Je suis assistante maternelle. La violence est prohibée envers les enfants, normal.
La semaine dernière, j'ai reçu le journal du relais assistante maternelle concernant la façon dont on doit se comporter avec les enfants. Alors bien entendu, pas de coup. Mais pas de violence verbale, pas de moquerie, pas de cris ... là, encore, c'est normal. Mais on nous demande aussi de ne pas punir, de ne rien interdire sans explication, de lui imposer des rythmes qui ne lui conviennent pas (autrement dit, c'est l'enfant qui choisit son rythme ?), de ne pas l'obliger à dormir (c'est lui qui dit quand on dort alors ? Et s'il a envie de faire la fiesta la nuit, on laisse faire ?), ni à manger (s'il ne veut manger que des frite, on laisse faire ?), ni d'être propre (s'il ne veut pas se laver, on le laisse macérer dans sa crasse ?) ...
Je suis Nounou. Si je ne respecte pas ces demandes là, je risque d'être virée de mon boulot ! Voilà où on en est au niveau éducation.
Pourtant, je suis de la vieille école. Frapper, non. Ce n'est pas une solution, il est vrai que ça ne résout rien. Quand on a mis une fessée, c'est qu'on a perdu notre sang froid. C'est un échec éducatif. Mais on doit pourtant quand même faire preuve d'autorité. On mange à midi, pas pendant l'heure de la sieste. Tu ne manges pas, tu n'auras rien d'autre. Surtout que bien souvent on sait très bien distinguer le refus de manger parce que c'est pas bon et le refus de manger parce que l'enfant avait décidé qu'il ne mangerait pas. Un enfant qui n'aime pas, on ne force pas. Il a essayé de goûter, ça n'est pas passé, ok, on passe à autre chose. Un enfant qui commence à chouiner parce que tu ramènes l'assiette à table, sans savoir ce qu'il y a dedans. Ben non. On ne fait pas de caprice, tu vas goûter, si ça se trouve, tu vas aimer. Mais même ça, je n'ai pas le droit de l'imposer !
J'ai 4 enfants de moins de 3 ans en accueil. Je ne peux décemment pas mettre un enfant à la sieste à 9h, puis un autre à 10h, puis un autre à 11h ... Et les repas, c'est décalé aussi ? Mais quand on fait des sorties avec tout ça ? Quand on danse sur des petites chansons ? Quand on regarde un livre ? La PMI nous demande des choses que les parents eux-mêmes ne respectent pas et que les crèches ne respectent pas non plus, ni les écoles.
Allons à l'école maternelle, c'est chansons en arrivant, pose pipi, récré, activités manuelles, cantine, histoire, dodo ... On ne s'adapte pas à chaque enfant !
Et puis je ne compte pas le nombre de parents qui me sortent encore "si jamais il n'est pas sage, n'hésitez pas à lui en mettre une, il n'y a que ça qui marche !" ... Ou d'autres qui ne me donneront pas l'autorisation de fesser mais qui avoueront que c'est monnaie courante chez eux ...
Et pourtant, malgré le fait que je transgresse ces "interdits", les puéricultrices qui viennent chez moi et qui s'étonnent que les enfants soient si calmes, si sereins, heureux, à l'aise me félicitent pour le travail accompli. Mais quel travail ? Le leur ? certainement pas. Le mien, celui qui transgresse les règles. Mais chuuut ... ça, il ne faut pas l'avouer, ça ferait de moi un monstre et je risquerais de perdre mon agrément ...
Voilà où on en est dans cette société.
J'ai déjà dû faire deux signalements pour maltraitance et croyez moi, il en faut beaucoup pour faire bouger les services sociaux. Il a fallu que je menace d'appeler la police pour qu'on prenne les choses au sérieux. Par contre, une assmat qu'on suspecte d'avoir empêché un gamin de dormir ou qui aurait obligé un enfant à manger 2 cuillerées de légumes, se fait lyncher sur la place publique ...
Mais dans quel monde on vit ?
De mon côté, et c'est le cas de toutes les assistantes maternelles en France, on est obligé de vivre dans l'hypocrisie la plus totale. Tout le monde connait l'envers du décor, mais tout le monde doit le cacher. C'est ridicule, on est toujours obligé de mentir, d'être dans le politiquement correct, alors qu'on n'a souvent rien à se reprocher. Les parents sont contents de voir que leurs enfants sont réglés pour la sieste, qu'ils mangent tout ce qu'on leur présente, qu'ils ont le temps de faire des activités manuelles ... Et pourtant, pour y arriver, on est bien obligé de sévir. Les assistantes maternelles qui respectent les directives sont les nouvelles recrues et elles pataugent dans la semoule. Elles finissent la semaine sur les rotules avec des gamins énervés, qui pleurent toute la journée parce qu'on ne peut pas laisser un enfant dormir pendant qu'un autre veut écouter de la musique. Un rythme, ça se donne, ça s'apprend. C'est ce rythme là qui permet à l'enfant de se construire et d'être bien dans ses baskets.
"Mes" petits, plus cool, y'a pas. Ils n'ont pas besoin de montre, ils savent qu'après avoir passé le balai sur les miettes sous la table, on va se laver les mains, puis on met les petits à la sieste et on sort les gommettes pour faire de jolis dessins et puis quand bébé pleure, on se prépare pour sortir ...
Alors taper non, mais on est dans un contexte de laisser aller complet, et ça, c'est une horreur en soi. Il faut discuter avec l'enfant. Mais avant de discuter, il faut l'éduquer. ça ne s'invente pas. Y'a pas de discussion possible avec un enfant qui ne veut pas écouter.