omega95
J'en connais pourtant un exemple : dans Le Devin, des aventures d'Astérix, ce devin lit dans la cervoise. Pas de précision sur la marque, mais dans ces temps antiques, il n'y avait pas de firmes encore, je suppose.
Plus sérieusement, je rappelle l'approche rationaliste (que je privilégie) : vous avez sorti de votre jeu de tarot la carte La Papesse ou le Chevalier ou chaipakoi, ce qui vous permet de "voir" que la récolte des oranges en Californie va être une catastrophe cette année ou la Guerre en Syrie va s'aggraver, etc. La question, c'est quel rapport il y a entre votre carte et les oranges californiennes.
Est-ce que c'est un rapport causal ? Non, ce n'est pas à cause de votre carte que Daech lance des bombes. L'argument, c'est que pour pouvoir être cause de quelque chose, il faut déjà exister. Or l'attentat qui sera commis dans 3 mois n'existe pas (il existera peut-être, mais pour l'instant il n'est rien), il ne peut rien causer non plus. Le rapport ne peut donc pas être causal. Ce n'est pas l'attentat qui fait sortir la carte ou dispose les planètes dans le ciel.
Le rapport causal n'est pas le seul qui existe. Dans sa Critique de la raison, Kant a tenté d'en établir la liste complète. Il peut y avoir par exemple des choses qu'on lie parce qu'elles se succèdent, ou parce qu'elles sont simultanées, ou parce que l'une est comprise dans l'autre comme une partie, ou parce qu'elle en rend une autre impossible, etc. une dizaine d'autres, qui permettent de synthétiser nos expériences.
Mais la voyance n'entre dans aucune "catégorie" (i.e : un concept) et le rapport qu'il y a entre votre carte de tarot, votre rêve de cette nuit, la position réelle des astres dans le ciel ou n'importe quel autre élément de ce genre appartient à un tout autre système, qui est celui du vouloir dire. Le seul lien qu'il y a entre votre carte et les oranges, c'est que ça veut dire. Les choses sont magiques, elles veulent dire, c'est-à-dire qu'on les fait dire, on les force à parler.
Au plan philosophique, les choses me paraissent assez claires : faire dire quelque chose à ce qui ne dit rien, il y a un concept, ça s'appelle la superstition. La superstition, c'est l'art de forcer le réel à dire ce qu'il ne dit pas, c'est de le faire parler, un peu comme le flic vous presse pour avouer les choses qui l'arrangent.
Alors que dans son fond et par nature, le réel est juste absurde, parce qu'il est muet.
Et probablement aveugle, au surplus.