Quelques unes des propositions chocs du rapport sur l'intégration remis au premier ministre Jean-Marc Ayrault.
Comment évoluer vers ce «Nous inclusif et solidaire»mis en avant dans les cinq volets de ce rapport? «L'enjeu de la politique à mener, écrivent les experts de façon fort tortueuse, réside dans le fait de se doter d'un “projet de société” inscrivant la France dans un processus reconnaissant l'atout que représentent sa diversité culturelle et les apports multiples dont elle veut être le creuset et dans un processus de réduction des inégalités sociales et de solidarité nationale envers les catégories sociales les plus précaires, les plus victimes de la mondialisation économique.» À coup de «vivre ensemble égalitaire», de «changement de paradigme», de «production de possibles», tout est mis en place pour «faire de l'en commun».
Les nouveautés apparaîtraient dès l'école maternelle. Avec, par exemple, l'organisation d'«ateliers-débats de philosophie à tous les niveaux scolaires, sur des sujets tels que l'altérité, l'identité, les questions de genre, la religion».
Une «(re)mise à plat de l'histoire de France» est prévue. «Les programmes d'histoire représentent un enjeu important pour prendre en compte la pluralité de la société et favoriser une identification à un Nous inclusif», indique-t-on. Il est donc proposé de «renforcer ou inscrire dans les programmes scolaires (dès l'école primaire) l'histoire des mouvements de population, c'est-à-dire ceux liés à l'esclavage et à la traite négrière (…) sans oublier les Roms». Un «nouveau panthéon» est à créer : «L'histoire enseignée se réfère à des figures incarnées qui demeurent très largement des “grands hommes”mâles, blancs et hétérosexuels. Il y a donc un enjeu fort à faire évoluer le “panthéon” des figures censées incarner les grands mouvements, les époques et les dynamiques plurielles de la société.»
Vient ensuite «la reconnaissance de toutes les langues de manière identique». «La France devrait assumer la dimension “arabe-orientale” de son identité», recommandent les experts, qui préconisent de «valoriser l'enseignement de l'arabe» et de «proposer l'enseignement dès le collège d'une langue africaine». Quant au voile, il pourrait faire sa réapparition à l'école. «La suppression des dispositions légales et réglementaires scolaires discriminatoires, concernant notamment le voile», et en particulier de «la circulaire de 2012 concernant l'accompagnement aux sorties scolaires», est réclamée. «Ces réglementations, précisent les auteurs, outre de comporter une logique discriminatoire, servent de justification pour une extension des pratiques discriminatoires dans de nombreux secteurs (entreprises, services publics…).»
Le «Nous inclusif et solidaire» passerait aussi par l'instauration d'une «journée pour commémorer les apports de toutes les migrations à la société française». De «nouvelles rues et places de villes et de villages» pourraient être nommées «en écho avec cette histoire des migrations». Et un «musée des colonisations» pourrait s'installer «dans l'hôtel de la Marine, place de la Concorde, où fut signé le décret d'abolition de l'esclavage de 1848».
En matière de protection sociale, «il est nécessaire de reconnaître le caractère discriminant de certaines prestations». «À la différence de la CMU dont le bénéfice est soumis à une condition de stabilité de résidence de 3 mois en France, le RSA et l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) ne sont servis aux ressortissants étrangers que s'ils justifient d'un séjour régulier de 5 ans au moins, voire de 10 ans, note le rapport. Il est donc important de parvenir à l'harmonisation des conditions de résidence aux fins de simplification pour, d'une part, un accès aux droits facilité et, d'autre part, éviter les ruptures de droits en rendant la condition de résidence compatible avec les allers et venues entre la France et le pays d'origine». «En outre, poursuit-on, le cadre juridique pourrait être assoupli» afin de permettre «une ouverture du droit à certaines prestations quasi-automatique».
«Désigner, c'est stigmatiser», assènent les experts. Haro, donc, sur ces «descriptions stigmatisantes (telles que “personne d'origine arabe, maghrébine…”, utilisées sans commune mesure dans les conversations, mais aussi par les médias comme par les institutions publiques». «Seules les personnes devraient avoir le droit de se désigner elles-mêmes», affirment-ils. Il s'agit de «revisiter tous les registres lexicaux utilisés par les institutions publiques, les médias et les partis politiques». En ce qui concerne la manière dont les médias parlent des personnes d'origine étrangère, la «première recommandation» est de «ne mentionner la nationalité, l'origine, l'appartenance ethnique, la couleur de peau, la religion ou la culture que si cette information est pertinente». Le «recours à la sanction» pour «contraindre à la non désignation» pourrait être étudié, et un délit de «harcèlement racial» instauré.
Comment mettre en œuvre ce «commun comme nouvelle forme d'universalité au bénéfice de tous» ? La création d'une série d'organismes est préconisée, d'«une instance positive de transformation sociale» à un «fonds d'investissement», en passant par une «instance nationale placée auprès du premier ministre qui garantit le pilotage d'une cohérence de l'action publique en matière de lutte contre les discriminations». Quant à la «Cour des comptes de l'égalité», elle servirait sans doute à contrôler toutes ces nouvelles instances…
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