***Rétablissement du fil initié le 23 Déc 2006... et purgé par erreur lors du passage à la nouvelle version du fopo.***

Dans l'objectif permanent d'accroître la qualité et la bonne tenue du forum ainsi que de promouvoir l'auto modération des intervenants en vue du respect de la loi et du règlement, il a été décidé de mettre à disposition sur ce fil des exemples concrets d'intervention des autorités compétentes dans le cadre de la liberté d'expression et de ses limites ayant conduit à des décisions judiciaires.

La jurisprudence qui figure sur ce fil est susceptible de guider la modération, en particulier sous l'angle de l'article 3 alinéa 2 RFP. Ce fil ne comporte que des décisions de justice et n'est pas ouvert à la discussion ou à des commentaires. Il peut être complété au fur et à mesure par la modération. Tout intervenant peut proposer l'ajout d'une jurisprudence en la faisant parvenir à la modération et en l'accompagnant d'un lien Internet permettant la consultation.

En outre, les décisions qui figurent sur ce fil peuvent faire l'objet d'une discussion - en respectant la loi et le règlement - dans une section appropriée du forum, par exemple dans la section justice.

Atteinte à l'honneur - définitions jurisprudentielles

Généralités

ATF 6S.504/2005 du 28 février 2006 (Cour de cass. pénale), consid. 2.1

Cette disposition protège la réputation d'être un homme honorable, c'est-à-dire de se comporter comme un homme digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues. Il faut donc que l'atteinte fasse apparaître la personne visée comme méprisable. Il ne suffit pas qu'elle l'abaisse dans la bonne opinion qu'elle a d'elle-même ou dans les qualités qu'elle croit avoir, notamment dans le cadre de ses activités professionnelles, artistiques ou politiques. Echappent donc à la répression les assertions qui, sans faire apparaître la personne comme méprisable, sont seulement propres à ternir la réputation dont elle jouit dans son entourage ou à ébranler sa confiance en elle-même par une critique visant en tant que tel l'homme de métier, l'artiste ou le politicien (ATF 119 IV 44 consid. 2a p. 47 et les arrêts cités). Une personne morale est atteinte dans son honneur, lorsqu'il est allégué qu'elle a une activité ou un but propre à la rendre méprisable selon les conceptions morales généralement admises (cf. par analogie: ATF 117 IV 27 consid. 2c p. 28 s.; 116 IV 205 consid. 2 p. 206); tel est le cas, par exemple, si elle est assimilée à une organisation criminelle ou à un parti politique que l'histoire a rendu méprisable ou encore si l'on suggère qu'elle a de la sympathie pour le régime nazi (cf. ATF 121 IV 76 consid. 2a/bb p. 82).

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2005.html

Accusations en matière d'adultère, de prostitution, de mensonge et de maladies sexuelles

ATF 6S.5/2007 du 14 mars 2007 (Cour de cass. pénale), consid. 3.3 et 3.4

3.3 Dans un arrêt datant de 1972, le Tribunal fédéral a retenu que le fait d'accuser quelqu'un d'adultère portait atteinte à son honneur. Pour les juges fédéraux de l'époque, des relations intimes entre partenaires dont l'un était marié restaient contraires aux bonnes moeurs malgré l'évolution des conceptions. Les juges motivaient leur point de vue par le fait que, sous certaines conditions, le code pénal punissait l'adultère d'emprisonnement (ATF 98 IV 86 consid. 2 p. 88 ). Par la loi fédérale du 23 juin 1989, entrée en vigueur le 1er janvier 1990, le législateur a cependant abrogé l'art. 214 CP, qui réprimait l'adultère, de sorte que la motivation exposée dans l'arrêt précité n'est plus pertinente aujourd'hui (RO 1989, 2449; FF 1985 II 1021). Dans un arrêt plus récent, du 6 décembre 2000 (6S. 752/2000, consid. 3), le Tribunal fédéral mentionnait, sans autre développement, à propos de l'application de l'art. 181 CP, que, bien que l'adultère ne fût plus réprimé pénalement, "il n'en rest pas moins qu'accuser une personne d'adultère p, suivant les circonstances, attenter à son honneur en jetant sur elle le soupçon d'avoir eu un comportement méprisable". Dans des ouvrages de doctrine publiés après l'abrogation de l'art. 214 CP, les auteurs citent encore l'adultère comme cas d'atteinte à l'honneur. Ainsi, tout en précisant que la punissabilité du comportement évoqué n'est pas une condition de l'atteinte à l'honneur, Riklin considère qu'il est attentatoire à l'honneur de reprocher à quelqu'un d'avoir un comportement socialement mal vu en matière sexuelle, tel que l'adultère et la prostitution. Il mentionne comme autres cas d'atteintes à l'honneur le fait d'évoquer qu'une personne a une maladie sexuelle ou qu'elle a menti (Riklin, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, 2003, rem. prélim. art. 173, n. 18 ). Stratenwerth/Jenny et Corboz citent également comme exemple d'atteinte à l'honneur le fait d'alléguer un adultère, le dernier auteur précisant que l'abrogation de l'art. 214 CP, qui réprimait l'adultère, devrait conduire à un réexamen de la motivation de la jurisprudence fédérale (ATF 98 IV 86; Stratenwerth/Jenny, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I: Straftaten gegen Individualinteressen, 6e éd., Berne 2003, § 11, n. 20; Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2002, art. 173, n. 16). Enfin, dans la jurisprudence cantonale, on trouve un arrêt neuchâtelois, qui déclare qu'il est douteux que l'accusation de concubinage dans le cadre d'un litige matrimonial soit attentatoire à l'honneur de façon générale (RJN 2001, p. 162); dans ce cas, les époux étaient cependant déjà séparés de fait.

3.4 Si l'adultère a cessé d'être punissable, cela ne signifie pas pour autant qu'il ne soit pas moralement réprouvé. La liberté sexuelle est certes entrée dans les moeurs. Il est vrai que la personne qui commet un adultère n'est aujourd'hui plus couverte d'opprobre. Le code civil exige cependant toujours, à l'art. 159 al. 3 CC, la fidélité des époux et conçoit ainsi la relation conjugale comme exclusive, pour chaque époux, de rapports semblables ou analogues avec un autre partenaire (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, Les effets du mariage, Berne 2000, § 1, n. 55, p. 66). L'adultère - s'il n'est plus une cause de divorce -, reste ainsi un acte illicite. Le conjoint qui entretient des relations intimes avec un tiers manque à ses engagements et trahit la confiance mise en lui par son partenaire. Il est bien souvent considéré encore aujourd'hui, dans la société, comme une personne déloyale, qui a manqué à sa parole, et sa réputation, sans être ruinée, sera néanmoins fortement compromise. Contrairement à l'avis de la cour cantonale, il faut donc admettre que le message envoyé par l'intimée est propre à déprécier le caractère du plaignant et à nuire à sa réputation, de sorte qu'il tombe sous le coup des art. 173 ss CP.

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI? ... _6S.5/2007

Distinction: diffamation - calomnie - injure

ATF 6S.664/2001 du 14 mai 2002 (Cour de cass. pénale), consid. 1.f)aa)

aa) Alors que la diffamation ou la calomnie supposent une allégation de fait, un jugement de valeur, adressé à des tiers ou à la victime, peut constituer une injure au sens de l'art. 177 CP (ATF 117 IV 27 consid. 2c p. 29 et les arrêts cités). Pour distinguer l'allégation de fait du jugement de valeur, il faut se demander, en fonction des circonstances, si les termes litigieux ont un rapport reconnaissable avec un fait ou sont employés pour exprimer le mépris (Günter Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I, Berne 1995, n. 19 ad § 11). La notion de jugement de valeur doit être comprise dans un sens large; il s'agit d'une manifestation directe de mésestime ou de mépris, au moyen de mots blessants, de gestes ou de voies de fait (Martin Schubarth, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, vol. III, Berne 1984, n. 7 et 8 ad art. 177 CP). L'honneur protégé correspond alors à un droit au respect formel, ce qui conduit à la répression des injures dites formelles, tels l'expression outrageante, des termes de mépris ou des invectives (Paul Logoz, Partie spéciale I, Neuchâtel 1955, p. 255; Alain Steullet, La victime de l'atteinte à l'honneur, thèse Neuchâtel 1983, p. 35).

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2001.html

Personne non désignée mais reconnaissable - Propagation de soupçons

Arret 6S.368/2000 du 4 décembre 2000 (Cour de cass. pénale), consid. 2)a)-c)

2)a)...Le comportement délictueux peut consister soit à accuser une personne, c'est-à-dire à affirmer des faits qui la rendent méprisable, soit à jeter sur elle le soupçon au sujet de tels faits, soit encore à propager - même en citant sa source ou en affirmant ne pas y croire - une telle accusation ou un tel soupçon...

Il n'est pas nécessaire que la personne visée soit nommément désignée; il suffit qu'elle soit reconnaissable...

b) ...Au demeurant, que le fait avancé soit vrai, que l'auteur fasse état de soupçons ou encore qu'il formule ses propos sous la forme d'une interrogation ou d'une supposition, la phrase incriminée n'en est pas moins attentatoire à l'honneur...

c) Au vu de ce qui précède, le caractère diffamatoire des propos litigieux a été nié à tort...

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2000.html

Groupe de personnes - qualificatifs

ATF 100 IV 43 du 2 avril 1974 (Cour de cass. pénale), consid. 1 à 4

1.- La répression pénale des atteintes à l'honneur, fondée sur les art. 173 ss. CP, n'est possible que si l'honneur d'une personne physique ou morale est atteint. Il convient dès lors d'examiner avant toute chose si, dans le cas d'une attaque collective visant les chasseurs et dirigée contre eux, l'honneur individuel de chaque chasseur ou des sociétés ou associations groupant des chasseurs est atteint dans une mesure suffisamment nette pour justifier l'application des sanctions pénales.

2.- On peut admettre que certains des termes employés par l'intimé Debrot dans l'article incriminé, ou publiés sous sa responsabilité, constitueraient des atteintes à l'honneur tombant sous le coup du code pénal, s'ils étaient dirigés contre une personne déterminée. Des termes comme "maniaques", "vicieux", "brutes sanguinaires", voire "êtres humains qui n'en sont - mentalement et intellectuellement - qu'à l'état larvaire" paraissent propres à blesser l'honneur personnel et la réputation d'être un homme honorable, en tout cas dans la mesure où ces termes sont détournés de leur sens médical ou purement scientifique pour être utilisés dans leur sens courant et déprécier le caractère de la personne visée (cf. RO 98 IV 90). Cela n'implique cependant pas pour autant que l'emploi de tels termes à l'endroit de l'ensemble des chasseurs, c'est-à-dire d'une collectivité ou d'un ensemble de personnes ayant pour caractéristique commune l'exercice plus ou moins régulier d'une même activité, porte nécessairement atteinte à l'honneur de chacun des individus appartenant au groupe. Si, dans le cadre d'une attaque dirigée contre un groupe bien délimité de personnes (par ex. 73 conseillers nationaux), la Cour de cassation a admis que chacune des personnes du groupe pouvait être lésée dans son honneur (RO 80 IV 159 consid. 4), elle ne s'est en revanche pas prononcée à propos d'attaques dirigées contre des communautés plus vastes. Avant l'entrée en vigueur du code pénal suisse cependant, et dans le cadre limité de son pouvoir d'examen en cas de recours de droit public, le Tribunal fédéral a déclaré qu'il n'y avait pas d'arbitraire à admettre que l'existence d'une atteinte à l'honneur d'une personne déterminée pouvait résulter d'une désignation collective, à la condition que les individus en soient l'objet d'une manière reconnaissable; il a considéré à cette occasion que c'est une question d'appréciation des faits concrets que de savoir s'il en est ainsi; se référant à la doctrine, il a cependant montré quelque réserve pour le cas où l'attaque serait dirigée contre une collectivité comprenant un très grand nombre d'individus (RO 50 I 216-218 consid. 3). La doctrine s'est attachée à dégager des critères et des éléments d'appréciation plus précis, en cherchant à tracer les limites jusqu'auxquelles une attaque collective est encore propre à porter atteinte à l'honneur de l'individu. Refusant d'admettre que toute attaque collective, quelle que soit l'ampleur de la collectivité visée, a nécessairement un effet réflexe sur les individus qui la composent et porte dès lors atteinte à leur honneur personnel (BRUNSCHWIG, Die Kollektiv-Ehrverletzung, p. 20 ss., 27 ss.), la doctrine dominante se montre plus nuancée et plus restrictive. Suivant en cela les tendances de la jurisprudence allemande, elle considère qu'une offense collective ne portera atteinte à l'honneur d'individus que si la collectivité ou le groupe attaqué est suffisamment délimité pour se distinguer nettement de l'ensemble de la communauté; à défaut de cette délimitation, l'offense est dépourvue d'un pouvoir suffisamment déterminant pour atteindre les éléments de la collectivité visée dans leur honneur (STREHLE, Die Kollektivbeleidigung im schweizerischen und deutschen Recht, p. 52/53; KRUG, Ehre und Beleidigungsfähigkeit von Verbänden, p. 28 ss.; MAURACH, Deutsches Strafrecht, Bes. Teil, éd. 1961, § 17 III b, p. 137; Leipziger Kommentar, éd. 1958, p. 137 ch. 3; éd. 1970, vor § 185, n. 16 à 19). Si elle ne trace pas une limite claire, cette manière de voir permet de poser que toute atteinte à l'honneur individuel est en principe exclue, lorsque l'attaque est dirigée de manière générale contre toute une classe de personnes, pratiquant une religion ou exerçant par exemple une profession, prise dans son ensemble et sans aucune désignation plus précise (STREHLE, op.cit., p. 72 ss., 82; KRUG, op.cit., p. 28 ss.; STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Bes. Teil I, p. 112). En matière civile, dans le cadre de l'application de l'art. 28 CC, on peut observer la même tendance de la doctrine (cf. EGGER, Kommentar ZGB, n. 38 ad art. 28, p. 250). Quant à la jurisprudence française, elle est encore plus restrictive, puisqu'elle considère que des attaques générales, aussi injustes ou excessives soient-elles, dirigées contre une collectivité indéterminée ou une classe sociale n'atteignent en réalité personne; il a été jugé que lorsqu'on attaque un vaste groupe de personnes, que rien n'unit entre elles, à l'exception d'une communauté d'origine ou d'intérêts, d'une identité de profession ou de traditions, d'une affinité de souvenirs ou d'idéal (p.ex. noblesse, clergé, magistrature, médecins, commerçants, membres d'un parti ou d'une classe, habitants d'une ville ou supporters d'un club sportif), les diffamations et les injures se dispersent et ne parviennent pas à blesser individuellement les personnes qui composent de tels groupes (Cour de cassation criminelle, 16 décembre 1954, Recueil Dalloz 1955, p. 287 ss.).

3.- Sans aller jusqu'à adopter la position de la jurisprudence française, on doit admettre que l'attaque générale dirigée contre une vaste collectivité de personnes prise dans son ensemble ou son universalité n'est pas propre à porter atteinte à l'honneur de chacun des individus qui lui appartiennent, si aucune délimitation ne permet d'identifier un groupe plus restreint se distinguant de l'ensemble. Trop générale, l'attaque se dilue au point de s'atténuer considérablement et elle détourne le citoyen moyen d'envisager ou de croire qu'elle puisse réellement toucher sans aucune exception tous les individus de la collectivité visée. L'existence d'une certaine précision dans la désignation du groupe ou des personnes visées correspond d'ailleurs au but de la répression pénale en matière d'atteinte à l'honneur, en ce sens que celle-ci doit rester l'ultima ratio (cf. LOGOZ, Partie spéciale ad art. 173-178, ch. 2, p. 238 ).

4.- Les attaques formulées par l'intimé sont dirigées contre tous les chasseurs pris dans leur ensemble et dans toute leur universalité. C'est en vain que les recourants tentent de soutenir que ces attaques ne viseraient que les chasseurs vaudois ou que, dans l'esprit des lecteurs des articles incriminés, l'intimé ne parlerait que des chasseurs vaudois; ce n'est pas parce que les articles ont paru dans un périodique vaudois à l'occasion de discussions ou de polémiques brûlantes dans le canton de Vaud que l'on doit en arriver à une semblable conclusion. Rien dans les articles en cause ne permet de comprendre ou de déduire qu'ils établissent une distinction entre les chasseurs vaudois et les autres. Bien au contraire, le sens et le contexte des articles font ressortir que les attaques sont dirigées contre tous les chasseurs en général, de quelque origine ou de quelque provenance qu'ils soient. Rien ne permet d'inférer que ces attaques ne s'adressent qu'aux chasseurs vaudois, et ne concerneraient ni ne viseraient les chasseurs de cantons ou de pays voisins ou lointains. Aucune précision géographique, locale, ni aucune délimitation particulière quelconque ne permet de circonscrire l'attaque à un groupe plus restreint ou mieux défini par rapport à l'ensemble des chasseurs du monde. Dans ces conditions, aucun chasseur individuel, ni aucun chasseur vaudois plus particulièrement qu'un autre, ne peut se sentir suffisamment atteint dans son honneur personnel pour qu'il puisse être fait application des art. 173 ss CP à l'endroit de l'intimé. Celui-ci a donc été libéré à juste titre par la cour cantonale.

Publié par le Tribunal fédéral:

http://relevancy.bger.ch/cgi-bin/JumpCG ... r&zoom=OUT

Personnes politiques

ATF 6S.664/2001 du 14 mai 2002 (Cour de cass. pénale), consid. 1.a), 1.d) et 3. c)

Dans la discussion politique, l'atteinte à l'honneur punissable n'est admise qu'avec retenue (ATF 118 IV 248 consid. 2b p. 251) et, en cas de doute, doit être niée (ATF 116 IV 146 consid. 3c p. 150). La liberté d'expression indispensable à la démocratie implique que les acteurs de la lutte politique acceptent de s'exposer à une critique publique, parfois même violente, de leurs opinions (Bernard Corboz, Les principales infractions, Berne 1997, n. 10 ad art. 173 CP). Il ne suffit pas d'abaisser une personne dans la bonne opinion qu'elle a d'elle-même ou dans les qualités politiques qu'elle croit avoir. Echappent ainsi à la répression les assertions qui, sans faire apparaître la personne comme méprisable, sont seulement propres à ternir la réputation dont elle jouit comme politicien ou à ébranler la confiance qu'elle a en elle-même par une critique la visant en tant que politicien (ATF 119 IV 44 consid. 2a p. 47 et les arrêts cités). La critique ou l'attaque porte toutefois atteinte à l'honneur protégé par le droit pénal si, sur le fond ou dans la forme, elle ne se limite pas à rabaisser les qualités de l'homme politique et la valeur de son action, mais est également propre à l'exposer au mépris en tant qu'être humain (ATF 105 IV 194 consid. 2a p. 196; Bernard Corboz, loc. cit.). Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon le sens qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (ATF 121 IV 76 consid. 2a/bb p. 82; 119 IV 44 consid. 2a p. 47; 118 IV 248 consid. 2b p. 251; 117 IV 27 consid. 2c p. 29 s.). S'agissant d'un texte, il doit être analysé non seulement en fonction des expressions utilisées, prises séparément, mais aussi selon le sens général qui se dégage du texte dans son ensemble (ATF 117 IV 27 consid. 2c p. 30; 115 IV 42 consid. 1c p. 44; Martin Schubarth, Grundfragen des Medienstrafrechtes im Lichte der neueren bundesgerichtlichen Rechtsprechung, RPS 113/1995 p. 155). Les propos que tiennent des adversaires politiques dans le cadre d'un débat engagé ne doivent cependant pas toujours être pris au pied de la lettre, car ils dépassent souvent la pensée de leurs auteurs. Par ailleurs, le public concerné par le débat ne tire guère des tracts qu'il lit ou des discours qu'il entend de réels motifs de suspicion à l'endroit des personnes visées, à moins que ceux-ci soient énoncés avec clarté et fondés sur des accusations précises (ATF 105 IV 194 consid. 2a p. 196).

Le déroulement d'un débat politique équitable implique notamment que l'identité des auteurs de tracts ou d'affiches apparaisse sur ces écrits (cf. Max Imboden, Helvetisches Malaise, Zurich 1964, p. 41). Celui qui ne se tient pas à cette règle élémentaire du débat public et mène une campagne en se retranchant intentionnellement derrière l'anonymat n'est ainsi pas fondé à se prévaloir de la jurisprudence imposant une retenue dans la sanction des atteintes à l'honneur commises dans le débat politique.

Le fait de mener la campagne de manière anonyme révèle en effet une lâcheté qui rejette dans l'ombre les mobiles invoqués. Les personnes expressément visées par cette campagne étaient, de manière intentionnelle, privées de la possibilité de riposter à l'attaque, qui pourtant voulait s'inscrire dans le cadre du débat public; il est difficile de répondre à une personne ou à un groupement dont on ne connaît ni l'identité ni l'adresse.

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2001.html

Bonne foi de l'auteur

ATF 6S.664/2001 du 14 mai 2002 (Cour de cass. pénale), consid. 2.a)

L'art. 173 ch. 2 CP dispose que l'inculpé n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies. L'accusé apporte la preuve de sa bonne foi s'il démontre qu'il a accompli les actes que l'on pouvait exiger de lui pour contrôler la véracité de ce qu'il alléguait. Une prudence particulière doit être exigée de celui qui donne une large diffusion à ses allégations (ATF 124 IV 149 consid. 3b p. 151; 116 IV 205 consid. 3b p. 208 ).

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2001.html

Exclusion de l'excuse de vérité ou de bonne foi

ATF 6S.212/2004 du 6 juillet 2004 (Cour de cass. pénale), consid. 2.2

2.2 L'art. 173 ch. 2 CP dispose que l'inculpé n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies. Le fardeau de la preuve libératoire incombe à l'auteur de la diffamation. Celui-ci a le choix de fournir la preuve de la vérité ou celle de la bonne foi. Lorsque l'une de ces deux preuves est apportée, l'inculpé doit être acquitté (ATF 119 IV 44 consid. 3 p. 48 ). L'art. 173 ch. 3 CP précise que l'inculpé ne sera pas admis à faire ces preuves et sera punissable si ses allégations ont été articulées ou propagées sans égard à l'intérêt public ou sans autre motif suffisant, principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui, notamment lorsqu'elles ont trait à la vie privée ou à la vie de famille. Il résulte de l'art. 173 ch. 3 CP que l'auteur de la déclaration litigieuse n'est pas systématiquement admis à apporter une preuve libératoire. Le seul fait d'avoir dit la vérité ne suffit donc pas dans tous les cas à échapper à une sanction pénale (cf. Bernard Corboz, Les infractions en droit suisse, Berne 2002, art. 173 CP n. 53). L'admission à la preuve libératoire constitue la règle, de sorte que les conditions d'un refus sont interprétées plutôt restrictivement (cf. Corboz, op. cit., art. 173 CP n. 54; Martin Schubarth, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, Bes. Teil, 3. Band, Berne 1984, art. 173 CP n. 69). La preuve libératoire ne peut être refusée que si l'auteur s'est exprimé sans motif suffisant et s'il a agi principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui. Les deux conditions sont cumulatives (ATF 116 IV 31 consid. 3 p. 38, 205 consid. 3b p. 208 ). L'art. 173 ch. 3 CP mentionne l'intérêt public comme exemple de motif suffisant. L'auteur peut toutefois faire valoir un autre motif suffisant. Un tel motif n'est pas d'emblée exclu lorsque le fait touche à la vie privée ou à la vie de famille, mais il faut se montrer plus restrictif quant à son admission (cf. Corboz, op. cit., art. 173 CP n. 62; Schubarth, op. cit., art. 173 CP n. 71). (...)

Ainsi, le recourant a agi dans le dessein de dire du mal et sans motif suffisant. La Chambre pénale n'a pas violé le droit fédéral en ne l'autorisant pas à apporter les preuves libératoires de l'art. 173 ch. 2 CP. Dans ces conditions, il est indifférent de savoir si les affirmations propagées par le recourant sont vraies comme il le soutient. Même en les supposant telles, ses affirmations restent illicites en l'espèce.

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI? ... S.212/2004

Propos négationnistes discrimination raciale - condamnation judiciaire passée en force

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E

*************************************************

16 octobre 2001

(…)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent les f a i t s suivants:

A.- Par jugement du 10 avril 2000, le Tribunal correctionnel du district de Lausanne a reconnu Gaston-Armand Amaudruz coupable (...).

Par arrêt du 20 novembre 2000, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois (...) réduisant la peine d'emprisonnement (...)

B.- Cet arrêt retient notamment les faits suivants:

(…)

d) En mars 1995, Gaston-Armand Amaudruz a écrit et publié, dans son journal "Le Courrier du Continent", un article ayant pour titre "La question juive". On pouvait notamment y lire:

"Que ces extrémistes juifs croient ou feignent de croire à l'extermination des "six millions" dans les chambres à gaz au cours de la deuxième guerre mondiale, libre à eux. Qu'ils cherchent à en persuader leurs coreligionnaires n'est pas très loyal, mais passe encore. Qu'ils prétendent imposer aux non-Juifs, par des lois ad hoc, la foi en l'"holocauste", voilà qui nous semble légèrement exagéré.

Ces extrémistes, que nous avons déjà nommés "maximalistes" en raison de leurs exigences insatiables, veulent imposer aux autres peuples toutes sortes de revendications: des réparations, des muselières, le mondialisme (y compris le libre-échangisme et le mélange des races).

(...) Nous remplirions des pages à citer les maximalistes favorables au mélange des races. Bornons-nous à constater qu'avec eux une importante partie de la communauté juive mondiale s'intègre dans le lobby mondialiste métisseur des peuples.

(...) Le chantage fondé sur l'"holocauste" des "six millions" finira par lasser les meilleures volontés. Cela d'autant plus que 50 ans se sont écoulés depuis ces faits mythiques.

(...) En effet, par leurs composantes sémite, turco-tatare (les Khazars) et européenne (par le mélange avec divers peuples-hôtes), les Juifs appartiennent à cette race blanche que leurs "responsables" s'acharnent à détruire. Sans doute, telle n'est pas leur intention, ils veulent affaiblir les goyim par métissage pour mieux les dominer. Seulement, le processus des plus dangereux, risque de leur échapper. Et le déclin de la grande race blanche entraînera la disparition de l'ethnie juive.

(...) Que les Juifs, eux aussi, élaborent un plan de mille ans fondé, non sur la violence, mais sur les services rendus. (...) "

En juillet 1995, le recourant a écrit et publié dans son journal un article qui s'intitulait "Je ne crois pas aux chambres à gaz". Au début de cette chronique, il rappelait qu'il avait été inculpé pour discrimination raciale au sens de l'art. 261bis CP, disposition dont il estimait qu'elle constituait la principale présomption contre l'existence des chambres à gaz dans les camps de concentration durant la deuxième guerre mondiale. Ensuite, il ajoutait notamment ce qui suit:

"En effet, si l'existence des chambres à gaz était sûre et certaine, il suffirait d'en publier des preuves. Nul besoin d'une loi pour en imposer la croyance. A elle seule, cette loi démontre que les preuves des exterminationistes sont moins concluantes qu'ils ne le voudraient. Comme toujours au cours de l'histoire, imposer un dogme par la force est un signe de faiblesse. Les exterminationistes pourront gagner les procès en vertu des lois muselières. Ils perdront le dernier devant le tribunal des générations futures".

Après avoir évoqué l'inexistence des chambres à gaz dans divers camps de concentration et l'impossibilité de rapporter la preuve négative de ce fait, le recourant ajoutait:

"A propos des "chambres", trois possibilités se présentent: 1) les "chambres" ont existé; 2) elles n'ont pas existé; 3) on ignore si elles ont existé ou non. Depuis le 1er janvier 1995, la proposition n. 2 constitue un délit. Comme il n'y a encore aucune jurisprudence en la matière, on ne sait pas si la proposition n. 3, c'est-à-dire le doute, va être assimilée à une négation et, par suite, réputée punissable. En ce cas, cela reviendrait à déclarer obligatoire la proposition n. 1: la croyance au gazage.

(...) Quant à moi, je maintiens ma position: je ne crois pas aux chambres à gaz. Que messieurs les exterminationistes en fournissent la preuve et j'y croirai. Mais comme j'attends cette preuve depuis des dizaines d'années, je ne pense pas la voir apparaître de sitôt. Je serais même ravi d'une condamnation, car celle-ci prouverait le caractère terroriste de la muselière."

En avril 2000, Gaston-Armand Amaudruz a écrit et publié dans le même journal un article intitulé "Vive le révisionnisme". On pouvait notamment y lire:

"L'art. 261bis CP supprime la liberté d'expression. Il rend impossible d'enrayer l'immigration de couleur. Il pousse au génocide par métissage de la race blanche.

(...) Essayez donc d'invoquer l'incompatibilité biologique pour stopper l'invasion de couleur et pour ramener dans leur continent d'origine les effectifs déjà installés.

(...) Le crime véritable, c'est le métissage. Et les auteurs des muselières ont commis un crime contre la race.

(...) Dès l'instant où les cadavres deviennent des postes de facture, un contrôle du nombre se justifie. N'importe quelle indemnité, multipliée par six millions ou par 300'000 (estimation de certains révisionnistes) donne des résultats dans le rapport de 20 à 1. Nos banques auraient donc pu résister à un chantage dont, paradoxalement, elles semblent satisfaites.

(...) Dans ce contexte, le révisionnisme historique joue un rôle décisif: il protège la race blanche du métissage et s'oppose au chantage des organisations extrémistes juives.

(...) Poursuivi pour révisionnisme, je répète: le chiffre de six millions est impossible, je ne crois pas aux chambres à gaz, faute de preuves. Mon procès est un procès politique, le jugement dépend uniquement de l'opportunité du moment. Préférant obéir à ma conscience qu'à une loi immorale et criminelle, je persiste et signe. Vive le révisionnisme !"

(…)

D.- Gaston-Armand Amaudruz forme un pourvoi en nullité contre l'arrêt du 20 novembre 2000 et conclut à son annulation.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

(…)

2.- Le recourant estime que les trois articles pour lesquels il a été condamné ne tombent pas sous le coup de l'art. 261bis al. 1, 2 et 4 CP.

(…)

d)

(…)

aa) Selon la jurisprudence, l'art. 261bis CP, qui est classé parmi les infractions contre la paix publique, protège essentiellement la dignité de l'homme en tant que membre d'une race, d'une ethnie ou d'une religion. Dans ce contexte, conformément à la volonté du législateur, les trois premiers alinéas de l'art. 261bis CP visent plus précisément à combattre la haine raciale et l'alinéa 4 à interdire les atteintes discriminatoires

(…)

bb) S'agissant des articles écrits et publiés par le recourant, il ne fait aucun doute que leur contenu va au-delà de la mise en doute du nombre de victimes de l'holocauste et de la négation de l'existence des chambres à gaz. L'alinéa 4 in fine de l'art. 261bis CP ne couvre donc pas les textes incriminés sous tous leurs aspects.

Dans les articles incriminés, le recourant reproche aux extrémistes juifs d'imposer par des lois aux non-Juifs la foi en l'holocauste, d'avoir des exigences insatiables et d'imposer aux autres peuples des revendications de toutes sortes, de pratiquer un chantage fondé sur "l'holocauste des six millions", de s'acharner à détruire la race blanche et de vouloir affaiblir les goyim (nom donné par les Israélites aux personnes étrangères à leur culte, Petit Robert 1990) par métissage pour mieux les dominer. En outre, les articles du recourant prônent la pureté de la race blanche et qualifient le métissage de crime. Le recourant y affirme que l'art. 261bis CP rend impossible d'enrayer l'immigration de couleur, pousse au génocide par métissage de la race blanche et que dans ce contexte, le révisionnisme historique joue un rôle décisif car il protège la race blanche du métissage et s'oppose au chantage des organisations extrémistes juives.

En considérant que les propos du recourant réalisaient objectivement les hypothèses prévues aux alinéas 1, 2 et 4 1ère phrase de l'art. 261bis CP, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral.

Sur le plan subjectif, ces hypothèses exigent que l'auteur ait agi ainsi en raison de l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse du groupe de personnes visé. Tel est le cas en l'espèce puisque l'arrêt attaqué constate que le recourant a agi pour des mobiles racistes et antisémites.

(...)

e) Il résulte de ce qui précède que la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en appliquant l'art. 261bis al. 1, 2 et 4 CP aux trois articles écrits et publiés par le recourant en mars et juillet 1995 ainsi qu'en avril 2000.

(...)

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. a) En ce qui concerne l'action pénale, rejette le pourvoi dans la mesure où il est recevable.

(…)

Publié par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2001.html

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2001.html

Négationnisme – Discrimination - condamnation

Arrêt de la Cour de cassation du 3 novembre 1999 - ATF 126 IV 20

Faits:

A (...)

a) X. a envoyé à diverses personnes une cinquantaine de bulletins de commande du rapport Rudolf - un rapport établi en 1993 par le chimiste Germar Rudolf, dans lequel ce dernier tentait, par des analyses chimiques, de nier ou du moins de relativiser l'utilisation de Zyklon B dans les chambres à gaz d'Auschwitz -, en y joignant un document intitulé "Holocauste & révisionnisme, 33 questions et réponses. Ce que vous aviez peut-être toujours désiré savoir, mais que les médias taisent unanimement" (ci-après: "Holocauste et révisionnisme"). Dans ce document, il niait qu'un plan ait existé ou ait été exécuté pour la mise à mort de qui que ce soit en raison de sa race, affirmant que ni les Juifs ni les Tsiganes n'avaient été systématiquement exterminés et qu'il n'existait pas un seul ordre écrit d'extermination des Juifs; il y soutenait également que le camp d'Auschwitz faisait partie d'un vaste complexe industriel, où les principales causes de décès étaient les épidémies de typhus, les conditions de vie terribles et le traitement souvent barbare des détenus.

b) X. a rédigé, signé et affiché une centaine de fois en Suisse romande - à un moment où des débats avaient lieu en Suisse au sujet des fonds juifs - un texte intitulé "Pour la liberté d'expression et d'information" (ci-après: "Pour la liberté d'expression"). Il s'y insurgeait contre le fait que l'art. 261bis CP réprime seulement "ceux qui osent mettre en doute l'existence de certains crimes commis contre l'humanité", ajoutant "Mais le crime en question a-t-il été réellement perpétré? C'est la question que l'on est en droit de se poser en prenant connaissance de certains documents, comme le livre de Roger Garaudy, "Les Mythes fondateurs de la politique israélienne", ou le trop confidentiel Rapport Rudolf de l'Institut Max Planck, des documents que l'on cherche à interdire faute de pouvoir les réfuter".

c) X. a confectionné et placardé en divers endroits de Suisse romande une centaine d'affiches reproduisant la phrase, extraite du livre "Le paradoxe juif" de Nahum Goldmann, ancien président du Congrès juif mondial, "La vie juive est composée de deux éléments: ramasser de l'argent et protester" (ci-après: citation de Goldmann).

(...)

Considérant en droit

(...)

1.c) (...) Selon la jurisprudence, l'art. 261 bis CP, qui est classé parmi les infractions contre la paix publique, protège essentiellement la dignité de l'homme en tant que membre d'une race, d'une ethnie ou d'une religion (...). Dans ce contexte, conformément à la volonté du législateur, les trois premiers alinéas de l'art. 261bis CP visent plus précisément à combattre la haine raciale et l'alinéa 4 à interdire les atteintes discriminatoires (...). S'agissant de cette dernière disposition, le législateur a voulu mentionner spécifiquement le comportement consistant à nier, minimiser grossièrement ou tenter de justifier un génocide, qui est traité de manière indépendante à l'alinéa 4 2ème phrase de l'art. 261bis CP (...). Les al. 1 à 3 de l'art. 261bis CP ne visent que l'agitation raciale; il s'agit d'appels qui s'adressent à un nombre indéterminé de personnes, mais qui peuvent avoir pour but l'excitation publique envers une ou plusieurs personnes. L'al. 4 concerne de véritables attaques ayant pour motif la discrimination raciale (...) et qui sont donc dirigées directement contre un ou plusieurs membres du groupe visé. Contrairement aux al. 1 à 3, l'al. 4 n'est pas de nature idéale, mais réelle (...); il ne s'agit donc pas d'exciter un nombre indéterminé de personnes, mais de s'en prendre à un ou plusieurs membres d'un groupe parce qu'ils appartiennent à ce groupe; ainsi, le comportement de l'auteur vise à attaquer tel Juif ou les Juifs parce qu'ils sont Juifs, en les traitant de manipulateurs, de personnes programmées pour s'accaparer tout ce qu'ils peuvent, etc. Le législateur a fait figurer le révisionnisme à l'al. 4 2ème phrase et l'a donc en principe considéré, non pas comme un acte d'agitation raciale ou d'excitation publique (al. 1 à 3), mais comme une atteinte directe contre les personnes d'origine juive (...). Tant à l'al. 4 qu'aux al. 1 à 3 de l'art. 261bis CP, l'auteur doit agir publiquement, c'est-à-dire s'adresser à un large cercle de destinataires (...) Ainsi, le seul fait que l'auteur se soit adressé à des tiers, et non aux personnes visées, ne suffit pas à exclure l'application de l'art. 261bis al. 4 CP. Il y a dès lors lieu d'examiner si les deux premiers comportements reprochés au recourant remplissent les conditions de cette disposition et ce qu'il en est de son troisième comportement.

1.d) S'agissant du document "Holocauste et révisionnisme", il a été retenu que le recourant l'a envoyé, en le joignant à une cinquantaine de bulletins de commande du rapport Rudolf, à diverses personnes; peut-être ne l'avait-il adressé qu'à des connaissances et à des personnes montrant de l'intérêt pour les thèses qui y sont soutenues; toutefois, le risque existait que ce document soit encore multiplié par les destinataires et soit ainsi propagé au-delà de ce groupe. Le document en question a donc été adressé à plusieurs dizaines de personnes et pouvait encore en atteindre de nombreuses autres, de sorte que le recourant a agi publiquement.

Dans ce document, le recourant nie qu'un plan ait existé ou ait été exécuté pour la mise à mort de qui que ce soit en raison de sa race, affirmant que ni les Juifs ni les Tsiganes n'ont été systématiquement exterminés et qu'il n'existe pas un seul ordre écrit d'extermination des Juifs; il y soutient également que le camp d'Auschwitz faisait partie d'un vaste complexe industriel, où les principales causes de décès étaient les épidémies de typhus, les conditions de vie terribles et le traitement souvent barbare des détenus. Il n'est dès lors pas douteux que ce document nie ou, à tout le moins, minimise grossièrement le génocide des Juifs, groupe de personnes auquel le recourant s'en prend directement en raison de l'appartenance de ses membres à la religion juive (...).

Ainsi, s'agissant du premier comportement reproché au recourant, les conditions de l'art. 261bis al. 4 2ème phrase CP sont réalisées.

1.e) Le recourant a rédigé, signé et affiché une centaine de fois un peu partout en Suisse romande - à un moment où des débats avaient lieu en Suisse au sujet des fonds juifs - le texte "Pour laliberté d'expression". Dans ce texte, il s'insurge contre le fait que l'art. 261bis CP réprime seulement "ceux qui osent mettre en doute l'existence de certains crimes commis contre l'humanité" et ajoute: "Mais le crime en question a-t-il été réellement perpétré? C'est la question que l'on est en droit de se

poser en prenant connaissance de certains documents, comme le livre de Roger Garaudy, "Les Mythes fondateurs de la politique israélienne", ou le trop confidentiel Rapport Rudolf de l'Institut Max Planck, des documents que l'on cherche à interdire faute de pouvoir les réfuter".

Il n'est pas contestable que, par le nombre d'affiches et de personnes pouvant prendre connaissance de chacune d'elles, le recourant, dans ce cas aussi, a agi publiquement.

Il objecte en vain que son texte est formulé de manière interrogative et ne constitue qu'une mise en doute, et non pas une négation, d'un génocide. Même s'il l'a fait sous une forme interrogative, qui appelle d'ailleurs une réponse univoque, il n'a en réalité pas simplement posé une question, mais a nié que le "crime en question" ait pu être perpétré. Au demeurant, dans un autre contexte, la jurisprudence a admis que mettre en doute l'existence des chambres à gaz revient à contester les crimes commis par le régime nazi, en particulier l'extermination systématique des Juifs dans des chambres à gaz (...). Le texte en cause, nonobstant le recours à une formulation interrogative, revient donc bien à nier l'holocauste dont ont été victimes les Juifs, groupe de personnes auquel le recourant s'en est pris directement en raison de l'appartenance de ses membres à la religion juive. La référence explicite à l'ouvrage de Garaudy et au rapport Rudolf ne fait que le confirmer (...).

Selon l'arrêt attaqué, le recourant a affiché le texte litigieux au moment où était débattue en Suisse "l'affaire des fonds juifs", utilisant ce contexte pour alimenter un antisémitisme résurgent et gagner à sa cause l'opinion d'une population fragilisée par cette révision de son passé. Il a donc bien agi pour des motifs racistes, de sorte que la question de savoir si l'auteur doit avoir été mû par de tels motifs importe peu (...).

Les conditions de l'art. 261bis al. 4 2ème phrase CP sont donc également réalisées en ce qui concerne le second comportement reproché au recourant.

1.f) Le recourant a encore confectionné et placardé en divers endroits de Suisse romande une centaine d'affiches reproduisant la phrase, extraite du livre "Le paradoxe juif" de Nahum Goldmann, ancien président du Congrès juif mondial, "La vie juive est composée de deux éléments: ramasser de l'argent et protester".Pour les mêmes motifs que dans le cas précédent, il n'est pas douteux que le recourant a agi publiquement.

L'arrêt attaqué retient - ce qui relève du fait et lie donc la Cour de céans (...) - que le recourant voulait tirer profit des relents d'antisémitisme suscités dans le pays par "l'affaire des fonds juifs". Le recourant n'entendait donc pas simplement retransmettre des propos d'autrui, mais, par l'exploitation de clichés à partir d'une phrase sortie de son contexte, dénigrer les Juifs, en les faisant notamment apparaître, parce qu'ils sont Juifs, comme foncièrement avides d'argent et n'ayant pas d'autre but dans la vie que d'en "ramasser". Le message ainsi délivré était propre à faire apparaître le groupe visé comme de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine et à le rabaisser (...). Contrairement à ce qu'ont retenu les juges cantonaux, on ne saurait toutefois dire que la phrase litigieuse pouvait aller jusqu'à susciter la haine, soit une aversion telle qu'elle pousse à vouloir le mal à quelqu'un ou à se réjouir du mal qui lui arrive; elle était en revanche de nature à abaisser les Juifs. En outre, même si le recourant s'adressait à des tiers, il s'en prenait directement au groupe visé, en raison de son appartenance à la religion juive.

C'est donc à tort que l'autorité cantonale a considéré que l'art. 261bis al. 1 CP était applicable au comportement en cause, lequel remplit en revanche les conditions de l'art. 261bis al. 4 1ère phrase CP.

1.g) (...) L'arrêt attaqué condamne en effet le recourant pour discrimination raciale, infraction réprimée par l'art. 261bis CP; que les actes du recourant tombent sous le coup de l'al. 4, et non de l'al. 1, de cette disposition, il ne s'en est pas moins rendu coupable de l'infraction retenue, de sorte que le verdict de culpabilité demeure inchangé. Les différents comportements réprimés par l'art. 261bis CP sont par ailleurs passibles de la même peine (art. 261bis al. 6 CP); le recourant ne remet du reste pas en cause celle qui lui a été infligée en première instance et que la cour cantonale, tout en s'écartant sur deux points de la qualification juridique des premiers juges, n'a pas modifiée.

Le pourvoi doit par conséquent être rejeté en tant que le recourant conteste sa condamnation pour discrimination raciale.

Publié par le Tribunal fédéral:

http://relevancy.bger.ch/cgi-bin/JumpCG ... r&zoom=OUT

Négationnisme - discrimination - commission sous couvert de la critique d'un jugement et de la loi

condamnation

Arrêt de la Ire Cour de droit public du 19 août 2003 - ATF 1P.297/2003

Faits:

A. (...)

En juin 2000, la revue « Z.________ » a publié une critique du jugement du 10 avril 2000, en reproduisant textuellement les trois articles qui avaient donné lieu au verdict de condamnation. En août 2000, l'association Y.________ a diffusé une brochure intitulée « Le procès X.________: une parodie de justice », qui contient les textes incriminés. A raison de ces publications, une nouvelle procédure pénale pour violation de l'art. 261bis CP a été ouverte notamment à l'encontre de X.________.Le 22 mai 2002, le Tribunal pénal de la Veveyse a reconnu X.________ coupable de discrimination raciale et l'a condamné à la peine de trois mois d'emprisonnement, complémentaire à celle infligée le 20 novembre 2001. Par arrêt du 27 mars 2003, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg a rejeté l'appel formé par X.________ contre le jugement du 22 mai 2002, qu'elle a confirmé pour ce qui le concerne.

(...)

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1. (...)

En l'occurrence, la cour cantonale a retenu que sous couvert de la critique de l'art. 261bis CP et du jugement du 10 avril 2000, le recourant avait saisi l'occasion d'une nouvelle diffusion d'idées antisémites et négationnistes illicites. Le recourant conteste cette appréciation, en faisant valoir qu'il s'est placé uniquement sur le terrain de la défense de la liberté d'expression. Les trois articles incriminés auraient servi d'appui à sa thèse que l'art. 261bis CP, dont il postule l'abrogation, serait incompatible avec la Constitution et inapplicable à son cas. La reproduction de ces textes aurait tout au plus aidé à la démonstration d'une opinion, ce qui exclurait toute intention délictuelle. Ce grief qui a trait à la constatation des faits est recevable dans le cadre du recours de droit public.

2. Le recourant prétend que les propos à raison desquels il a été condamné n'ont pas été diffusés dans une intention délictuelle, mais uniquement pour les besoins de la démonstration de sa cause. Tous les griefs qu'il soulève se confondent avec cet argument, qu'ils soient tirés de l'art. 9 Cst. ou des art. 10 et 17 CEDH.

Si l'on veut soutenir, comme le fait le recourant, que l'art. 261bis CP constituerait une norme incompatible avec la liberté d'expression ou de la liberté des médias, parce qu'elle empêcherait la libre diffusion des opinions, il n'est pas indispensable pour cela de publier dans leur intégralité des textes qui tombent sous le coup de la disposition que l'on critique. A cet égard, la reproduction délibérée d'articles dont l'auteur et l'éditeur savent qu'ils violent la loi peut être tenue sans arbitraire comme une forme de récidive condamnable. Le recourant ne saurait prétendre avoir distingué à ce propos ce qui relève de la démonstration et de la citation.

Les brochures en question ne font aucune distinction de cette sorte, dans leur texte même ou dans leur présentation, ni aucune réserve quant au fait que leur auteur tient pour vraies les affirmations contenues dans les trois articles litigieux. Ceux-ci ne sont pas cités comme des exemples, ni des illustrations d'un point de vue déterminé. De leur lecture, il ressort clairement que, selon l'auteur, les jugements prononcés en application de l'art. 261bis CP sont illégitimes uniquement parce qu'il serait faux d'affirmer que six millions de juifs ont péri dans les camps d'extermination nazis. Sur cette base, les autorités cantonales pouvaient sans arbitraire tenir pour réalisée l'intention délictuelle reprochée au recourant.

(...)

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. Le recours est rejeté.

Diffusé par le Tribunal fédéral:

Accessible sous

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _2003.html

Négationnisme - discrimination - à l'encontre du peuple tibétain - classement

L'accusé, un Chinois vivant en Suisse, a été dénoncé pour négationnisme en relation avec une diffusion de brochures qui qualifiaient l'occupation chinoise du Tibet d'une "libération paisible" et "démocratisation". Les propos étaient également accessibles sur son site internet.

L'autorité considéra que les publications de l'accusé relevaient de la négation, minimisation grossière ou justification des actes chinois au Tibet qui constituent de graves violations des droits fondamentaux à l'encontre du peuple tibétain. Ainsi ces publications remplissent les conditions de la disposition pénale. Toutefois, considérant que l'accusé chinois avait passé la majeure partie de sa vie en Chine où il n'a jamais pu être confronté à la critique contre la politique chinoise au Tibet et qu'il n'a pas eu l'occasion durant son séjours en Suisse d'être confronté à une telle critique, il n'a pas pu être établi que l'accusé avait été motivé par une volonté attentatoire.

Décision publiée par la Commission fédérale contre la racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=2003-2

Négationnisme - négation de génocide et/ou justification de crimes contre l'humanité - admission judiciaire de l'existence d'un consensus sur le caractère génocidaire d'un évènement historique (génocide arménien) - condamnation

ATF 6B.398/2007 du 12 décembre 2007 (Cour de droit pénal), extraits des consid. 3 à 7

3. En substance, le recourant reproche aux deux autorités cantonales, que ce soit sous l'angle de l'application de l'art. 261bis al. 4 CP ou de la violation des droits fondamentaux qu'il invoque, de n'avoir pas procédé à une instruction suffisante en ce qui concerne l'existence des circonstances de fait permettant de qualifier de génocide les événements de 1915.

L'interprétation du droit de fond détermine les constatations de fait pertinentes. Il convient d'examiner tout d'abord le champ d'application et la portée de l'art. 261bis al. 4 CP.

3.1 L'art. 261bis al. 4 CP réprime le comportement de celui qui aura publiquement, par la parole, l'écriture, l'image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaissé ou discriminé d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion ou qui, pour la même raison, niera, minimisera grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d'autres crimes contre l'humanité. Dans une première approche littérale et grammaticale, on peut constater que la formulation de la loi (par l'utilisation de l'article indéfini « un génocide »), ne fait expressément référence à aucun événement historique précis. La loi n'exclut donc pas la répression de la négation d'autres génocides que celui commis par le régime nazi; elle ne qualifie pas non plus expressément la négation du génocide arménien au plan pénal comme acte de discrimination raciale.

(...)

3.4.1 La volonté de combattre les opinions négationnistes et révisionnistes en relation avec l'holocauste a certes constitué un élément central dans l'élaboration de l'art. 261bis al. 4 CP. Dans sa jurisprudence, le Tribunal fédéral a cependant jugé que la négation de l'holocauste réalise objectivement l'état de fait incriminé par l'art. 261bis al. 4 CP parce qu'il s'agit d'un fait historique généralement reconnu comme établi (...), sans qu'il ait été fait référence dans cet arrêt à la volonté historique du législateur. Dans le même sens, de nombreux auteurs y voient un fait notoire pour l'autorité pénale (...)

3.4.2 La démarche consistant à rechercher quels génocides le législateur avait en vue lors de l'édiction de la norme se heurte par ailleurs déjà à l'interprétation littérale (v. supra consid. 3.1), qui démontre clairement la volonté du législateur de privilégier sur ce point une formulation ouverte de la loi, par opposition à la technique des lois dites « mémorielles » adoptées notamment en France (loi n° 90-615 du 13 juillet 1990, dite loi Gayssot; loi nº 2001-434 du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité, dite Loi Taubira; loi n°2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915). (...)

3.4.3 Doctrine et jurisprudence ont, par ailleurs, déduit du caractère notoire, incontestable ou indiscutable de l'holocauste qu'il n'a plus à être prouvé dans le procès pénal (...). Les tribunaux n'ont donc pas à recourir aux travaux d'historiens sur ce point (...). Le fondement ainsi déterminé de l'incrimination de la négation de l'holocauste dicte, en conséquence également, la méthode qui s'impose au juge lorsqu'il s'agit de la négation d'autres génocides. La première question qui se pose dès lors est de savoir s'il existe un consensus comparable en ce qui concerne les faits niés par le recourant.

4. La question ainsi posée relève du fait. Elle porte moins directement sur la qualification comme génocide des massacres et déportations imputés à l'Empire ottoman que sur l'appréciation portée généralement sur cette qualification, dans le public et au sein de la communauté des historiens. C'est ainsi qu'il faut comprendre la démarche adoptée par le tribunal de police, qui a souligné qu'il ne lui incombait pas de faire l'histoire, mais de rechercher si ce génocide est « connu et reconnu », voire « avéré » (jugement, consid. II, p. 14) avant d'acquérir sa conviction sur ce dernier point de fait (jugement, consid. II, p. 17), qui fait partie intégrante de l'arrêt cantonal (arrêt cantonal, consid. B p. 2).

(...).

4.2 En ce qui concerne le point de fait déterminant, le tribunal de police a fondé sa conviction non seulement sur l'existence de déclarations de reconnaissance politiques, mais il a également souligné que la conviction des autorités dont elles émanent a été forgée sur la base de l'avis d'experts (notamment un collège d'une centaine d'historiens en ce qui concerne l'Assemblée nationale française lors de l'adoption de la loi du 29 janvier 2001) ou de rapports qualifiés de fortement argumentés et documentés (Parlement européen). Aussi, en plus de s'appuyer sur l'existence de reconnaissances politiques, cette argumentation constate, dans les faits, l'existence d'un large consensus de la communauté, que traduisent les déclarations politiques, et qui repose lui-même sur un large consensus scientifique sur la qualification des faits de 1915 comme génocide. On peut y ajouter, dans le même sens, que lors du débat qui a conduit le Conseil national à reconnaître officiellement le génocide arménien, il a été fait référence aux travaux de recherche internationaux publiés sous le titre « Der Völkermord an den Armeniern und die Shoah » (...). Enfin, le génocide arménien constitue l'un des exemples présentés comme « classiques » dans la littérature générale consacrée au droit pénal international, respectivement à la recherche sur les génocides (...).

4.3 Dans la mesure où l'argumentation du recourant tend à contester l'existence d'un génocide ou la qualification juridique des événements de 1915 comme génocide - notamment en soulignant l'absence de jugement émanant d'un tribunal international ou de commissions spécialisées, respectivement l'absence de preuves irréfutables établissant que les faits correspondants aux conditions objectives et subjectives posées par l'art. 264 CP ou à celles de la Convention ONU de 1948, en soutenant qu'il n'y aurait en l'état que trois génocides internationalement reconnus -, elle est sans pertinence pour la solution du litige, dès lors qu'il s'agit de déterminer tout d'abord s'il existe un consensus général, historique en particulier, suffisant pour exclure du débat pénal sur l'application de l'art. 261bis al. 4 CP le débat historique de fond sur la qualification des événements de 1915 comme génocide. Il en va de même en tant que le recourant reproche à la cour cantonale d'être tombée dans l'arbitraire en n'examinant pas les moyens de nullité soulevés dans le recours cantonal, en relation avec les mêmes faits et les mesures d'instruction qu'il avait requises. Il n'y a donc lieu d'examiner son argumentation qu'en tant qu'elle porte spécifiquement sur la constatation de ce consensus.

4.4 Le recourant relève qu'il a requis que l'instruction soit complétée quant à l'état actuel des recherches et la position actuelle des historiens dans le monde sur la question arménienne. Il ressort également ça et là de ses écritures qu'il considère qu'il n'y a pas d'unanimité ou de consensus des Etats, d'une part, et des historiens, d'autre part, quant à la qualification des faits de 1915 comme génocide. Son argumentation s'épuise cependant à opposer sa propre conviction à celle de l'autorité cantonale. Il ne cite, en particulier, aucun élément précis qui démontrerait l'inexistence du consensus constaté par le tribunal de police, moins encore qui démontrerait l'arbitraire de cette constatation.

Le recourant indique certes que nombre d'Etats ont refusé de reconnaître l'existence d'un génocide arménien. Il convient cependant de rappeler, sur ce point, que même la résolution 61/L.53 de l'ONU votée en janvier 2007 et condamnant la négation de l'holocauste n'a réunit que 103 voix parmi les 192 Etats membres. Le seul constat que certains Etats refusent de déclarer sur la scène internationale qu'ils condamnent la négation de l'holocauste, ne suffit de toute évidence pas à remettre en cause l'existence d'un consensus très général sur le caractère génocidaire de ces actes. Consensus ne signifie pas unanimité. Le choix de certains Etats de ne pas condamner publiquement l'existence d'un génocide ou de ne pas adhérer à une résolution condamnant la négation d'un génocide peut être dicté par des considérations politiques sans relations directes avec l'appréciation réelle portée par ces Etats sur la manière dont les faits historiques doivent être qualifiés et ne permet pas, en particulier, de remettre en question l'existence d'un consensus sur ce point, notamment au sein de la communauté scientifique.

(...)

4.6 Cela étant, le recourant ne démontre pas en quoi le tribunal de police serait tombé dans l'arbitraire en constatant qu'il existe un consensus général, scientifique notamment, sur la qualification des faits de 1915 comme génocide. Il s'ensuit que les autorités cantonales ont, à juste titre, refusé de souscrire à la démarche du recourant tendant à ouvrir un débat historico-juridique sur ce point.

5. Au plan subjectif, l'infraction sanctionnée par l'art. 261bis al. 1 et 4 CP suppose un comportement intentionnel. (...)

5.1 En ce qui concerne l'intention, le tribunal correctionnel a retenu que X.________, docteur en droit, politicien, soi-disant écrivain et historien, avait agi en toute connaissance de cause, déclarant qu'il ne changerait jamais de position, même si une commission neutre affirmait un jour que le génocide des Arméniens a bel et bien existé. Ces constatations de la volonté interne du recourant de nier un génocide relèvent du fait (...), si bien que le Tribunal fédéral est lié sur ce point (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne formule d'ailleurs aucun grief à ce propos. Il ne tente pas de démontrer que ces constatations de fait seraient arbitraires ou procéderaient d'une violation de ses droits de niveau constitutionnel ou conventionnel, si bien qu'il n'y a pas lieu d'examiner cette question (art. 106 al. 2 LTF). On ne voit pas, pour le surplus, que les autorités cantonales, qui ont déduit l'intention du recourant d'éléments extérieurs (...) auraient méconnu sur ce point la notion même d'intention du droit fédéral.

5.2 Quant aux mobiles du recourant, le Tribunal correctionnel a retenu qu'ils s'apparentaient à des mobiles racistes et nationalistes et ne relevaient pas du débat historique, en soulignant en particulier qu'il décrivait les Arméniens comme étant les agresseurs du peuple turc et qu'il se réclamait lui-même de Talak Pacha, qui fut historiquement, avec ses deux frères, l'initiateur, l'instigateur et le moteur du génocide des Arméniens (jugement, consid. II, p. 17 s.).

Il n'est pas contesté en l'espèce que la communauté arménienne constitue un peuple, soit tout au moins une ethnie (...), qui se reconnaît en particulier dans son histoire marquée par les événements de 1915. Il s'ensuit que la négation du génocide arménien - respectivement la représentation prônée par le recourant du peuple arménien comme agresseur - constitue déjà une atteinte à l'identité des membres de cette communauté (...). Le Tribunal correctionnel, qui a retenu l'existence de mobiles s'apparentant au racisme a, par ailleurs, exclu que la démarche du recourant ressortît au débat historique. Ces constatations de fait, au sujet desquelles le recourant n'élève aucun grief (art. 106 al. 2 LTF) lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF). Elles démontrent suffisamment l'existence de mobiles qui, en plus du nationalisme, ne peuvent relever que de la discrimination raciale, respectivement ethnique. Il n'est dès lors pas nécessaire de trancher en l'espèce le débat doctrinal évoqué au consid. 6 ci-dessus. Pour le surplus, le recourant n'élève non plus aucun grief relatif à l'application du droit fédéral sur ce point.

6. Le recourant invoque encore la liberté d'expression garantie par l'art. 10 CEDH, en relation avec l'interprétation donnée par les autorités cantonales à l'art. 261bis al. 4 CP.

Il ressort cependant des procès-verbaux d'audition du recourant par le Ministère public de Winterthur/Unterland (23 juillet 2005), qu'en s'exprimant en public, à Glattbrugg notamment, le recourant entendait « aider le peuple suisse et le Conseil national à corriger l'erreur » (ndr: la reconnaissance du génocide arménien). Il connaissait par ailleurs l'existence de la norme sanctionnant la négation d'un génocide et a déclaré qu'il ne changerait jamais de position, même si une commission neutre affirmait un jour que le génocide des Arméniens a bel et bien existé (jugement, consid. II, p. 17). On peut déduire de ces éléments que le recourant n'ignorait pas qu'en qualifiant le génocide arménien de « mensonge international » et en déniant explicitement aux faits de 1915 la qualification de génocide, il s'exposait en Suisse à une sanction pénale. Le recourant ne peut dès lors rien déduire en sa faveur de l'absence de prévisibilité de la loi qu'il invoque. Ces éléments permettent en outre de retenir que le recourant tente essentiellement, par une démarche de provocation, d'obtenir des autorités judiciaires suisses une confirmation de ses thèses, au détriment des membres de la communauté arménienne, pour lesquels cette question joue un rôle identitaire central. La condamnation du recourant tend ainsi à protéger la dignité humaine des membres de la communauté arménienne, qui se reconnaissent dans la mémoire du génocide de 1915. La répression de la négation d'un génocide constitue enfin une mesure de prévention des génocides au sens de l'art. I de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide conclue à New-York le 9 décembre 1948, approuvée par l'Assemblée fédérale le 9 mars 2000 (...).

7. On doit, au demeurant constater que le recourant ne conteste l'existence ni des massacres ni des déportations (...), que l'on ne peut qualifier, même en faisant preuve de réserve, que comme des crimes contre l'humanité (...). Or, la justification de tels crimes, fût-ce au nom du droit de la guerre ou de prétendues raisons sécuritaires, tombe déjà sous le coup de l'art. 261bis al. 4 CP, si bien que même considérée sous cet angle et indépendamment de la qualification de ces mêmes faits comme génocide, la condamnation du recourant en application de l'art. 261bis al. 4 CP n'apparaît pas arbitraire dans son résultat, pas plus qu'elle ne viole le droit fédéral.

Publié par le Tribunal fédéral:

http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI? ... B_398/2007

Décision de première instance (confirmée):

http://www.aga-online.org/downloads/de/ ... 007_fr.pdf

Incitation à la haine raciale sur un forum Internet - condamnation judiciaire passée en force

L'accusé avait tenu des propos discriminatoires vis à vis des musulmans sur un forum internet. Les propos étaient restés accessibles pendant quatre jours. L'accusé a fait l'objet d'une condamnation.

Décision publiée par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetails.php?id=2003-31

Incitation à la haine raciale - condamnation judiciaire passée en force

L'accusé avait conclu un abonnement Internet auprès d'un fournisseur d'accès. Par ce biais, il avait eu accès à des " newsgroups " et il s'était dès lors abonné à deux de ces " newsgroups " dont le contenu était l'actualité suisse en général. Un des sujets présentés et non créés par l'accusé sur les deux " newsgroups " précités était le suivant: " Albanais KOSOVO : Italie = 0, France = 0, Suisse = 190'000 + 50'000 ! "

En avril 1999, l'accusé avait composé le texte suivant: " tout à fait d'accord on en a plein le c... de tous ces réfugiés qui se pavanent chez nous A eux, tout leur est donné, ils sont payés pour rien faire, alors que nous, pauvres cons de Suisses, devant survivre tant bien que mal Essayez d'aller au service social pour demander quelque chose pour vous. Vous n'aurez rien. Alors que ces pourris ont tout ce qu'ils veulent. Il faut que cela cesse. Y'en a marre de tout ces yougos qui profitent. Renvoyez-les faire la guerre dans leur pays, ces lâches... " (p. 1 s.)

L'autorité de poursuite considère que l'accusé a objectivement contrevenu à la prescription de l'art. 261bis al. 1 CP, en exprimant des propos discriminatoires à l'encontre des Yougoslaves et en recourant à un support informatique (Internet) qui était propre à assurer une large diffusion des idées exprimées.

Publié par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=1999-45

Discrimination raciale - Relaxe

Le président du Parti de la liberté et municipal biennois... réclamait le renvoi immédiat des Kosovars – alors au bénéfice d’une prolongation de leur statut d’admission provisoire collective –, en raison du taux de criminalité anormalement élevé constaté, en Suisse, dans ce groupe de population... S’inspirant explicitement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, les juges observent qu’il est essentiel pour le bon fonctionnement d’une démocratie que puissent s’exprimer aussi des opinions qui «dérangent la majorité» et qui paraissent «choquantes aux yeux de beaucoup»... En rappelant que les Albanais du Kosovo occupent une part proportionnellement élevée dans les statistiques de la criminalité, le texte ne sous-entend pas que tous les Kosovars sont des délinquants... la part importante prise par ceux-ci dans certains secteurs de la criminalité en Suisse est régulièrement relevée dans les rapports officiels. Il ne saurait être question d’accuser de discrimination raciale ceux qui relatent ce fait, «même s’il devait en résulter un climat hostile à l’égard du groupe concerné». Quant au renvoi des Kosovars préconisé par Jürg Scherrer, il n’équivaut pas à leur nier les droits fondamentaux dont dispose tout étranger, ni à les traiter en êtres humains de seconde zone. Le Conseil fédéral avait expressément exclu du bénéfice de l’admission provisoire les Kosovars mettant en péril la sécurité publique, remarquent les juges, de sorte que les revendications du Parti de la liberté tombaient en bonne partie à plat. Les simplifications sont toutefois courantes dans le débat politique, et l’intention est claire pour le «lecteur moyen»: la politique du Conseil fédéral est trop libérale...

in: Altermedia Suisse

http://ch.altermedia.info/suisse/le-tri ... _1087.html

Décision publiée par le Tribunal fédéral

http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI? ... 6S.64/2004

Discrimination raciale propos tenus sous couvert d'un pseudonyme, sur un site étranger - Condamnation

L'accusé a été condamné pour avoir diffusé sur un Chat Internet des propos antisémites. Il s'exprimait sous couvert d'un pseudonyme.

Publié par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=2003-13

L'accusé résidant Suisse a été condamné pour avoir diffusé des propos antisémites et justifié/propagé une idéologie raciste (invitant à la lecture de "Mein Kampf" dont le contenu serait "toujours d'actualité"). Il s'exprimait sur le site Internet d'un Britannique.

Publié par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=2002-22

Racisme anti-blancs, anti-Suisses - condamnation

L'accusé est venu en Suisse comme requérant d'asile en 1996. Il est accusé de vol, injure, menaces, violation de domicile et discrimination raciale.

En mai 1997, alors qu'il avait déjà été averti oralement et par écrit pour des raisons disciplinaires, l'accusé s'est vu signifier une interdiction de pénétrer dans le Centre d'accueil où il était logé. Il a refusé de signer le document qui lui était présenté à cet égard, a traité le personnel du Centre de " Sales blancs ", puis a menacé de mort les moniteurs.

La 1ère instance condamne l'accusé pour discrimination raciale au sens de l'art. 261bis CP (qualification qui fait tomber celle d'injure), pour vol et violation de domicile.

Publié par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=1999-21

L'accusé a été condamné pour insultes racistes "merdeux de Suisses" et "Suisse de merde". Les Suisses forment un groupe de personnes protégé par la norme anti-raciste. Le dénigrement par des termes fécaux est particulièrement attentatoire à la dignité humaine.

Publié par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=2000-14

Propos discriminatoires et négationnistes - condamnation judiciaire passée en force

L'accusé avait été condamné pour avoir tenu des propos discriminatoires et négationnistes dans un journal gratuit diffusé dans deux communes.

La publication contenait une affirmation relevant de la discrimination raciale, soit qu'il n'y aurait pas de place pour la "race juive" en Europe, ainsi qu'un propos négationniste (sous l'angle de la justification d'un génocide), soit l'attribution à Hitler du "mérite" d'avoir réussi à en convaincre l'humanité.

Décision publiée par la Commission fédérale contre le racisme:

http://www.edi-ekr.admin.ch/php/idetail.php?id=1998-37

Incitation à la haine ou discrimination raciale - définition jurisprudentielle

ATF 124 IV 121 du 30 avril 1998 (Cour de cass. pénale), consid. 2.b)

Il faut encore, selon l'art. 261bis al. 1 CP, que le message incite à la haine ou à la discrimination. Par inciter, il faut entendre le fait d'éveiller le sentiment de haine ou d'appeler à la discrimination (cf. ATF 123 IV 202 consid. 3b p. 207). La discrimination consiste à traiter injustement de façon moins favorable (REHBERG, op.cit., p. 184).

Le contenu que doit avoir le message n'est pas décrit plus précisément par l'art. 261bis al. 1 CP; il suffit qu'il soit propre à éveiller la haine ou à appeler à la discrimination. Les autres alinéas de l'art. 261bis CP, où l'on parle d'abaisser, de dénigrer, et de discriminer d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine, permettent de mieux cerner l'idée. N'importe quelle critique ou la constatation objective d'une différence ne suffisent pas; le message doit atteindre la personne dans sa dignité d'être humain, et ceci en raison de son appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Le message doit faire apparaître les personnes qui appartiennent à une race, une ethnie ou une religion comme étant de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine (TRECHSEL, op.cit., art. 261bis no 22; REHBERG, op.cit., p. 184; GUYAZ, L'incrimination de la discrimination raciale, Berne 1996, p. 255; NIGGLI, op.cit., no 767 et 769, p. 204 s.). Dans les cas extrêmes, il s'agit de dénier toute dignité humaine, voire même le droit à l'existence (REHBERG, op.cit., p. 184). Nier, minimiser grossièrement ou tenter de justifier un génocide est mentionné à l'art. 261bis al. 4 CP (STRATENWERTH, op.cit., no 37, p. 171; TRECHSEL, op.cit., art. 261bis no 35; REHBERG, op.cit., p. 187).

Publié par le Tribunal fédéral:

http://relevancy.bger.ch/cgi-bin/JumpCG ... r&zoom=OUT

La négation, minimisation ou justification de crimes contre l'humanité ou génocides clairement établis, en particulier l'holocauste, pour des motifs autres que discriminatoires est difficilement envisageable:

ATF 6S.420/1999 du 21 juin 2000 (Cour de cass. pénale), consid. 3.b)bb)

Der Gesetzgeber hält es somit für möglich, dass Völkermord und andere Verbrechen gegen die Menschlichkeit aus andern als aus diskriminierenden Gründen geleugnet, gröblich verharmlost oder zu rechtfertigen gesucht werden können.

Inwiefern solche andere Gründe in Bezug auf den rassistisch bzw. antisemitisch motivierten Völkermord an den Juden durch das nationalsozialistische Regime möglich seien, ist jedoch schwer vorstellbar. Insbesondere ist in Anbetracht der Beweislage kaum vorstellbar, inwiefern die Massenvernichtung von Juden durch Vergasung im Besonderen etwa aus wissenschaftlichen Gründen bestritten oder in Frage gestellt werden könnte. Wer die Massenvernichtung von Juden durch Vergasung bestreitet oder in Frage stellt, muss sich grundsätzlich, eben gerade weil er dies tut und dadurch die Juden in ihrer Menschenwürde trifft, den Vorwurf des Handelns aus rassendiskriminierenden bzw. antisemitischen Gründen gefallen lassen, und er kann sich nicht auf andere Beweggründe herausreden, auch nicht beispielsweise auf Profitgier oder Geltungssucht. Wer die Existenz von Gaskammern zur Massenvernichtung von Juden durch das nationalsozialistische Regime bestreitet, bringt damit zumindest implizit zum Ausdruck, dass dieses Regime nicht schlimmer gewesen sei als manches andere Regime auch, dass in Tat und Wahrheit viel weniger Menschen umgebracht worden seien als allgemein angenommen werde und dass die Gaskammern eine Erfindung seien, von welcher gerade auch die Juden heute profitieren wollten. Die Leugnung der Gaskammermorde ist denn auch unter anderem aus diesen Gründen zu einem Vehikel für extremistische antisemitische Strömungen geworden.

Ob ausnahmsweise Fälle denkbar sind, in denen die Existenz von Gaskammern zur Massenvernichtung von Juden durch das nationalsozialistische Regime nicht im Sinne von Art. 261bis Abs. 4 Hälfte 2 StGB "aus einem dieser Gründe", mithin nicht aus rassendiskriminierenden bzw. antisemitischen Gründen, bestritten wird, muss hier indessen nicht abschliessend entschieden werden.

Diffusé par le Tribunal fédéral:

http://www.polyreg.ch/bgeunpubliziert/J ... _1999.html

Discrimination - critique exprimée en relation avec une religion "Protégez vos enfants des prêtes catholiques pédophiles"

ATF 6S.148/2003 du 16 septembre 2003 (Cour de cass. pénale), consid. 2.1-2.6)

2.1 (...) Selon la jurisprudence, l'art. 261bis CP protège essentiellement la dignité de l'homme en tant que membre d'une race, d'une ethnie ou d'une religion (ATF 126 IV 20 consid. 1c p. 24). Classé parmi les infractions contre la paix publique, il protège aussi la paix publique, qui est menacée par des actes qui peuvent conduire à dresser des groupes humains les uns contre les autres (ATF 124 IV 121 consid. 2c p. 125; 123 IV 202 consid. 2 p. 206). Dans ce contexte, conformément à la volonté du législateur, les trois premiers alinéas de l'art. 261bis CP visent plus précisément à combattre la haine raciale et l'alinéa 4 à interdire les atteintes discriminatoires (ATF 126 IV 20 consid. 1c p. 24).

2.2 L'art. 261bis CP pourra entrer en conflit avec la liberté d'opinion, garantie par l'art. 16 Cst. et l'art. 10 CEDH. En principe, dans une démocratie, chacun a le droit d'exposer ses vues sur un sujet d'intérêt public, même si elles déplaisent à certains. La majorité ne peut prétendre réduire la minorité au silence (ATF 101 Ia 252 consid. 3c p. 258 ). A l'instar des autres droits fondamentaux, la liberté d'opinion n'a toutefois pas une valeur absolue. Des restrictions peuvent y être apportées si elles sont fondées sur une base légale, sont justifiées par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui et demeurent proportionnées au but visé (art. 36 Cst.; cf. art. 10 § 2 CEDH). Lors de l'interprétation de l'art. 261bis CP, le juge devra tenir compte de la liberté d'opinion. Il ne saurait notamment apporter une trop grande restriction à la liberté d'opinion et rendre intouchable certains groupes humains, en interdisant toute critique à leur égard. Seules des critiques heurtant directement le principe de la dignité humaine et celui d'égalité pourront légitimement limiter la liberté d'opinion (Aubert, L'article sur la discrimination raciale et la Constitution fédérale, PJA 1994 1079 spéc. 1081 s., 1083; Riklin, Die neue Strafbestimmung der Rassendiskriminierung (Art. 261bis StGB), Media Lex 1995 36 spéc. p. 43).

2.3 Pour que l'art. 261bis CP soit applicable, il faut, en premier lieu, que l'auteur agisse publiquement (...)

2.4 Deuxièmement, il faut que le message, quelle qu'en soit la forme ou le support, s'en prenne à une ou plusieurs personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Par religion, on vise un groupe de personnes qui se différencient par leurs croyances transcendantales communes (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2002, p. 301). Dans une société pluraliste où se côtoient différentes communautés religieuses, il convient en effet d'imposer le respect mutuel entre les fidèles des diverses communautés ainsi que vis-à-vis des non-croyants pour assurer la paix sociale. La tolérance dans les questions religieuses représente un élément essentiel de la paix intérieure dans un Etat moderne (Robert Rom, Die Behandlung der Rassendiskriminierung im schweizerischen Strafrecht, thèse Zurich 1995, p. 116). Il n'est dès lors pas douteux que l'art. 261bis CP protège aussi les catholiques, même si la religion catholique est l'une des principales religions du pays (Niggli, Discrimination raciale, Zurich 2000, n. 380). Les prêtres occupent une position particulière dans l'Eglise catholique romaine; par leur ordination, ils se détachent des laïcs, qui ne sont pas consacrés, et forment un groupe de personnes, avec des compétences et des devoirs religieux spécifiques. En tant que tels, ils peuvent donc aussi être l'objet de discrimination au sens de l'art. 261bis CP.

2.5 Le message doit, en troisième lieu, inciter à la haine ou à la discrimination en raison de l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse des personnes visées. Par inciter, il faut entendre le fait d'éveiller le sentiment de haine ou d'appeler à la discrimination. La discrimination consiste à traiter injustement de façon moins favorable (ATF 124 IV 121 consid. 2b p. 124). Par haine, on entend une aversion telle qu'elle pousse à vouloir le mal de quelqu'un ou à se réjouir du mal qui lui arrive (ATF 126 IV 20 consid. 1f p. 28 ). La loi ne décrit pas plus précisément le contenu du message; il suffit que le message soit propre à éveiller la haine ou à appeler à la discrimination. Les autres alinéas qui parlent d'abaisser, de dénigrer et de discriminer d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine permettent de mieux cerner l'idée. Le message doit atteindre la personne dans sa dignité humaine. Il doit la rendre méprisable, la rabaisser. En l'espèce, on peut admettre que le fait de traiter quelqu'un de pédophile constitue en soi un message rabaissant.

2.6

2.6.1 Enfin, pour que l'art. 261bis CP soit applicable, il faut que la critique soit discriminatoire, c'est-à-dire qu'elle soit directement liée à l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Elle doit faire apparaître les personnes qui appartiennent à une race, une ethnie ou une religion comme étant de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine et ce en raison de leur race ou de leur religion. Ainsi, sera un dénigrement punissable le fait d'assimiler les Noirs à des bêtes (ATF 124 IV 121 consid. 2b p. 125) ou encore de faire apparaître les Juifs comme foncièrement avides d'argent (ATF 126 IV 20 consid. 1f p. 28 ); dans ce cas, le message s'en prend à tous les Noirs et à tous les Juifs, exclusivement parce qu'ils sont noirs ou juifs. En revanche, le message qui se réfère à un comportement ou à certaines caractéristiques d'un groupe ou qui porte sur les règles et coutumes de celui-ci reste licite (Niggli, op. cit., n. 938; Schleiminger, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, 2003, n. 32). Ainsi, le journaliste qui stigmatise le comportement des Turcs vis-à-vis des Kurdes ou les idées sexistes de l'Islam ne se rendra pas coupable de discrimination raciale (Rehberg, Strafrecht IV, Delikte gegen die Allgemeinheit, 2e éd., Zurich 1996, p. 187). Pour apprécier si la déclaration porte atteinte à la dignité humaine et si elle est discriminatoire, il faut se fonder sur le sens qu'un destinataire moyen lui attribuerait en fonction de toutes les circonstances (Niggli, op. cit., n. 938; Schleiminger, op. cit., n. 32). Il est à cet égard sans importance de savoir qui soulève le grief.

2.6.2 En l'espèce, le tract litigieux critique les abus sexuels commis sur les enfants par certains prêtres, abus qui ont défrayé la chronique ces derniers temps. Du point de vue d'un lecteur moyen, il tend cependant, au premier plan, à mieux protéger, à l'avenir, les enfants face aux agressions sexuelles. Cela résulte d'abord du titre du tract "Protégez vos enfants". Le tract propose ensuite un service d'assistance pour venir en aide aux victimes d'abus sexuels et invite les autorités à prendre une série de mesures pour que de tels actes ne se produisent plus ou, à tout le moins, pour qu'ils ne soient plus couverts par le secret ecclésiastique. Les auteurs du tract n'attaquent en outre pas les prêtres catholiques, mais les prêtres catholiques pédophiles. L'affirmation selon laquelle il existe statistiquement plus de pédophiles parmi les prêtres catholiques que dans le reste de la population et que les prêtres condamnés représentent la pointe de l'iceberg n'est pas au surplus totalement infondée. Il est en effet de notoriété publique qu'il existe des prêtres pédophiles et que leur hiérarchie n'a pas toujours pris toutes les dispositions qui s'imposaient pour éviter la poursuite de tels actes par ceux qui les commettaient. Le conseil aux parents de ne plus envoyer leurs enfants au catéchisme est aussi exagéré, mais il s'insère dans le contexte général de la critique adressée à la hiérarchie catholique concernant le comportement déviant de certains prêtres et exprime le désir de protéger les enfants face aux abus sexuels.

En définitive, la critique formulée à l'égard des prêtres catholiques peut être considérée comme étant exagérée. Elle est cependant liée au comportement déviant de certains prêtres et non au statut de prêtre catholique. Contrairement à ce qu'ont retenu les juges cantonaux, le tract n'éveille donc pas l'impression que les prêtres catholiques sont de manière générale des êtres méprisables en raison de leur religion et que l'appartenance au clergé catholique favoriserait la pédophilie. Il en irait en revanche différemment si les recourants avaient affirmé de manière générale que tous les prêtres catholiques étaient pédophiles.

Décision publiée par le Tribunal fédéral

http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI? ... S.148/2003

Appel public à la violence (terrorisme) - condamnation

SK.2007.4 du 21 juin 2007 (Cour de affaires pénales), extraits des consid. 5.1 à 5.3

5.1 L’enquête de police a permis d’établir que le 1er septembre 2004, l’accusé, en utilisant le pseudonyme K. (...), a répondu à un message déposé par un certain N. sur le site 1.www.___ demandant ce qu’il devait advenir des journalistes français Christian Chesnot et Georges Malbrunot détenus en otages en Irak. A cette occasion, l’accusé a répondu qu’il fallait soit les tuer, soit demander une rançon ou les pardonner tout en recommandant de considérer la question d’une grosse rançon. (...)

5.2 Se rend coupable de provocation publique au crime ou à la violence celui qui aura provoqué publiquement à un crime (art. 259 al. 1 CP) ou à un délit impliquant la violence contre autrui ou contre des biens (art. 259 al. 2 CP) (...) Par provocation, il faut entendre l’expression d’une certaine insistance qui est propre, par son contenu et sa forme, à influencer la volonté des destinataires et à les engager à accomplir des actes déterminés (...). L’auteur menace la paix publique en ce sens qu’il exerce sur un nombre indéterminé de personnes une influence de nature à éveiller la possibilité de commettre des crimes ou des actes de violence (...).

5.3 S’agissant des faits retenus sous chiffre 2.1 de l’acte d’accusation, il faut constater que l’accusé a admis être l’auteur de la réponse à la question d’un tiers déposée sur son site et demandant un avis au sujet de ce qu’il devait advenir des deux journalistes français Christian Chesnot et Georges Malbrunot détenus en otage en Irak. Sa réponse, publiée sur le même site, était accessible à tous les nombreux internautes ayant accès à celui-ci (...). Dans cette réponse du 1er septembre 2004, l’accusé a explicitement affirmé que, parmi les solutions concrètement envisageables d’après la charia, il y avait également celle de tuer les otages ou d’exiger une rançon importante (...). Confronté à la destinée dramatique de deux personnes prises en otage par des terroristes et conscient du rôle de propagande et de persuasion joué par son site systématiquement utilisé par des organisations islamiques extrémistes, l’accusé n’a pas hésité, en faisant preuve de cynisme, à soutenir publiquement des actes criminels en proposant l’hypothèse de l’assassinat ou de la poursuite de la captivité des otages.

5.3.1 En agissant de la sorte, l’accusé a pour le moins accepté, sinon voulu de manière directe, qu’un nombre indéterminé de personnes, parmi lesquelles éventuellement les ravisseurs des otages, puissent être influencées par ses propos. Etant donné l’impact médiatique du moyen de communication choisi et son utilisation démontrée par les milieux terroristes, il ne subsiste aucun doute que le message litigieux, tant par sa forme que par son contenu, était propre à pousser ses destinataires à adopter les conduites suggérées, lesquelles étaient susceptibles de menacer gravement la paix et l’ordre public. Il est en outre certain que les comportements préconisés par la réponse de l’accusé sont des crimes au sens de l’art. 259 al. 1 CP (assassinat et prise d’otage, resp. art. 112 et 185 ch. 2 en relation avec l’art. 10 al. 2 CP; v. ég. art. 9 al. 1 aCP).

5.3.2 Eu égard à l’intensité, au caractère concret des propos criminels visant des victimes clairement individualisées, on pourrait se poser la question d’une éventuelle instigation d’assassinat voire de prise d’otage en application de l’art. 24 CP. La réponse à cette question doit toutefois être négative. D’une part, une telle instigation n’est pas retenue par l’acte d’accusation. L’eût-elle été que la Cour aurait de toute manière dû l’écarter. Il ressort en effet de l’interrogatoire de l’accusé que celui-ci voulait surtout s’inspirer du cas concret des deux journalistes pour diffuser sa vision générale sur la façon de procéder en matière d’enlèvements (...). En l’espèce, l’on se trouve dans un cas d’application de l’art. 259 CP et non pas d’instigation aux crimes précités (...).

Publié par le Tribunal pénal fédéral:

http://bstger.weblaw.ch/docs/SK_2007_4.pdf

Pronographie

ATF 128 IV 260 du 21 août 2002 (Cour de cass. pénale), consid. 2.1-2.2

2.1 L'art. 197 ch. 2 al. 1 CP sanctionne notamment le comportement de celui qui aura offert des objets ou des représentations pornographiques à une personne qui n'en voulait pas. Selon les textes allemand et italien, il suffit toutefois que la personne concernée ne les ait pas demandés: "jemandem unaufgefordert anbietet" et "offre ad una persona che non gliene ha fatto richiesta".

(...) Dès 1991, le Tribunal fédéral a interprété la notion d'obscénité à la lumière du nouvel art. 197 CP, ce dernier reflétant l'évolution des moeurs. Il a ainsi considéré que les objets relevant de la pornographie dure doivent toujours être qualifiés d'obscènes au sens de l'art. 204 aCP, tandis que les objets relevant de la pornographie douce ne doivent être considérés comme obscènes que s'ils sont accessibles à des personnes âgées de moins de 18 ans ou à des spectateurs n'ayant pas été préalablement rendus attentifs au caractère de l'objet (ATF 119 IV 145 consid. 2a p. 150; 117 IV 276 consid. 3 et 4 p. 277 s.). Il ressort de cette jurisprudence que les notions de pornographie et d'obscénité ne sont pas identiques. En effet, des représentations pornographiques douces, lesquelles ne portent pas nécessairement atteinte au sentiment de décence en matière sexuelle du citoyen moyen, ne peuvent être qualifiées d'obscènes lorsque le spectateur est informé de ce qu'il va voir et que la représentation est interdite aux moins de 18 ans (cf. ATF 119 IV 145 consid. 2a p. 150; 117 IV 276 consid. 3e p. 281 s.).

La notion de pornographie que l'art. 197 CP substitue à celle d'obscénité de l'ancien droit a l'avantage d'exprimer clairement l'idée de publications ou de représentations à teneur sexuelle (FF 1985 II 1105). Cette notion reste toutefois une notion juridique indéterminée qui appelle une interprétation (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2002, p. 811, n. 12). En règle générale, il s'agira de représentations qui sortent un comportement sexuel du contexte des relations humaines qu'il implique normalement, le rendant ainsi vulgaire et importun. L'exemple typique de représentation pornographique est celle évoquant des pratiques sexuelles s'intensifiant progressivement pour se réduire à l'expression de la sexualité elle-même (FF 1985 II 1105). La jurisprudence considère notamment comme de la pornographie douce les cassettes enregistrées, décrivant et évoquant constamment, de manière insistante et en des termes crus, des pratiques sexuelles, l'excitation et l'orgasme (ATF 119 IV 145 consid. 2a p. 149). Entre dans la pornographie douce ce qui réduit l'être humain à un objet d'assouvissement sexuel, dont on peut disposer de n'importe quelle façon, et qui en donne ainsi une image dégradante (ATF 117 IV 452 consid. 4c p. 456). La représentation pornographique doit avoir pour but de provoquer une excitation sexuelle de la personne qui y est confrontée et insister exagérément sur les parties génitales dans le sens de la sexualité sans connotation humaine et émotionnelle (REHBERG/SCHMIDT, Strafrecht III, Zurich 1997, p. 415; CORBOZ, op. cit., p. 812, n. 16).

L'art. 197 ch. 2 al. 1 CP n'exige pas que la victime soit scandalisée, choquée ou apeurée par la représentation pornographique. L'interdiction visée par cette disposition constitue un délit de mise en danger (cf. FF 1985 II 1106). Le bien juridique protégé est l'intérêt de tout individu à ne pas être confronté, contre son gré, à la pornographie. On ne saurait contraindre une personne à prendre connaissance de ces choses lorsqu'elle ne le souhaite pas (...)

2.2 Invoquant la jurisprudence relative à l'art. 204 aCP, le recourant conteste le caractère pornographique de son envoi, l'atteinte portée à la décence ne pouvant être qualifiée de grave au sens de la jurisprudence précitée. Le recourant oublie que la notion de pornographie n'équivaut pas à celle d'obscénité et doit par conséquent recevoir une interprétation distincte de celle retenue par la jurisprudence en application de l'art. 204 aCP. En effet, si toute représentation de pornographie dure doit être qualifiée d'obscène, il en va différemment de la pornographie douce, laquelle ne porte pas nécessairement atteinte au sentiment de décence en matière sexuelle. Dès lors, peu importe que le contenu du diaporama soit "franc de toute déviance" ou ne contienne pas d'actes heurtant gravement la pudeur du citoyen moyen. Selon l'arrêt attaqué, les photographies accompagnant le message expédié par le recourant représentent une jeune femme habillée en peintre en bâtiments qui se dénude peu à peu pour aboutir à une exhibition de sa poitrine et de son sexe, n'ayant d'autre but que de provoquer une excitation sexuelle, compte tenu des poses et des gestes insistant exagérément sur le domaine génital. Une telle représentation, par les gestes et poses insistant de manière crue sur les parties génitales, son caractère vulgaire et primitif et son aspect sexuel inopportun, constitue de la pornographie douce, laquelle reste punissable aux conditions visées par l'art. 197 ch. 2 al. 1 CP. Partant, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en interprétant la notion de pornographie de manière différente de l'obscénité et en qualifiant de pornographique le document expédié par le recourant.

Décision publiée par le Tribunal fédéral

http://relevancy.bger.ch/cgi-bin/JumpCG ... 128-IV-260

FRANCE : Diffamation : condamnation du maire, directeur de la publication du site

Le TGI de Nanterre a condamné le directeur de la publication d'un site internet pour la mise en ligne d'un document diffamatoire. Que le responsable du site municipal soit le maire ne change rien au principe édicté par la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. Madame la maire de Puteaux (92) a donc été condamnée à 2 500 euros d'amende et à verser 3 000 euros au titre des frais de justice solidairement avec l'auteur de l'écrit diffamatoire, l'ancien maire de Puteaux, qui est sanctionné comme complice.

Dans un jugement du 5 septembre 2006, le TGI de Nanterre a, en effet, considéré que la phrase : " En effet, l'intéressé possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans l'autorisation des parents" était diffamatoire en ce sens qu'elle insinuait qu'il était pédophile et a rejetée l'argument de bonne foi. Ces propos figuraient dans une lettre destinée au préfet des Hauts de Seine, rédigée par l'ex-maire de Puteaux et actuellement maire adjoint de la ville, et diffusée sur le site municipal.

" L'intéressé " en question n'est autre que le responsable du blog MonPuteaux.com, connu pour son opposition politique à la majorité qui dirige la ville de banlieue parisienne. Au moment des faits de l'espèce, il avait été poursuivi en diffamation par la mairie de Puteaux pour avoir mis en cause les pratiques de la ville qu'il jugeait douteuses. Par un jugement du 17 mars 2006, le TGI de Paris avait relaxé le blogger en retenant sa bonne foi. Dans la présente affaire, le tribunal a bien sûr pris en compte son contexte particulier pour déterminer le caractère diffamatoire des propos reprochés.

Comme pour la décision du 17 mars dernier, le maire et le maire adjoint ont fait appel. (legalis)

FRANCE : Trois ans de prison pour incitation au viol sur un forum de discussion

Un homme de 32 ans a été condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis par le tribunal de grande instance de Saint-Quentin pour avoir posté sur un forum de discussion un message " incitant au crime de viol, en réunion, à l'encontre de madame X, alors que cette provocation n'a pas été suivie d'effet ".

Le prévenu s'était fait passer pour la victime et avait envoyé un message où celle-ci prétendait rechercher un groupe de cinq hommes en précisant " que cela se passerait chez moi et j'aimerais beaucoup que ça ressemble à un cambriolage qui tourne au viol ".

Ce message comportait également un accès à une photographie de la victime.

Cette dernière qui a porté plainte avec constitution de partie civile avait été alertée par le SRPJ (service régional de police judiciaire) d'Amiens qui opère une surveillance d'internet, et plus particulièrement de certains groupes de discussion troubles. En plus de la peine de prison, le prévenu est condamné à verser à celle dont il avait usurpé l'identité 2 000 euros de dommages-intérêts et 300 euros au titre des frais de justice. (legalis)

http://www.murielle-cahen.com/p_news.asp

Quatre mois de prison avec sursis pour incitation à la haine raciale sur internet

05/11/2003

Le MRAP qui avait publié cet été un rapport sur « La naissance d’une nouvelle extrême droite sur internet » a obtenu, le 4 novembre dernier, la condamnation pour incitation à la haine raciale du webmaster d’un site, aujourd’hui fermé, soutenant la cause israélienne. La 17ème chambre du tribunal correctionnel de Paris qui a donné raison à l’association antiraciste s’est montrée particulièrement sévère en prononçant une peine de prison de quatre mois de prison avec sursis, soit deux mois de moins que celle requise par le procureur de la République. En été 2002, le site amisraelhai.org avait lancé un appel contre 149 personnalités françaises qui soutenaient la cause palestinienne et le boycott de produits israéliens. Parmi cette liste figuraient une quarantaine de personnes d’origine juive auxquelles le webmaster, qui se revendique pourtant du judaïsme, avait apposé une étoile de David. Le juge a octroyé individuellement 1 000 euros de dommages-intérêts à la vingtaine de plaignants qui avaient joint cette action à celle du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples). L’ex-responsable du site incriminé doit en outre faire publier la décision dans le quotidien Le Monde, à hauteur de 3 000 euros.

http://www.legalis.net/jurisprudence.ph ... ubrique=16

Tribunal de grande instance de Paris 17ème chambre, chambre de la Presse Jugement du 25 octobre 2005

Bernard H., Ali P., Gilles B. / Grégoire L.

Contenus illicites - injure - racisme - forum de discussion - pseudonyme - provocation

http://www.legalis.net/jurisprudence-de ... ticle=1782

PROCEDURE

Par ordonnance d’un des juges d’instruction de ce siège en date du 29 janvier 2004, rendue sur une plainte avec constitution de partie civile déposée le 16 juillet 2002 par la société Net 2 S, Bernard R., Ali P., Gilles B. et Yves M., Grégoire L. a été renvoyé devant ce tribunal pour y répondre du délit d’injures publiques à raison de l’origine, de l’appartenance ou de la non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion, prévu par les articles 23, 29 alinéa 2, 33 alinéas 3 et 4, 47 et 48-6° de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, à la suite de la diffusion sur internet, le 17 avril 2002, des mots "****** (Gilles B.)" visant Gilles B. et, le 23 mai 2002, de l’expression "petits métèques" visant Bernard R. et Ali P.

Le conseil des parties civiles a demandé la condamnation du prévenu à leur payer à chacune les sommes de 8000 € à titre de dommages-intérêts et de 1000 € sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale, outre deux publications judiciaires, dans la limite de 5000 € par insertion, et l’exécution provisoire des dispositions civiles du jugement.

DISCUSSION

Sur l’action publique

Grégoire L., ancien salarié de la société Net 2 S, qui a quitté, au mois de févier 2002, cette société dans des conditions qu’il estime humiliantes, reconnaît être l’auteur des messages électroniques contenant les propos poursuivis, adressés sur un forum de discussion ouvert sur le site internet http://www.boursorama.com, comme l’a établi l’instruction.

Bernard R., Ali P. et Gilles B. étaient respectivement président du conseil d’administration, directeur général et directeur commercial de la société Net 2 S, laquelle se définit comme une société de conseils et d’ingénierie spécialisée dans les technologies de communication.

Le 17 avril 2002, Grégoire L. a adressé sept messages différents sur le forum de discussion mentionné ci-dessus, en utilisant le pseudonyme "****** (Gilles B.)", lequel figurait en conséquence en tête de chacun de ces messages, pour en identifier l’expéditeur.

En accolant de la sorte au nom et au prénom de la partie civile un terme de mépris utilisé pour désigner les personnes de confession juive, le prévenu a commis à son encontre le délit qui lui est reproché.

Le 23 mai suivant, Grégoire L., utilisant un autre pseudonyme, a adressé un message sur le même forum, sous le titre "Re : Menace terroriste : une formidable opportunité pour net2s", dans lequel il stigmatisait l’attitude des dirigeants de la société Net 2 S qui auraient fait savoir que la société considérait les attentats commis le 11 septembre 2001 aux Etats-Unis comme "une opportunité pour eux dans le cadre de la reconstruction des sociétés décimées", écrivant que cette société était "une boite gérée par des ploucs mal élevés". Il ajoutait immédiatement après :

"Maintenant que les petits métèques qui ne respectent rien ont récupéré le pactole grâce aux folies de la bourse : Net 2 S en a rien à foutre des pigeons qui ont investi".

L’utilisation du substantif incriminé, lequel désignait l’étranger à la cité, dans la Grèce antique, mais renvoie, de nos jours, de façon péjorative, selon la définition qu’en donne le dictionnaire, à l’"étranger (surtout méditerranéen) vivant en France, et dont l’allure, le comportement sont jugés déplaisants", constitue également le délit poursuivit. Il résulte de l’ensemble du message que, par ce terme, le prévenu entendait désigner les dirigeants de la société Net 2 S. Dans ces conditions, le président du conseil d’administration et le directeur général de cette société pouvaient légitimement s’estimer visés par cette injure.

C’est en vain que le prévenu fait plaider l’excuse de provocation, dès lors qu’à les supposer fondés, les griefs nourris par lui relativement au harcèlement qu’il aurait subi au sein de la société pendant les mois qui ont précédé son départ et aux conditions de celui-ci, dont il doit être relevé qu’ils n’ont jamais été soumis par lui à l’appréciation d’une juridiction, qu’elle soit pénale ou prud’homale, ne pouvaient justifier l’emploi de qualificatifs injurieux à l’égard de dirigeants de la société à raison de leur origine.

Il y a lieu, en conséquence, d’entrer en voie de condamnation, en prononçant contre le prévenu une peine d’emprisonnement à la mesure de la gravité de son comportement et qui soit de nature à constituer un ferme avertissement pour l’avenir, peine qui pourra, cependant, être assortie du sursis, le prévenu n’ayant jamais été condamné.

Sur l’action civile

Bernard R., Ali P. et Gilles B. seront reçus en leur constitution de partie civile et leur préjudice sera justement réparé par la condamnation du prévenu à leur payer à chacun la somme de 750 € de dommages-intérêts, sans qu’il soit toutefois nécessaire d’ordonner la publication judiciaire demandée.

Le versement provisoire de ces sommes sera ordonné, en application des dispositions de l’article 464 du code de procédure pénale.

Le prévenu sera enfin condamné à payer à chacune des parties civiles la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles par elles engagés pour faire valoir leurs droits en justice.

DECISION

Le tribunal statuant publiquement, en matière correctionnelle, en premier ressort et par jugement contradictoire à l’encontre de Grégoire L., prévenu, par jugement contradictoire (art. 424 du code de procédure pénale) à l’égard de Bernard R., Ali P., Gilles B., parties civiles, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

. Déclare Grégoire L. coupable d’injures publiques envers Bernard R., Ali P. et Gilles B. à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, délit prévu et puni par les articles 23, 29 alinéa 2, 33 alinéas 3 et 4, 47 et 48-6° de la loi du 29 juillet 1881 ;

En répression, vu les articles susvisés,

. Le condamne à la peine d’un mois d’emprisonnement ;

Vu les articles 132-29 à 132-24 du code pénal :

. Dit qu’il sera sursis totalement à l’exécution de cette peine dans les conditions prévues par ces articles ;

Et aussitôt, le président, suite à cette condamnation assortie du sursis simple, a donné l’avertissement, prévu à l’article 132-29 du code pénal, au condamné que s’il commet une nouvelle infraction, il pourra faire l’objet d’une condamnation qui sera susceptible d’entraîner l’exécution de la première peine sans confusion avec la seconde et qu’il encourra les peines de la récidive dans les termes des articles 132-9 et 132-10 du code pénal ;

. Reçoit Bernard R., Ali P. et Gilles B. en leur constitution de partie civile ;

. Condamne Grégoire L. à leur payer à chacun la somme de 750 € à titre de dommages-intérêts ;

. Ordonne le versement provisoire de ces sommes aux parties civiles ;

. Condamne Grégoire L. à leur payer à chacune la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;

. Rejette les autres demandes des parties civiles.

Le tribunal : M. Nicolas Bonnal (vice président), MM. Alain Bourla et Marc Bailly (juges)

Avocats : Me Catherine Chilot, Me Florence Watrin