui, plus d’un siècle après le génocide, les prémices de nouveaux dangers planent encore au-dessus de la tête des Arméniens du Sud-Caucase, entre l’Arménie et l’Artsakh.
Alors que le monde d’après-Covid et de la guerre de la Russie en Ukraine semble avoir abordé une nouvelle ère d’incertitudes et de changements, la période porte des risques immenses pour de nombreux peuples, dont le peuple Arménien.
La Turquie pourrait profiter avec son allié Azéri de cette occasion rêvée pour régler définitivement à sa façon, « à la turque » c’est-à-dire par l’épée ou les bombes, la question arménienne qui traîne depuis le milieu du 19e siècle…
Et la France, cette amie déclarée de l’Arménie où est-elle ? Que fait-elle face à l’appel de l’Arménie qui cherche une aide auprès de ses amis ? Saluons tout d’abord le rôle de la France qui préside le Conseil de Sécurité de l’ONU et qui l’a convoqué en séance spéciale suite à l’agression de l’Arménie par l’Azerbaïdjan.
Mais une France qui a appelé « le retrait sur leur ligne de départ des forces des parties engagées », mettant ainsi l’Azerbaïdjan agresseur et l’Arménie agressée au même niveau…
Une France qui appelle comme l’Europe, les Etats-Unis ou à Russie à favoriser les négociations plutôt que la voie militaire pour régler le conflit arméno-azéri. Paris ne prenant aucunement fait et cause pour l’Arménie, afin de garder sa « neutralité » au sein de l’OSCE qu’elle co-préside. Aucune capitale d’ailleurs n’a ouvertement condamné l’agression manifeste de l’Azerbaïdjan et l’occupation du territoire souverain de l’Arménie lors de l’attaque massive du 13 septembre.
Dans ces conditions, qu’attendre de ces condamnations à demi-mots ou de ces manques d’engagements réels pour soutenir l’Arménie ? Qu’attendre de la France, pays ami, où les 700 000 Arméniens ne sont pas étrangers à cette amitié ? Rien ou presque. Car face aux armes qui parlent et la puissance militaire turco-azérie, l’Arménie subit et va subir encore si les armes manquent toujours à l’appel.
La France, amie de l’Arménie -mais également de la Turquie, comme nous l’avons vu lors des rencontres Macron-Erdogan et les embrassades des premières dames- cette France diplomatique n’a aucun poids militaire pour venir en aide aux Arméniens, alors que cette option armée est celle que privilégie Bakou armée et encouragée par Ankara.
Dans ses conditions, délaissée à son sort par ses amis, dont la France, l’Arménie peut bien mourir, en arrachant aux mieux quelques larmes à Paris, Washington ou Bruxelles.
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