Gérard Vionnet - Je n’avais jamais gardé plus de deux cents moutons et je voulais garder avec le loup. Je veux aussi poser le problème du loup dans un contexte large... Ce que cache la problématique loup, c’est qu’on n’a pas les mêmes intérêts que les éleveurs. Les bergers croient les éleveurs solidaires, mais il y a beaucoup de différences. Je l’ai découvert en gardant avec un collègue deux mille brebis dans la réserve naturelle des hauts plateaux du Vercors, la plus grande de France, avec huit alpages de deux mille moutons sur quatorze mille hectares.
Etre pour ou contre le loup, c’est comme si on me demandait si j’étais pour ou contre la foudre, c’est une contrainte qui fait partie du métier...
Que faire pour connaître le loup ?
Accepter de s’intéresser à lui. Il faut l’état d’esprit de la cohabitation pastorale.
Les troupeaux sont-ils trop gros ?
Le loup pourrait bien être une nouvelle chance pour un pastoralisme qui conviendrait aux bergers. Les bergers pyrénéens reconnaissent par exemple que mille brebis tarrasconnaises sont impossibles à garder serrées pour les protéger du loup et de l’ours. Par contre, des troupeaux de trois cents brebis seraient protégeables.
C’est l’intensification moderne du monde de l’élevage qui a amené un pastoralisme de grands troupeaux à taille inhumaine sur lesquels les grands prédateurs ont la tâche facilitée. Le loup devient l’arbre qui cache la forêt du mal être animal : les bergers s’accordent à considérer que l’individualisation des soins n’est pas possible dans ces conditions, ont par exemple du mal à isoler rapidement et soigner une brebis boiteuse.
C’est ça qu’il faut demander, mais ce serait se désolidariser de certains éleveurs ; les vrais prédateurs ne sont-ils pas ces quelques éleveurs qui ne paient pas bien les bergers, se plaignent du loup et ramassent l’argent des aides publiques sans les optimiser et parlent haut et fort ?
S’ils font des cabanes en plus, fractionnent les troupeaux, achètent des patous, on saura faire.