C'est bien que chocolat poste sur la persécution des musulmans en Birmanie «la minorité la plus persécutée du monde» selon l'ONU:
L’interminable persécution des Rohingyas
Des émeutes entre les bouddhistes et la minorité musulmane privée de droits dans l’ouest du pays ont fait plus de 80 morts depuis début juin
Mais qui sont ces Rohingyas, ces parias de l’Asie que même l’«héroïne birmane de la démocratie», Aung San Suu Kyi, a hésité à défendre durant son séjour en Europe? Ces dernières semaines, les émeutes qui ont éclaté en Arakan – l’Etat Rakhine, en birman –, dans l’Ouest birman, entre ces musulmans minoritaires et la majorité bouddhiste, ont fait officiellement plus de 80 morts et 54 blessés. Le programme alimentaire mondial de l’ONU a distribué une aide d’urgence à 60 000 personnes, affirmant que 90 000 déplacés avaient besoin d’assistance.
Roms de l’Extrême-Orient
Des ONG craignent un bilan bien plus élevé. Certaines sources soupçonnent les forces de sécurité birmanes d’avoir prêté main-forte aux bouddhistes durant les pogroms anti-musulmans.
L’origine même du nom de Rohingya est controversée, les historiens birmans soutenant que personne n’en avait entendu parler avant les années 1950. Appuyant de ce fait la thèse du gouvernement birman, qui leur nie tout droit de citoyenneté et les considère comme des étrangers, des migrants illégaux.
Physiquement semblables aux Bangladais, s’exprimant dans un langage proche du bengali parlé à Chittagong, dans le sud du Bangladesh, ils auraient des origines diverses, sans doute descendants des Arabes, Mongols, Turcs, Maures ou autres Perses débarqués en Asie du Sud-Est dans la grande bousculade des siècles.
Selon les Nations unies, les Rohingyas sont «la minorité la plus persécutée du monde». Ils seraient 800 000 dans l’Etat de l’Arakan, surtout regroupés dans des zones près de la frontière du Bangladesh. Dans ce dernier pays, où ils se sont enfuis en masse à plusieurs reprises pour fuir la répression de la junte birmane alors au pouvoir – notamment en 1978 et en 1991-1992 –, plusieurs centaines de milliers de Rohingyas sont restés dans les camps de réfugiés au Bangladesh. Beaucoup survivent dans la misère absolue.
Personne ne veut des Rohingyas. Ce sont les Roms de l’Extrême-Orient, réprimés par le régime birman depuis des lustres, traités au mieux de «Bengalis», au pire de «monstres noirs». Ils sont même refoulés en ce moment par les gardes-frontière bangladais. Le Bangladesh, dont la solidarité «islamique» de jadis est désormais dépassée, ne veut pas ajouter à ses propres problèmes l’arrivée massive de ces damnés d’entre tous.
A Rangoon, une vague de haine a déferlé contre eux sur le Web, où on les compare à des «chiens, des voleurs, des terroristes». Un internaute, commentant une photo montrant un cadavre de Rohingya durant les dernières émeutes, a écrit cette phrase: «La mort, c’est encore trop peu pour eux comme punition!»
Confiscation des terres
Même d’anciens dissidents emprisonnés estiment qu’ils devraient retourner «chez eux» et quitter le pays. Chez eux? Ils n’en ont pas. Implantés en territoire birman au minimum depuis le règne de l’Empire britannique, ils n’ont nulle part où aller. Le gouvernement leur a nié tout droit de citoyenneté.
En 1982, une loi les a rendus officiellement apatrides. Les Rohingyas ne sont pas reconnus comme minorité ethnique dans un pays où 130 ethnies sont répertoriées. Ils rencontrent des difficultés pour se marier, pour envoyer leurs enfants à l’école, ne peuvent aller à l’université. Ils sont les cibles premières – ou l’ont été – des exactions de l’appareil d’Etat durant l’ancienne junte: extorsions, confiscation des terres, travail forcé.
Certaines voix modérées déplorent que la levée partielle de la censure et la poursuite d’un processus de démocratisation par l’actuel gouvernement aient permis l’émergence d’une liberté d’expression prenant une tournure gênante quand se réveillent les vieux démons du racisme et de la discrimination religieuse ou ethnique.
Tout a commencé cette fois début juin, après le viol et le meurtre, le 28 mai, d’une jeune Birmane bouddhiste de 28 ans, Ma Thidar Htwe. Après que la rumeur de la culpabilité de Rohingyas s’est répandue, une foule de bouddhistes attaquent un bus occupé par des musulmans. Ils lynchent à mort dix d’entre eux. S’engage alors le cycle des représailles, les Rohingyas mettant à sac des villages d’Arakanais bouddhistes avant d’être eux-mêmes assaillis et chassés de leurs terres. Le président birman, Thein Sein, impose alors l’état d’urgence et un couvre-feu dans les zones troublées. La censure, dont les autorités avaient annoncé la suppression définitive le 1er juin, est rétablie – ou non levée – à propos de toute information sur les émeutes interconfessionnelles.
Le 19 juin, un tribunal de l’Arakan a condamné à mort deux hommes accusés du viol et du meurtre. Ils avaient auparavant été identifiés par la presse birmane comme des «musulmans bangladais», terme qui définit les Rohingyas, même s’il y a aussi en Birmanie des musulmans d’origine indienne ou bangladaise qui ne sont pas Rohingyas.
Le déferlement de violence fait craindre que la tension entre musulmans et bouddhistes s’étende à d’autres régions du pays, de nombreux disciples du prophète originaires du sous-continent indien ayant émigré en Birmanie durant la colonisation britannique. Dans un pays déchiré depuis son indépendance par de multiples guerres ethniques, il y a de quoi s’inquiéter.
Même Aung San Suu Kyi a refusé d’intervenir clairement en faveur des Rohingyas, redoutant vraisemblablement les critiques de ses partisans si elle osait défendre ces hommes sans existence.
Source: http://www.letemps.ch/Page/Uuid/4c75e16 ... 1eae49%7C0