Bien distinguer révisionnisme et négationnisme
Le révisionnisme est une démarche critique consistant à réviser de manière rationnelle certaines opinions couramment admises en histoire, que ce soit par le grand public (le plus souvent), ou même par des historiens de profession non spécialistes de la période ou du domaine d'études considéré. Il se fonde sur un apport d'informations nouvelles, un réexamen des sources, et propose une nouvelle interprétation (une ré-écriture) de l'histoire.
Comme l'avait découvert Auguste Comte, l'histoire est une discipline fondamentalement ambiguë, où l'interprétation de la réalité historique doit souvent composer avec les vérités de son époque, l'historien se trouvant convoqué à tenir le discours attendu de lui par ses contemporains, sa société, en fonction des préjugés de son temps, de sa nation d'appartenance, etc. Un exemple flagrant, rapporté par Pierre Vidal-Naquet, en est l'œuvre de Jules Michelet, construisant au XIXe siècle une patrie française éternelle, à travers une lecture romantique (et parfois romanesque) des faits historiques.
Un exemple de révisionnisme, à distinguer du négationnisme, concerne le nazisme. La fameuse querelle des historiens ayant eu cours surtout en Allemagne dans les années 1980, fut l'occasion pour certains historiens et philosophes (elle est donc mal nommée) allemands de présenter le nazisme avant tout comme une réaction au communisme et à examiner l'histoire du nazisme d'un point de vue empathique, les deux approches tendant à minimiser la radicalité du nazisme, et également de la Shoah. Ce cas est extrêmement complexe puisqu'il a entremêlé débat méthodologique fondé et motifs politiques plus ou moins avouables.
Il convient de souligner que les négationnistes (voir négationnisme) qui se désignent eux-mêmes indûment comme des « révisionnistes » le font pour tromper le public. Les négationnistes ne révisent pas des interprétations historiques, mais nient la réalité de faits historiques. Leurs motivations sont politiques et leurs méthodes sont malhonnêtes (falsifications en tous genres, contraires aux règles du métier d'historien).
Mentionnons enfin que « révisionnisme » désigne très souvent dans des mouvements d'idées ou des idéologies politiques, des branches dissidentes, remettant en cause la tendance majoritaire. Le « révisionnisme » a également désigné le mouvement demandant la révision du procès Dreyfus.
Le terme a été également abondamment utilisé dans les années 1950 ; les tenants de la vulgate stalinienne taxaient volontiers (entre autres hérétiques) le gouvernement de la Yougoslavie de révisionnisme titiste.
Le négationnisme désigne la remise en cause de la réalité d'autres génocides, qu'on peut légitimement comparer à l'extermination pratiquée par les nazis, et aussi pour d'autres crimes contre l'humanité : génocide arménien par le gouvernement Jeunes Turcs de l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale, Génocide au Rwanda, massacres pratiqués par les Khmers rouges au Cambodge, massacres coloniaux...
La négation d’un génocide (Shoah, Rwanda, etc.) vise notamment, de facto, à obtenir un non-lieu pour ce qui est admis comme un crime, et à retirer aux victimes ou à leurs ayants-droit tout droit à la moindre réparation (en l’absence de crime il n’y a plus ni criminels ni victimes). Le négationnisme peut servir à protéger aussi bien les auteurs d'un génocide, que les complices d'un génocide et les héritiers idéologiques d'un génocide. Le négationnisme a d'autres armes que le discours pour nier des génocides. Le silence sur les événements par tous les moyens, la neutralisation (de la ridiculisation à l'élimination) des personnes qui affirment l'existence de génocides sont des constantes de ce type de démarche. ("Aucun témoin ne doit survivre").
Plus profondément, le déni du droit à l'existence, et même la prétention à avoir fait œuvre de purification, qui caractérisent le génocide se prolonge tout naturellement dans le déni du crime. Pour le génocidaire, la victime n'avait pas le droit d'exister, elle n'existait pas, il n'y a pas de crime possible. Il ne s'agit même pas tant de cacher son crime (but qui peut par ailleurs être présent) que de pousser à son terme la logique d'élimination de la victime. Dans ce contexte le négationnisme apparait comme la continuation du génocide, ce qui rend le négationnisme aussi insupportable. Sans crime, nulle victime : l'extermination est complète, jusque dans la mémoire. Ainsi, on peut dire que les idéologies qui ont conduit à des génocides portaient toutes en elles leur nature négationniste. Inversement on peut dire que sans négationnisme le génocide n'est pas achevé, il reste incomplet, c'est ce qui rend si nécessaire le souvenir.
source : wikipedia.