Tout ce débat est très relatif, je ne suis pas convaincu par vos arguments.
Ce débat n’en est pas vraiment un puisque pour ma part je n’émets pas d’opinion personnelle (à quel titre en aurais-je ?) mais me cantonne à rappeler certaines réalités historiques dont aucune n’est réfutable ni réfutée par le moindre historien sérieux, ou alors il faut me le présenter.
Dans ce que j’ai rappelé, il n’est ni judicieux d’entrevoir la moindre argutie personnelle ni même honnête de placer ces quelques modestes remémorations au niveau de cavillations égotistes que je suis le premier à récuser. Sauf à montrer, les faits marchant devant, que j’aurais travesti les vérités historiques.
Car s’il est en effet tentant pour nombre d’observateurs d’y aller de leurs petites analyses, et ce notamment en fonction de tropismes plus ou moins avoués et n’ayant en toute hypothèse que bien peu de rapport avec le sujet initial, je crois qu’il est bien plus intéressant, car bien plus pertinent au sens analytique, d’endiguer ses propres émotions, de refréner ses dilections intimes et donc de s’en tenir à ce qui est factuellement vérifiable.
Et c’est encore dans cette inclination d’esprit que je crois utile de devoir relever quelques contrevérités dans les propos qui suivent.
Je ne suis pas le seul à penser que si Leningrad, Moscou et le Caucase sont pris, c'est le début de la fin car cela donne aux Allemands 2 accès à la mer, des champs de pétrole et une capitale défaite.
Les trois objectifs cités ci-dessus sont très emblématiques de la démesure de l’opération Barbarossa, et par leur simple énoncé on peut comprendre pourquoi structurellement et philosophiquement la campagne d’Hitler en terre soviétique ne pouvait aboutir.
St Pétersbourg (Léningrad) est le berceau de la Russie historique, fondée par Pierre le Grand. C’est l’âme du grand peuple russe que veulent éteindre ici les nazis. Bien plus au sud à Moscou, c’est l’âme soviétique qui doit être anéantie. Et enfin à Bakou c’est le trésor du sous-sol russe qui doit être pillé, les chances de l’URSS de demain qui doivent être arrachées à son peuple. Si l’on rajoute Stalingrad qui abrite elle l’âme du "Vodj", ce sont donc toutes les composantes d’une nation qui sont agressées dans le même élan barbare, historiques, sociales, économiques, et peut-être encore au-delà, oniriques.
Et c'est la conséquence non prévue de cette volonté affichée d'extermination d'une nation qui constituera le premier et le principal maillon de cet effroyable échec que connaîtront les nazis : ce peuple soviétique soumis aux grandes purges, vivant dans la suspicion selon laquelle un ennemi du peuple peut être révélé en chacun, terrorisé par le goulag et la Iejovschina, va petit à petit retrouver son âme à travers celle des partisans. Hitler aura au final fédéré les soviétiques bien plus que Staline n’y sera jamais parvenu. Une dynamique d’adhésion du peuple à la Nation va succéder à cette si longue période sombre l’ayant aliéné dans une inféodation dont on put mesurer les effets au plan guerrier lors du premier semestre de l'opération Barbarossa : ces russes-là, étrillés par Staline et poussés au combat par la seule propagande ne savaient plus désormais que perdre.
Mais ce peuple qui avait tant suscité l’admiration tout au long de l’histoire de tous ceux l’ayant affronté (), ce peuple qui avait tout supporté de la dictature rouge, ce peuple qui pouvait sans doute accepter que l’on détruise son présent, s’est finalement réveillé quand il réalisa que les nazis voulaient aussi brûler son passé, et lui interdire tout futur. Bien sûr le tableau est présenté ici sous une lumière qui le flatte, volontairement, mais au fond, sa couleur est d'origine.
Alors ensuite on peut causer stratégie, à la condition de ne pas en causer faussement comme en laissant croire que les nazis n’auraient pas eu accès "aux deux mers" (Riga et les pays baltes sont tombés en juillet 41, Odessa au même moment et Yalta en décembre 41, seule Sébastopol résistera jusqu’en juillet 42 à von Manstein et au tristement célèbre canon Dora de 1300 tonnes), il n’en reste pas moins vrai que ce sont les femmes de Moscou qui ont creusé les gigantesques tranchées anti-chars pour interdire la ville aux mécaniques d'Hitler et que ce sont les chefs de T34 qui, alors qu’ils n’étaient pas encore dotés du canon de 85 permettant de transpercer les panzer à 1000 m, vinrent se placer au « corps-à-corps » à Koursk pour que leur canon de 76 retrouve dans la promiscuité l’efficience dont l'éloignement de leur cible les privait.
On peut encore disserter et désinformer à foison en véhiculant l’iconographie occidentale présentant un commissaire politique issu du sivnarkom caché derrière chaque soldat soviétique lui-même caché derrière son fusil, aucun historien expert militaire (on peut citer Liddle Hart par exemple) ne placera pour autant l’extraordinaire opposition que livra le peuple russe ailleurs qu’à sa place dans les causes de la défaite nazie, la première.
En 1941-début 1942, c'est encore l'Allemagne qui garde la supériorité tactique dans les combats. Elle remporte la grande majorité des combats, au prix de lourdes pertes qu'elle payera cher à force, défaite puis obligée de se replier .
Ce qui est dit là est malheureusement factuellement faux.
Les premières contre-attaques majeures lancées par les soviétiques ont lieu début décembre 41. En deux jours les troupes allemandes reculent de 200 km alors même qu’elles étaient dans les faubourgs de Moscou. Mi-décembre Kalouga est libérée, puis c’est le tour de Mojaisk avec Koniev qui enferme plus haut encore les troupes du Reich dans le saillant de Djev. Seul Model remporte une victoire sans contestation possible sur Joukov (opération Mars) mais en partie en raison du mauvais temps qui clout 1000 avions soviétiques au sol et au prix d’un véritable carnage dans ses troupes, comme dans celles de Joukov..
La bataille de Moscou aura coûté 400 000 hommes aux nazis. C’est le début de la fin. Et si les deux belligérants s’octroient une pause jusqu’au début de l’été, c’est un front dentelé souvent comparé, par les historiens aux côtes de Norvège et à ses fjords, de près de 4000 kms que la Wehrmacht doit défendre désormais. On sait ce qu'il en adviendra.
Les résistances n'ont plus de soutien. L'Allemagne peut mobiliser plus de troupes. Les 3.8 millions que vous évoquez c'est 18% maximum du potentiel humain des fascistes (Allemagne 17M, le reste minimum 4M avec les Italiens, Français, nordiques, Européens de l'est, Ottomans, Européens des Balkans).
Non, ce chiffre de 17 M est fantaisiste, ou du moins il représente le cumul de tous les hommes incorporés dans la Wehrmacht en six années de conflit.
Le potentiel total de la Heer en 39 est de 3 700 000 hommes, de 4 300 000 hommes au printemps 41 (de 4 800 000 fin 41) lors du déclenchement de Barbarossa qui comprend trois groupes d’armées représentant 3 200 000 hommes auxquels s’ajoutent 650 000 soldats venant de Finlande et de Roumanie.
75 % des hommes sont engagés et 85% des blindés disponibles, d’où ma cote mal taillée de "80% des moyens"
J’ajoute que la Heer culminera à 6 500 000 hommes en 44, mais au prix de la mobilisation de gamins de 14 ans et de séniors de plus de 60, comme le montre l’analyse des troupes notamment engagées en Normandie.
L’ensemble de la Wehrmacht tous services compris, y compris administratifs non opérationnels connaissant un pic en 44 également avec 12 000 000 d’incorporés. Je renvoie aux publications de Masson notamment, dans sa remarquable histoire de la Wehrmacht