Principales caractéristiques pharmacologiques
Les principales caractéristiques de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine sont :
– une absorption orale satisfaisante et une bonne biodisponibilité ;
– leur demi-vie d’élimination longue (en moyenne 40 à 60 jours, avec de larges variations interindividuelles) ;
– un volume de distribution élevé et une rétention tissulaire importante ;
– une forte affinité pour la mélanine (dont découlent certaines propriétés dermatologiques et la toxicité rétinienne) ;
– leur capacité à franchir la barrière placentaire.
Mécanismes d’action
Les antipaludéens de synthèse sont des bases faibles qui interfèrent avec les fonctions phagocytaires par le biais d’une élévation du pH intracellulaire. Cela entraîne une altération de la présentation sélective des auto- antigènes, de faible affinité, tout en respectant celle des antigènes exogènes, de plus forte affinité.
La chloroquine et l’hydroxychloroquine bloquent les réponses lymphocytaires T à la stimulation induite par les mitogènes et inhibent la production de certaines cytokines, d’interféron α et de facteur de nécrose tumorale (TNFα).
Ces effets bloquants passent par une inhibition de l’activation du récepteur toll-like, impliqué dans l’immunité innée et dans les pathologies auto-immunes, notamment le lupus, par le biais d’une liaison aux acides nucléiques.
Autres effets et actions
La chloroquine et l’hydroxychloroquine abaissent la clairance de l’insuline et augmentent l’insulinémie, d’où un risque hypoglycémique (en association aux antidiabétiques) et un effet favorable sur le contrôle du diabète. Elles améliorent le profil lipidique, possiblement par le biais d’une diminution de la synthèse hépatique de cholestérol. Elles diminuent l’agrégation plaquettaire. Du fait de ces trois propriétés, l’hydroxychloroquine améliore le profil de risque vasculaire dans le lupus.
La chloroquine et l’hydroxychloroquine pourraient avoir des propriétés antitumorales et anti-infectieuses.
Quelles indications ?
Lupus
L’hydroxychloroquine est un traitement majeur du lupus systémique
Son efficacité préventive vis-à-vis des poussées de lupus est formellement prouvée depuis 1991. Dans l’étude du Canadian Hydroxychloroquine Study Group, les patients assignés « arrêt » avaient, à 6 mois, un taux de rechute 2,5 fois plus élevé et 6 fois plus de risque d’exacerbation grave que les patients assignés « poursuite ».
L’hydroxychloroquine améliore le pronostic de la néphropathie lupique, en association aux immunosuppresseurs. Elle retarde la survenue d’un lupus classique chez les patients dont le tableau est suspect (< 4 critères du Collège américain de rhumatologie) ; elle réduit de manière significative la mortalité.
Elle est indiquée dans les grossesses lupiques, car elle protège la mère des poussées lupiques induites par la grossesse, elle n’a pas de toxicité fœtale démontrée, notamment oculaire, et elle semble réduire le risque de lupus cardiaque néonatal chez les patientes ayant déjà eu un enfant né avec cette atteinte. Enfin, elle passe peu dans le lait maternel, d’où une exposition du bébé très infratoxique en cas d’allaitement.
L’hydroxychloroquine est le traitement de base du lupus cutané subaigu ou chronique
Si l’efficacité de Plaquenil n’est pas universelle, il existe une forte association entre le caractère « réfractaire » des lésions cutanées et un taux sanguin d’hydroxychloroquine très infrathérapeutique, traduisant souvent une mauvaise observance thérapeutique.
Autres indications
L’hydroxychloroquine a été utilisée avec un succès variable dans diverses affections auto-immunes, inflammatoires et infectieuses (tableau 1).
Dans la polyarthrite rhumatoïde, les antipaludéens de synthèse ne sont plus guère utilisés. Cependant, en recherche, on observe un regain d’intérêt pour l’hydroxychloroquine. En effet, des revues récentes lui attribuent une certaine efficacité clinique et structurale sur les atteintes articulaires et surtout un effet favorable sur le profil métabolique de ces patients, dont le risque vasculaire est élevé, ce qui suggère d’associer l’hydroxychloroquine aux traitements de fond habituels.
Dans le syndrome des antiphospholipides, l’hydroxychloroquine diminue le risque de thrombose dans ses formes non obstétricales associées au lupus et dans des modèles animaux de ce syndrome. Bien que plusieurs études rétrospectives aient montré l’intérêt d’associer l’hydroxychloroquine à pleine dose à l’aspirine et aux anticoagulants chez les patientes à haut risque obstétrical (antécédent thrombotique maternel ou de pertes fœtales sous traitement conventionnel, complications obstétricales sévères), les preuves formelles de son efficacité dans le syndrome des antiphospholipides obstétrical restent à venir.
Dans le syndrome de Gougerot- Sjögren, bien qu’une étude prospective ait montré l’absence d’efficacité de l’hydroxychloroquine sur la sécheresse buccale et salivaire, la douleur et la fatigue, elle est souvent prescrite dans le but d’améliorer le contrôle des symptômes articulaires.
Dans la sarcoïdose, l’hydroxychloroquine est habituellement efficace dans les formes cutanées et peut servir d’alternative ou d’épargne cortisonique dans les formes chroniques sans atteinte viscérale grave.
Intérêt du dosage sanguin
Le taux sanguin d’hydroxychloroquine peut être mesuré à l’équilibre (au moins 3 mois après l’initiation).
Une dose quotidienne autour de 5 mg/kg est habituellement associée à un taux sanguin thérapeutique (entre 0,75 et 2 mg/L). Bien qu’aucune corrélation précise n’ait été établie avec la toxicité, des taux supérieurs à 2 mg/L sont considérés comme potentiellement toxiques. En revanche, dans le lupus cutané et systémique, des taux très bas sont clairement associés à l’inobservance thérapeutique et à une évolution défavorable (rechutes et résistance).
Quels effets indésirables ?
En respectant les bonnes règles de prescription et de surveillance, le profil de tolérance des antipaludéens de synthèse (surtout l’hydroxychloroquine) est bon.
Le plus souvent bénins
Les effets indésirables les plus fréquents sont habituellement bénins et réversibles : effets gastro-intestinaux ; prurit, hypoglycémie (en association aux antidiabétiques oraux) ; céphalée, insomnie, irritabilité, troubles audio-vestibulaires. Une pigmentation ardoisée de la peau (relativement fréquente) peut apparaître en moyenne après 2,5 à 6 ans de traitement ; des taux sériques d’hydroxychloroquine élevés et la prescription antérieure d’anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires majorent singulièrement le risque.
Certaines complications sont rares et sérieuses
SUR L'ETUDE DES TROLLS BIG-PHARMA
https://jdmichel.blog.tdg.ch/archive/2020/05/24/hydroxychloroquine-the-lancet-dans-de-sales-draps-306637.html