Populisme est un terme complètement piégé de nos jours et l'on peut voir dans ce qui précède que chacun y met ce qu'il veut et pour désigner son ennemi, cela va du clientélisme au dialogue social, de la démagogie à la corruption, et tant d'autres.
Je vais produire mon analyse, mais ce n'est qu'une parmi d'autres dans ce thème très embrouillé.
Il a été rappelé qu'en principe (à moins qu'on ne préfère parler d'une fiction), le socle républicain, c'est que la souveraineté émane du Peuple.
Reste à savoir si le populisme a quelque chose à voir avec le peuple. Ce qui n'est pas si sûr.
Hannah Arendt distinguait, par exemple, le peuple et la populace, non pas certes pour parler du populisme (je ne me souviens pas qu'elle emploie ce terme et j'évoque ses analyses sur le totalistarisme, plutôt), mais cela donne peut-être des perspectives politistes intéressantes.
Pour faire très court, cette distinction résulte de l'idée que nous sommes dans une société de masses. Ce qui caractérise "la masse", à la différence du "peuple", c'est l'absence de diversité. Alors que le peuple est la présence et la condition d'apparition des diversités, (des différences, des personalités, etc. que faire partie d'un peuple, c'est être perpétuellement confronté à l'Autre, etc.) la masse abolit la diversité, elle subsitue à la politique et à toutes les activités subjectives (disons), à tout ce qui est "agir", des comportements. La masse n'agit pas, elle ne pense pas, elle ne fait pas, elle se comporte.
On agit sur elle par exemple avec de la propagande, qui n'a jamais cherché à informer, à faire penser, ni même à faire agir en donnant à ce mot un sens un peu sérieux, mais à susciter des réactions, des comportements. On la manipule aussi par la publicité, qui vise à faire consommer, consommer n'étant ni une pensée, ni une action, ni un travail, et encore moins une oeuvre, mais seulement un comportement.
Ceci pour justifier ma définition : pour moi, un populiste est quelqu'un qui s'appuie (ou qui s'adresse essentiellement à) sur la populace. C'est-à-dire sur le peuple considéré en masse indifférenciée. Dans ses mots d'ordre ou ses propositions politiques, il va systématiquement privilégier tout ce qui se refère au peuple dans sa masse. Il va s'appuyer sur la psychologie des foules : susciter des mouvements de foule genre panique, lynchage (et toutes les autres réactions qui supposent l'abolition de la personnalité).
Autrement dit, il va systématiquement mettre en avant les passions irrationnelles (peur, colère, etc.) au détriment de la raison.
La relation avec "l'élite" est impliquée là-dedans : il n'y ait pas de populiste qui ne soit pas un pourfendeur des "élites" (c'est impliqué par ce que j'ai dit plus haut : les élites, cela implique une différence, une diversité), celles-ci étant toujours dévoyées. On leur oppose le "pays réel", mais celui-ci, comme j'ai dit, surtout l'explosion des passions irrationnelles dans le peuple.
J'ajoute que c'est une des raisons qui fait condamner le populisme : on le soupçonne d'ouvrir la voie au fascisme parce qu'il y a un précédent. Il n'est pas sûr que tout populisme mène forcément à une société totalitaire, mais en revanche il est assuré que sans les conditions qu'on a rappelées, Hitler n'aurait rien pu faire.