Si l'Université protégeait ses écoliers contre agression du dehors, si elle se solidarisait alors avec eux, elle se rattrapait à l'intérieur. Pour stimuler le zèle des élèves et pour punir leurs incartades, elle utilisait et abusait du fouet qui était appliqué à tous sans exception. Montaigne a qualifié les établissements d'instruction de vraies geôles de jeune captive.
Les déclassés qui avoisinaient l'Université excellaient à chaparder les brocs de vin, et à faire des razzias de boudins, de saucisses et de jambonneaux chez les charcutiers. Ils savaient aussi tricher au jeu et demander l'aumône. Mais la plupart de ces jeunes gens risquaient de finir leur jour sur la potence ou dans un cul-de-basse-fosse.
Les vrais étudiants, ceux qui travaillaient, n'étaient guère moins gais ou entreprenants. Les instruments des étudiants de la Faculté de médecine pour les séances d'anatomie, c'étaient les cadavres qui étaient rares, car dans les hôpitaux les confrèries religieuses se faisaient un devoir d'ensevelir les morts chrétiennement et décemment. Restaient donc ceux que l'on repêchait dans la Seine, ou qu'on trouvait au coin des rues et surtout, ceux du bourreau qui vendait ses clients. La concurrence était terrible entre la Faculté de Médecine et la confrèrie des chirurgiens-barbiers qui, eux aussi avaient beoin de pièces d'anatomie. Dès que l'on apprenait que la justice allait exécuter quelque criminel, des expéditions s'organisaient aussitôt de chaque côté. Le but était de dépendre les cadavres, les premiers, du gibet, avant que la pluie, le soleil ou les oiseaux les aient abimés. Quand les groupes arrivaient en même temps au pied de la potence, c'était la bataille rangée. Chacun emportait un morceau de mort.
Cette jeunesse du 13ème siècle avait une effervescence turbulente qui se signalait par toutes sortes de bagarres mais, elle était unie par un profond anour de la science, une incroyable avidité d'instruction et, pour les atteindre elle devait faire face à de durs sacrifices.