france2100 Si une loi naturelle existait, ce concept n'aurait pas été inventé il y a cinq siècles seulement. Il n'y a pas de morale naturelle ni universelle.
C'est inexact. Erreur pour laquelle j'ai de l'indulgence, je l'ai apprise moi-même de profs de philo et de profs de droit (cette question est à une frontière commune de ces deux disciplines) trop pressés. Indulgence limitée car je considère par ailleurs que dans des questions qui ne touchent pas à la pratique immédiate, et dont la solution n'est pas liée à des délais, il faut prendre son temps. Sinon, on bousille, on onfraytise et c'est pas bien.
Mais Thomas d'Aquin, au 13ème siècle, parlait déjà de loi naturelle. Et pour soutenir cette prétention (je le dis comme ça car on voit d'emblée que la loi, c'est le fait des hommes, et pas de la nature, donc le concept est contradictoire), il s'appuyait sur Aristote et ce qu'il a dit il y a 25 siècles, et pas 5 siècles.
Dans son Ethique (Thomas d'Aquin le cite sous le nom "Moralia", en latin), Aristote discrimine bien le droit selon la loi et le droit selon la nature.
La justice politique elle-même est de deux espèces, l’une naturelle, l’autre légale. Est naturelle celle qui a partout la même force et ne dépend pas de telle ou telle opinion ; légale celle qui à l’origine peut être indifféremment ceci ou cela, mais qui une fois établie, s’impose : par exemple, que la rançon d’un prisonnier est d’une mine (1), ou qu’on sacrifie une chèvre et non deux moutons (2), et en outre toute les dispositions législatives portant sur des cas particuliers, comme par exemple le sacrifice en l’honneur de Brasidas et les prescriptions prises sous formes de décrets
(1) une somme d'argent. Une mine vaut 1000 talents, si je me souviens bien. Bon, c'est du pognon, et c'est aussi arbitraire que mettre la contravention pour stationnement interdit à 50 balles ou 100 balles. Y a pas de relation "naturelle", ça dépend de la loi, du moment, de l'humeur de Macron, etc. , et ça peut sembler plus ou moins légitime en raison du fait qu'on a des opinions écolo ou qu'on est un gros beauf pollueur béhémiste.
(2) allusion à des traditions de pratiques religieuses, à l'évidence
Je passe sur les conséquences qu'on en tire, qui sont importantes, mais les deux choses sont bien séparées dans leur esprit.
Tout ce qu'on peut en dire (pour me rapprocher de vous) à mon avis, c'est que la justice ou le droit prétendu "naturel", ça met sous le même nom (nature, naturel) des choses assez différentes. Ainsi, pour Thomas, Dieu étant le créateur de la Nature, ce qu'on appelle "droit naturel", c'est la Loi que Dieu a mise dans la nature, en la créant. Et il tient le droit naturel comme un droit divin (ceux-ci s'opposant conjointement au droit humain, légal), ce qui n'est certainement pas ce que veut dire Aristote. Ce qu'il y a après de "naturel" dans le droit naturel des gens que vous visez - Jean Bodin, Locke, Montesquieu, etc. j'imagine - est encore autre chose.
Mais il n'en reste pas moins que l'idée d'un droit naturel et par suite universel, différent des dispositions légales prises par tel ou tel peuple en particulier, qui sont susceptibles de changer dans l'histoire, ce qui a été fait pouvant aussi bien être défait en l'espèce, date au moins d'Aristote, qui ne l'a sans doute pas inventé tout seul.
Remettez nous donc une louche de 20 siècles, espèce de radin !