Le simulacre est la représentation par la fiction de ce qui se fait passer pour la réalité. Le sujet fut largement analysé par Jean Baudrillard, et il n'est pas inutile de faire une piqûre de rappel.
Combien de fois avez-vous vu un chef d'état ? Combien de fois dans les fictions ?
Combien de fois avez-vous vu un immigré illégal ? Combien de fois dans les fictions ?
Combien de fois avez-vous vu une arrestation ? Combien de fois dans les fictions ?
Combien de fois avez-vous vu Louis XIV ? Combien de fois dans les fictions ?
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Notre expérience de la société nous vient donc de la fiction - pour tout ce qui est au-delà de notre horizon proche. Autrement dit cette expérience est celle des préjugés des scénaristes eux-mêmes, lesquels sont eux aussi nourris par la fiction. Le simulacre engendre le simulacre.
Pire encore : nous avons tendance à nous conformer aux archétypes que nous voyons dans les fictions, à nous laisser enfermer en eux. Le policier sera raciste car il le perçoit comme l'usage dans son milieu social, dont il veut internaliser les normes. L'arabe interprétera toute ambiguïté dans un comportement comme une preuve de haine raciale car c'est ainsi que la fiction lui enseigne de l'interpréter, ce qui le poussera à se considérer comme victime d'une société hostile. Le politicien sera corrompu car il sait depuis l'enfance que tout le monde le fait.
Pour cette raison, Baudrillard estimait que le simulacre avait désormais "remplacé" (sic) la réalité sous l'effet des médias de masse, de la professionnalisation de la communication, et de l'éloignement de la réalité matérielle (éloignement de l'agriculture et de l'industrie, valeur d'usage). Je n'adhère pas complètement à cette dernière thèse, mais elle a du mérite.
La propagande ne passe pas tant par l'information que par le divertissement.