Je peux en parler, moi, je suis athée : eh bien, si une enfant se noie par exemple, je n'irais pas la sauver, tout simplement parce que je n'attends aucune récompense du Ciel. Je la laisserai donc crever, puisque Dieu n'existe pas (de mon point de vue).
Si on me promet du pognon avant, et si le contrat est signé sur place, j'irais peut-être sauver cette petite fille, mais sinon, hors de question.
Et je n'ai pas peur d'aller en Enfer, puisque je n'y crois pas, à l'Enfer.
C'est d'ailleurs cela qui est trop cool chez nous, les matérialistes : on n'a pas peur de l'Enfer. On peut donc laisser crever les petites filles, ou même, si ça nous arrange, on les étrangle nous-mêmes, puisqu'il n'y a à nos yeux ni Paradis ni Enfer.
I - la vertu.
1) La virtu, c'est la force. Cela implique au quotidien de lutter contre ses passions, au nom de ce qu'on imagine être le bien. En l’occurrence, pour nous il s'agit de Dieu, et plus particulièrement des béatitudes énoncées dans le sermon sur la montagne: "Heureux qui ..."... . C'est un programme ; les béatitudes désignent qui sont les vertueux, et ce que cela leur coûtera ; l'humanité dans son ensemble n'est pas vertueuse et affligera le vertueux parce que ce dernier est de nature à la remettre en cause.
2) La vertu demande une certaine connaissance de soi. En fonction de chacun, être vertueux implique un travail différent ; nous n'avons pas tous les mêmes passions. Pour deux vices opposés, il existe une vertu. Par exemple, le lâche et l'impétueux ont le même objectif ; devenir courageux, mais pas le même chemin à parcourir. La vertu est donc juste milieu.
3) A cela, il faut ajouter l'autre difficulté. Il existe des vertus innées et des vertus qui s'acquièrent par l'expérience. Les premières, vertus éthiques ne s'acquièrent pas ; soit on les a, soit on ne les a pas; c'est par exemple le sens de la justice, le courage, ... . Les secondes sont les vertus qui découlent de l'intelligence (dianoéthique) : la prudence, la clairvoyance, ... .
==> Ontologiquement, les athées ne sont pas moins dotés que nous. Ainsi, intrinsèquement, ils ne sont pas moins dotés des vertus éthiques.
Par contre, l'enseignement moral ne leur étant plus dispensé, à moins qu'ils se penchent sérieusement sur ce qu'est l'éthique, ils ne peuvent développer leurs vertus éthiques. Le constat est encore plus dommageable pour les vertus dianoéthiques ; seule l'expérience peut leur permettre de les atteindre. L'instruction sert en principe à acquérir les choses plus rapidement que par l'expérience.
II - pourquoi ton exemple est fallacieux.
1) La vertu est travail au quotidien, et non ce qui joue seulement dans des situations exceptionnelles. Ton exemple n'est donc pas pertinent. Etre vertueux, c'est lutter contre la concupiscence au quotidien, contre son désir. C'est éviter certaines solutions, parce que ce n'est pas bien. L'avortement par exemple, est une solution pratique, mais c'est le mal; cette solution est donc inenvisageable.
Ton exemple est doublement fallacieux, parce qu'il ne pose pas vraiment de questions. La situation est toute tranchée. Pour la plupart des questions du quotidien, c'est l'inverse: Trop manger, trop boire, trop de sexe..., c'est pas moral.
2) Contrairement aux juifs, nous autres chrétiens n'avons que les dix commandements ; nous n'avons pas de mitzvot, justement parce que chaque chrétien est capable de mener un raisonnement éthique. C'est pour cela que je parle de vous, athées dans de si mauvais termes ; rien ne vous incite à mener ce raisonnement éthique. Ontologiquement, vous en êtes autant capables que nous, mais vos qualités restent la plupart du temps en sommeil. Contrairement aux juifs et musulmans, vous n'avez pas de notion licite / illicite pour cadrer votre conduite non plus, ce qui pourrait être un palliatif à l'absence de raisonnements éthiques.
Votre tendance à confondre morale et raison vous rend inaptes à aspirer à la vertu. La raison est la considération de son intérêt, de soi ; c'est l'opposé de la vertu qui incite à se soucier de ce qui est bien, de l'autre avant soi. La vertu est désintéressement. Ton exemple est mauvais ; il ne comporte pour le sauveteur aucun risque ; la vertu ne s'oppose donc pas ici à la raison. C'est exactement le contraire qui se produit lorsqu'il y a réel situation de danger pour le sauveteur.
Exemple :
institutions-idees-politiques-francaises/agression-sexuelle-lille-oui-laisse-faire-t131104.html
Mon post en fin de page.
3) Pour nous chrétiens, l'intention vaut l'acte : penser à l'adultère, c'est déjà le commettre. Donc être vertueux consiste à essayer d'avoir le moins de mauvaises pensées possibles ; faire le bien pour aller au paradis, c'est faire le bien pour de mauvaises raisons. La logique qui prévaut est la suivante ; c'est parce que j'ai fait le bien, et que je me suis montré désintéressé, que je peux éventuellement aspirer au paradis.
Ce n'est donc pas par peur de l'enfer qu'on agit bien. La volonté de faire le bien est le préalable indispensable pour mener un raisonnement éthique ; sans cela, le raisonnement ne l'est pas.
==> Je n'ai rien contre les athées. Ils peuvent être animés de la volonté de faire le bien. Mais qui les pousse à s'interroger sur l'éthique ? Seuls, les meilleurs parmi eux le feront.
NB : désolé pour le manque d'organisation ; je suis un peu fatigué : insomnie.