Très certainement.
Toutefois, le fait de se libérer de la pesanteur de la culture classique et officielle est quelque chose de difficile.
Et il est illusoire de croire que l'on y parvient en se soumettant à la mode, aux derniers cris de la prétendue actualité.
Je montre ma propre capacité de raisonnement parce que je ne cite pas Kant et Freud, mais Jean-Marie Bigard et Alain Soral ?
Ce n'est pas une preuve de la liberté de la réflexion, mais de son inféodation à la mode et plutôt le signe d'un refus de penser.
Et si on veut parler de Céline, on cite Céline, et pas Soral. Et si on veut être pris au sérieux, on lit Céline, et pas Soral.
Dans le cas de nos chers bacheliers, il faudrait qu'ils aillent regarder Aristote, Spinoza et Hegel. Ce qui ne les gênera en rien dans l'acte de penser et leur en donnera beaucoup plus d'occasions que Soral et Clara Morgane.
Tu reproches quoi aux thèses de Soral, pour comparer sa prose à celle de Clara Morgane ?
Tu tombes dans les travers des chèvres qui le critiquent. Un empilement d’épithètes préconçues, mais rien sur le fond.
Il y a un peu plus que rien, je crois.
D'abord, le nombre de relations sexuelles de Soral n'a rien à envier aux exploits de Clara Morgane. Je ne parle pas de sa vie privée, mais de son oeuvre : il a publié ses propres prouesses de façon affichée, comme Clara. Il est apparu sur la scène éditoriale et médiatique en tant que fouteur. C'est son socle de connaissance originaire. J'ai rappelé qu'il a d'ailleurs fait la promotion de films de boules : sa connaissance fionesque encyclopédique lui a permis d'exhumer un vieux porno inconnu d'Arielle Dombasle qu'il a vendue dans une de ses vidéos. C'était bien sûr une façon de lutter contre le "sionisme", évidemment... Contre le "sionisme", tout est bon, mais surtout le fion.
Il connaît donc manifestement mieux les films porno que les élucubrations philosophiques de Béachèle.
Par ailleurs, sa forme d'antisémitisme relève de la transgression et ne s'entend qu'à cette aune. J'ai cité ailleurs l'Immortelle parole du Führer lui-même : "l'antisémitisme est la seule forme de pornographie autorisée par le Troisième Reich". (Au reste, les métaphores sexuelles, quenelle en tête, prolifèrent dans le discours de Soral à la vitesse d'une métastase au galop).
Il est aujourd'hui très difficile de choquer vraiment : même les pratiques sexuelles les plus dégueulasses (dont Soral parle en expert, vous avez peut-être vu son intervention brillante sur le fistfucking) ne sont plus tabou, on réhabilite l'homosexualité, le transsexualisme, n'importe quoi, on voit des femmes à poil partout, Sade est quasi un auteur officiel, on donne la Palme d'or à Cannes à un film sur les lesbiennes, etc.
Donc, choquer le bourgeois, être vraiment transgressif, cela devient mission impossible.
Il n'y a plus qu'un (ou peut-être deux ou trois, j'en oublie sans doute) tabou absolu : la Shoah et l'antisémitisme. Il n'y a guère que cela que même les plus transgressifs et scandaleux n'osent toucher.
Si Soral montrait sa queue à l'écran, cela ne nous inspirerait qu'un bâillement ennuyé (d'autant qu'on l'a déjà vue, comme mentionné dans mon premier point). L'antisémitisme grossier genre Protocoles, c'est bien plus crade.
Pour ce qui est des chèvres, on sait ce que Soral en fait.