Le risque de l’impasse démocratique
Le problème se pose par conséquent de la manière suivante :
• Soit Joe Biden obtient avant le 14 décembre prochain la certification par les États des 270 délégués dont il a besoin, et par conséquent la confirmation des résultats annoncés par les médias le 4 novembre. Et dans ce cas le collège l’enverra à la Maison-Blanche ou il devrait prendre ses fonctions le 20 janvier.
• Soit Donald Trump parvient à bloquer ou à rendre judiciairement inopérante la certification des désignations des délégués dont son adversaire a besoin. Privant Biden de la possibilité d’arriver au chiffre fatidique de 270 délégués le 14 décembre et renvoyant l’élection au congrès fédéral où il devrait normalement l’emporter.
C’est la raison pour laquelle la question des irrégularités et de la fraude en matière électorale n’est pas simple. Pour qu’elles remettent en cause l’élection, il faut établir que ce qui a été relevé, constaté ou prouvé a été de nature «à altérer la sincérité du scrutin», c’est-à-dire tout simplement à fausser l’élection. Or il est impossible pour les juridictions de le faire avant les dates limites prévues par la constitution américaine.
C’est d’ailleurs ce que semble dire explicitement la cour suprême du Wisconsin, qui a rejeté un recours trumpiste dans une décision très intéressante. Le juge a en effet reconnu l’existence d’irrégularités, mais toutefois refusé de statuer en faisant valoir (en substance) que ce serait «ouvrir la boîte de pandore».
Cela peut paraître étrange, mais dans le fonctionnement de l’énorme machine électorale des États-Unis, c’est exactement comme cela que se pose le problème.
Naturellement, et la première élection de George W. Bush en 2000 l’a démontré, il existait jusqu'ici aux États-Unis un consensus pour éviter précisément d’ouvrir la boîte de pandore. Ainsi, afin d'éviter la crise institutionnelle, Al Gore, qui avait pourtant probablement gagné, s’était incliné.
Le problème cette fois-ci, c’est que les deux parties sont sur des positions autrement antagonistes. Personne ne semble vouloir ni du consensus ni du compromis. Au reste, comme le démontrent les études d’opinion, la décision finale, quelle qu'elle soit, ne pourra que provoquer un sentiment de révolte parmi les électeurs du camp perdant.
Deux options sont ainsi ouvertes. Premier scénario: la Cour suprême fédérale valide les certifications des grand électeurs, de sorte que le Collège électoral peut désigner Joe Biden lundi prochain comme futur occupant de la Maison-Blanche (problème: l’Amérique républicaine n'est pas disposée à accepter cette issue).
Deuxième scénario: Donald Trump parvient à bloquer le Collège électoral, ce qui lui permet d'être renouvelé à son poste par le Congrès (problème: l'électorat démocrate ne veut pas entendre parler de cette solution).
On peut avoir quelques craintes pour les États-Unis, car les suites de ce cafouillage démocratique majeur pourraient s’avérer très inquiétantes.
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