Le héros autour duquel se construit le roman est un universitaire spécialiste du célèbre romancier converti au catholicisme Joris Karl Huysmans. La vie du biographe se confond parfois avec l'ombre de "son" grand écrivain. L'un et l'autre sont étonnamment houellebecquiens. Surprise, qui n'est vraiment pas houellebecquienne, elle : il y a trois pèlerinages dans ce livre, l'un, plutôt involontaire chez notre héros, dans la ville d'un très vieux Charles, qui est encore aujourd'hui le village de Martel, le second, dans la foulée, à Notre Dame de Rocamadour, le dernier au monastère de Ligugé (où a vécu Huysmans, devenu oblat bénédictin). Mais alors, sommes-nous dans un roman catholique ? Plutôt dans l'autopsie de ce qu'il fut. Houellebecq ici se fait critique littéraire (ce n'est pas la première fois, il a consacré tout un livre à Lovecraft). Il se montre d'une étonnante pénétration. Il s'agit de comprendre pourquoi cette culture catholique, si belle qu'elle ait été, ne pénètre plus, pourquoi elle ne trouve qu'un jeune public "humanitaire et asexué", et pourquoi elle n'entame pas l'athéisme déclaré du Professeur de Lettres, pourtant spécialiste de Huysmans....
Dans le livre, il est très peu question d'immigration et d'immigrés. L'Occident semble s'islamiser de l'intérieur. Les agents de l'islam sont souvent des convertis, comme ce M. Rediger qui dirige la Sorbonne islamique après une thèse sur Guénon nietzschéen. Ce que dénonce Houellebecq, c'est la conversion (la soumission) de l'Occident. Il évoque également une forme de "collaboration" des élites intellectuelles, en laissant son héros susurrer que cette collaboration-là est bien naturelle. Quel rapport avec la polygamie, direz-vous ? L'un des instruments de la conversion des mâles (c'est ce qu'explique notre héros sans gêne apparente) est ce retour sécurisant des vieux schémas sur le mâle et la femelle, sur la supériorité du mâle et la pluralité des femelles. Ce sont aussi ces schémas "essentialistes" que l'on trouve dans la Métaphysique des sexes de Julius Evola, où l'homme est le soleil et la femme la lune, qui emprunte sa lumière au soleil. Dans le Coran, vous le savez, l'image est celle du champ et de la charrue. Aussi élémentaire. Comment disait Houellebecq déjà ?
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