courtial
C'est difficile de répondre à un tel salmigondis. Notre ami Courtial se retrouve face à une aporie des plus amusantes. N'admettant pas l'essence, il lui faut quand même raisonner. Il semble admettre alors sans examen, lui le roi du libre-examen, en premier axiome une catégorie politique : droite / gauche, une qualité, que l'on peut attribuer à tout raisonnement, toute idée. Quoi que l'on dise ou pense, c'est soit de droite soit de gauche.
Il n'admet pas, de surcroît que ces notions soient remises en cause. Pourtant s'il ne s'agit pas de vérités, juste des produits de l'esprit humain, des noms attribués par commodité, sans signification, pourquoi devraient-elles être forcément admises ? Elles ne peuvent être vraies que si elles correspondent à des essences, énoncé que Courtial n'admettra jamais ; et d'ailleurs qui ne serait qu'une erreur différente dans ce cas précis.
Je demande donc à mon ami Courtial, en plus de justifier ces catégories politiques, de commencer par les définir. Comment compte-il s'y prendre, sans une juste notion de la substance, de ce qui est étant, et accident dans cette dernière ? Nous verrons.
Précisons toutefois que nous expliquer que la droite et la gauche, dans la lignée de René Rémond et Jacques Julliard, sont multiples : plusieurs composantes dès l'origine, et qu'il y a filiation entre ces composantes antiques et les présentes, c'est omettre de nous expliquer ce qui fait "la droite", et ce qui fait "la gauche", c'est -à-dire répondre justement à la question : qu'est-ce que la droite ? Qu'est ce que la gauche ? Quelle qualité faut-il attribuer spécifiquement à l'objet droite ou à l'objet gauche ? Comment ces divers composantes sont identifiables comme de droite et de gauche ?
N'étant ainsi pas idiots, ces deux savants ont préféré parler des droites en France, ou des gauches, afin : 1) d'éluder la question ; 2) que l'on ne puisse pas leur reprocher. Ce n'est jamais que nous expliquer à nouveau, comme les sophistes en leur temps, que tout est multiple, variable, relatif, changeant... Alors que l'effort précédemment mentionné aboutirait : soit à une définition si c'est possible ; soit à la question de la légitimité de l'existence de ces notions si l'on n'y parvient pas, et à leur possible abandon.
Même en admettant de facto que droite et gauche sont des notions légitimes, qui ne s'avèrent être que des positions sur un échiquier politique donné, arbitrairement définies, mouvantes aussi bien dans le temps - l'histoire d'une société donnée- que dans l'espace* -le monde actuel par exemple-, comment peut -on en faire des catégories, à partir desquels on raisonnera sur à peu près tout ? Comment peut -on raisonner en fonction de ce clivage, si la droite d'aujourd'hui n'est déjà pas celle d'il y a 30 ans ? Si cette même droite n'est pas celle des Etats-Unis ?
Comment peut-on raisonner à partir de catégories qui ne sont pas vérités, qui ne sont pas universelles, mais au contraire déterminées, particulières ? Comment peut -on raisonner à partir de ces notions de songe-creux ? Autant dire que tout raisonnement produit au moyen de ces notions est spécieux, et mérite de finir dans la corbeille...
*Ce paragraphe est une gentillesse de ma part, puisqu'il s'agit presque d'admettre une absurdité.