Un Tour sans Fify, c’est comme un vélo sans guidon. Ravi qu’il soit là, ne serait-ce qu’en commentateur avisé ou reporter toujours inspiré.
Je donnerai mes avis, en essayant de ne pas trop faire du MLH, mais un tout petit peu quand même. Dame Garance saura me reprendre par ses silences s’il s’avérait que debout sur les pédales, altier et les yeux plantés sur la foule qui m'acclame, je croise trop ma chaîne.
Ce Tour ne me plaît pas. Une seule étape colle à sa légende, celle de Luz Ardiden, montée mythique où vit pour l'eternité le spectateur-photographe infâme qui un jour de juillet osa précipiter l’immense Lance au sol.
Le reste est une purge.
Avec le fadasse Envalira comme sommet Desgrange, col davantage tracé pour les contrebandiers que pour les cyclistes, et la lénifiante montée vers Tignes que la grêle avait eu le bon goût de censurer en 2019, il en sera tout pour les passages dans le ciel, au-dessus de 2000. Galibier, Izoard, Iseran, Agnel, Restefond… les gentils organisateurs de platitude ne connaissent plus.
Où sont passés les triptyques de HC, enchainements mythiques nommés Galibier-Madeleine-La Plagne ou encore Iseran-Croix-de-Fer-Alpe d’Huez, sans parler d’Agnel-Izoard-Granon ? Rangés dans la mémoire de ceux qui sont désormais trop vieux pour les escalader.
ASO tentera bien de sauver sa copie par un Tourmalet survenant au jour 18, après la course, et un double passage au Ventoux qui se déroulera sous la cagne, et donc se limitera à une bagarre d’essoufflés, parmi les survivants de l’insolation générale, dans un final au-dessus du chalet Reynard, sur quatre kilomètres déshydratés.
Un Tour sans de vraies Alpes peut-il être un grand Tour ?
J’en doute.
Sauf qu’il y a Alaphillipe. Et que dans un Tour ainsi raboté, le bougre peut changer la donne, transformer l’ennui annoncé en marche captivante vers les Champs.
Alaph ne passe pas les 2000 : ça tombe bien il n’y en a qu’un.
Parce qu’Envalira, lui qui réside en Andorre et qui le monte quasiment sur la plaque pour aller chercher un parfum à Marion au Pas-de-la -Case, ce n’est pas le genre de bosse qui peut le tempérer, le détourner de l’objectif d’une vie.
Et sur le raidard de Landerneau, ce jour, il a certes étalé sa classe, mais aussi exhibé sa confiance. Partir à plus de deux bornes de l’arrivée quand on a sur sa selle Van Aert, Roglic, Pogacar, Thomas et consorts, faut avoir rompu définitivement avec le doute, lui qui ne l'a fréquenté qu'épisodiquement, et sans passion.
Coup d’éclat ? Début de règne ? Alaph était déjà très fort sur le tour de Suisse.
Ce Tour sans hauteur est sans doute la chance de sa vie. S’il veut le gagner un jour, ce sera cette année.