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C'était mon premier Kubrick.
J'avais 14 ans. J'avais envoyé un copain à la vidéothèque pour le louer: j'étais trop jeune pour avoir le droit de le voir, et sa réputation m'avait aiguillonnée. Ce film, c'était pire que ma première clope!
Cette scène précisément, la toute première, m'a scotchée. J'ai été happée dans l'atmosphère complètement décalée et j'ai ressenti physiquement le malaise.
Avant même d'entrer dans le korova milkbar: les couleurs criardes me bouffaient la rétine et la musique (surtout la grosse caisse) me secouait le ventre. Alex deLage me fixait à travers l'écran. Le gros plan rapproché laisse tout le temps de comprendre qu'il est complètement barré. Ensuite, en travelling arrière, je le découvre avec ses potes avachis dans un bouge à boire du lait. Puis en plan large, je suis heurtée par le mobilier: des corps nus de femmes, coiffées de perruques dingues...
C'était très dérangeant: je saisissais tous les interdits. Ça m'a immédiatement décoiffée.