Les travaux de Bernard Lugan ont fait l'objet de critiques de la part de plusieurs universitaires30,31. Ces critiques sont de plusieurs ordres :
Elles affirment que de nombreuses et importantes erreurs factuelles seraient présentes dans ses travaux32. Ainsi dans son compte rendu de l'ouvrage Le safari du Kaiser (écrit en collaboration avec Arnaud de Lagrange), René Pélissier parle de plusieurs dates fausses, d'une « méconnaissance de la situation locale » et décrit un livre au « parti hybride mi-romancé, mi-historique » marqué par la « nostalgie d'une « mystique teutonique »33 ». Il souligne cependant également le caractère unique des scènes ayant comme théâtre le Congo belge. Toutefois cet ouvrage n'a jamais été présenté par Bernard Lugan comme un travail scientifique universitaire mais comme une fresque historique romancée.
D'après Sophie Pontzeele, institutrice et membre de Lutte ouvrière34 et sociologue de formation, Bernard Lugan ne choisirait que les sources favorables à sa conception des choses, utilisant essentiellement les sources coloniales pour décrire les sociétés africaines, et en particulier rwandaise35. Pourtant les thèses de Bernard Lugan se sont justement appuyées sur plusieurs centaines de témoins locaux en mettant en relief l'importance de la tradition orale dans ces sociétés36. Toujours pour Sophie Pontzeele, il n’est pas « un spécialiste du Rwanda reconnu par ses pairs » et ses thèses sont disqualifiées « auprès des chercheurs spécialistes de la région des Grands lacs africains » 37.
Les critiques portent sur l'usage du concept de « race » pour distinguer certaines populations africaines, tout particulièrement les Hutu et Tutsi. Ainsi Marcel Kabanda, chercheur en histoire africaine affirme que l'interprétation de Bernard Lugan sur le conflit Hutu-Tutsi repose sur le postulat d'une « domination raciale »38 reposant sur « un ensemble de présupposés qui mériteraient d'être documentés, vérifiés, explicités, expliqués » et ne répondant pas aux connaissances de la « génétique actuelle »39. Bernard Lugan répond à ses détracteurs qu'il s'appuie sur des travaux anthropologiques40.
Selon Catherine Coquery-Vidrovitch, professeur à l’Université Paris-VII et proche du Front de Gauche, Bernard Lugan « multiplie les ouvrages les plus tendancieux sur l’histoire de l’Afrique » et « vise à présenter la colonisation française comme un bienfait de l’humanité »41.
Pour Jean-Pierre Chrétien, le travail de Bernard Lugan est « excessif et marginal ». Il s'oppose à l'idée, qu'il prête à Bernard Lugan, d'une Afrique anhistorique marquée par « un ordre naturel africain » caractérisé par « la domination de certains et par la soumission des autres », par « une perception du temps radicalement différente », par « des rites et des danses42 ». Pour sa part, Bernard Lugan a critiqué les travaux et la méthodologie de Jean-Pierre Chrétien et de « l'École historique » qu'il anime. Celle-ci lui semble largement insuffisante pour généraliser à échelle du continent africain une création coloniale des réalités ethniques africaines43.
Lors d'une invitation sur la chaîne télévisée Itélé, le journaliste Robert Menard a critiqué les propos de Bernard Lugan de « moralement insupportable » pour ses idées sur le plan de partage territoriale racialiste de l'Afrique du Sud et il rajoute et qualifie les dires de l'historien de « monstrueux » pour ce qu'il prétend d'un Nelson Mandela « ayant tout raté » et « n'ayant rien fait du tout »27.
Selon Nicolas Bancel (maître de conférences à l'Université Paris XI, vice-président de l'ACHAC (Association pour la Connaissance de l'Histoire de l'Afrique Contemporaine)44) : « Bernard Lugan, rejeté par la quasi-totalité des africanistes, représente le courant le plus radical de la pensée racialiste. C'est le prêt-à-penser raciste, qui doit expliquer tous les conflits interafricains actuels par le déterminisme de la race. Inutile de dire que des chercheurs ont, depuis longtemps, fait litière de cette explication. L'essentialisation des différences ethniques est un processus politique, dont la genèse est coloniale45 ».
Le 5 décembre 1981, le président de l'Université nationale du Rwanda, Emmanuel Ntezimana, pour défendre les travaux de Bernard Lugan, écrit : « Je soussigné Emmanuel Ntezimana, doyen de la Faculté des Lettres de l'Université nationale du Rwanda certifie que Monsieur Bernard Lugan, chef du département d'histoire de 1977 à 1981, responsable des coopérants français en 1981 mène des travaux de recherche originaux qui lui permettent d'assurer un enseignement spécifique au niveau de la licence et d'enrichir la connaissance du passé du Rwanda par ses nombreuses publications qui font autorité. Sa disponibilité tant à l'égard des étudiants rwandais que de ses collègues, ses scrupules d'universitaire, son inlassable dévouement au service de la faculté, son attachement au Rwanda, la qualité de ses travaux, le niveau de son enseignement, sa ponctualité, sa bonne humeur et son sens de la réserve en font un coopérant de toute première valeur. L'Université nationale du Rwanda désire que cet enseignant-chercheur d'élite continue à faire partie de son corps enseignant46. »
En août 2001, lors de la conférence de Durban sur le racisme, Bernard Lugan est pris à parti dans un discours par le président sénégalais Abdoulaye Wade auquel il s'était opposé quelques années plus tôt dans un débat sur le colonialisme et le post-colonialisme, et qui reproche à Bernard Lugan de n'accorder « aux Africains qu'une place dérisoire dans l'histoire47 » (Le Quotidien de Paris du 26 février 1990).
Dans un droit de réponse publié le 29 décembre 2001 sur Internet48, Bernard Lugan s'estime victime d'un « procès en sorcellerie », lui « l'homme à abattre » dont « analyses et démonstrations dérangent. Elles sont en effet à contre-courant de l'histoire officielle marxisto-tiers-mondiste et des dogmes de l'afro-centrisme. ».
pas mal de critique à son égard quand aux choix de ses sources...