Sapir : Sur le fait que la crise de confiance risque d’entraîner une panique bancaire à Chypre, et qu’une fuite importante de capitaux a eu lieu, oui, c’est évident. Par ailleurs, il y a encore un autre aspect de ce plan qui va avoir des répercussions, c’est le fait que l’on traite les comptes des personnes physiques et des personnes morales, autrement dit des particuliers et des entreprises, exactement de la même manière. Cela pose un grave problème parce que la trésorerie des entreprises va être ponctionnée, et d’ores et déjà les entreprises russes qui travaillaient avec les banques chypriotes, ont annoncé qu’elles allaient déposer des poursuites, engager des procédures contre le gouvernement chypriote. Ces procédures peuvent être conduites dans le droit chypriote, dans le droit russe, dans le droit européen ou même international.
Bref, on va au-devant de problèmes juridiques relativement complexes, ce qui montre bien que ce plan n’a rien réglé. Il a surtout abouti à inquiéter d’une manière considérable les populations en Europe et, dernier point, il faut se demander ce qui va se passer plus largement au niveau de la zone euro. Il est très clair selon moi qu’il faut s’attendre à voir des fonds actuellement déposés sur des comptes de la zone euro quitter cette zone, et que par ailleurs, au sein même de la zone euro, va s’amplifier le mécanisme qui voit des déposants ou des entreprises transférer leurs comptes de pays du sud vers des pays qui leur semblent sûrs, à savoir essentiellement l’Allemagne.
Sapir : Il y a beaucoup de bêtises, pour ne pas utiliser un mot plus rude, qui ont été dites sur la question de Chypre et de la Russie depuis 10 jours. Premièrement, le modèle économique de Chypre n’est pas uniquement fondé sur le modèle bancaire. En réalité le premier secteur économique de Chypre, c’est le tourisme.
Deuxième point, sur la présence des Russes. Il est vrai qu’elle est importante, mais plutôt en transactions qu’en comptes. Il faut d’ailleurs dire que les immenses fortunes des oligarques russes ne se trouvent pas à Chypre. Elles se trouvent sur des banques luxembourgeoises, anglaises, aux Iles caïmans, ou même à Monaco, mais pas nécessairement à Chypre. C’était plutôt le haut de la classe moyenne russe qui est frappé dans cette histoire. Quoi qu’il en soit, au global, les dépôts des russes représentent certes à peu près 20 Mds d’euros sur les 90 Mds qu’il y a à Chypre, mais il faut savoir que les dépôts des autres nations, autrement dit des grecs, des libanais, des britanniques, représentent environ 17 Mds. Au passage, quand on dit les russes, c’est un terme inexact, ce sont des représentants de l’ex CEI, des kasakhs, des ouzbeks, etc… La part de ces comptes de la CEI est donc importante mais est très loin d’être la seule d’importance significative au sein des non-nationaux.
Dernier point, Chypre n’est entré dans l’Union européenne qu’en 2004, n’a rejoint la zone euro qu’en 2008, et la présence des ex-soviétiques date des années 90. C’est donc en toute connaissance de cause que l’on a admis Chypre dans l’Union européenne et dans la zone euro. Bien des choses qui ont été dites la semaine dernière relèvent donc au mieux de la pure propagande, au pire de la stupidité la plus crasse de la part de ceux qui les ont prononcés.
http://blogdenico.fr/entretien-avec-jac ... sequences/
il parle ensuite de la contagion et de la contamination et de l'Italie spécifiquement.
avec une petite pensée pour Nimz'
La contamination fait référence à des causes réelles, ou à des similitudes de situations. Chypre n’était pas le seul pays de la zone euro à avoir un ratio élevé entre ses activités bancaires et son PIB. C’est le cas de l’Irlande, de Malte, dans une moindre mesure de la Slovénie, et surtout du Luxembourg par rapport auquel Chypre fait figure d’amateur. S’il s’agissait de deux clubs de football, on pourrait dire que le Luxembourg joue en première division, et Chypre en division d’honneur. C’est aussi le cas de l’île de Jersey pour le Royaume Uni. Et donc oui, l’inquiétude que les mesures appliquées à Chypre vont faire naître chez les investisseurs, chez les compagnies qui utilisent ces paradis fiscaux similaires, et chez les déposants, risque de s’étendre. Les cas les plus préoccupants sont certainement Malte et la Slovénie, et l’on risque d’avoir ensuite une espèce de chaîne de contamination.
à la question à qui profite le crime, nous avons l'Allemagne.
la débandade crée par l'Allemagne profite à l'Allemagne.