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Dans le Parc de Montretout (Saint-Cloud).
Au numéro 4, habita Lino Ventura. Au numéro 8, réside une partie de la famille Le Pen.
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Maintenant un peu d'histoire:
Le Parc de Montretout est l'un des plus anciens lotissements murés de France. Il a été loti à partir de 1855.
Comme de nombreux lotissements de ce type construits au XIXème siècle pour les classes aisées, le Parc a été loti sur les terres d'un ancien château - sur une toute petite partie des terrains du Château de Saint-Cloud.
Ce terrain était autrefois occupé par l'aile des officiers du Château. Le bâtiment des officiers existe encore.
Les propriétés du Parc n'ont pas toutes été construites à la même époque. Les premières parcelles ont été construites dans les années 1850, et les dernières dans les années 1970.
Il en résulte une grande variété architecturale ainsi qu'une relative mixité d'occupation des parcelles. Le Parc contient aussi bien des appartements (de standing) que des hôtels particuliers d'exception
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"On aura tout vu à Montretout.".
C'est une maison couleur brique au sommet de la colline. On y grimpe par une route qui serpente en larges virages à travers Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), depuis les méandres de la Seine située quatre cents mètres en contrebas. Un coup de volant serré à gauche, un porche et on s'engage sur une allée privée avec, de part et d'autre, des villas majestueuses à l'ombre de grands arbres. «Ça me rappelle un peu Beverly Hills...», s'est dit le photographe Raymond Depardon ce jour du printemps 1988 où il a emprunté ce chemin. Au bout de la voie pavée, au 8, parc de Montretout, surgit la maison de Le Pen. Ou plutôt des Le Pen, tant l'antre est devenu depuis trente ans le QG du clan familial qui fait prospérer les intérêts de sa petite entreprise politique. Une maison d'aspect élancé, un rien brinquebalante, avec la tribu Le Pen dans le rôle de la famille Adams. «Une belle baraque un peu rétro, du genre Psychose», résume Depardon venu photographier le seigneur des lieux posant avec ses chiens, dans le parc.
Les conditions dans lesquelles Le Pen a hérité de la bâtisse en 1976 sont célèbres : un richissime cimentier, éthylique et désoeuvré, Hubert Lambert, noyé dans l'alcool et les médicaments à l'âge de 42 ans, la lui a léguée parce qu'il voyait en lui le sauveur qui allait restaurer la royauté... Avant de pouvoir jouir du magot, le patron du FN a dû affronter une procédure judiciaire, puis négocier, à l'abri du regard des juges, avec un cousin du défunt.
Le vaudeville qui se joue depuis trente ans derrière ces hautes grilles en fer forgé est moins connu. Crises de nerfs, portes qui claquent et javas dispendieuses, le tout sur fond de drames familiaux et de règlements de comptes politiques, ainsi va la vie à la cour des Le Pen. Une pièce dont les acteurs n'acceptent de parler qu'à visage couvert, même lorsqu'ils ont quitté la scène de longue date... A Montretout, trois univers se croisent, se mêlent, s'espionnent. La politique, avec une demi-douzaine de proches collaborateurs qui se partagent quelques bureaux inconfortables au rez-de-chaussée et au premier étage ; la famille avec les deux filles restées fidèles au père, installées avec époux et enfants, au second pour l'une, Yann, et «au fond du jardin», dans les anciennes écuries élégamment restaurées, pour l'autre, Marine ; et les fêtes, souvent clinquantes et parfois grandioses, «toujours tardives et avinées», aux dires d'un ancien habitué, le plus souvent dans le jardin.
La Cour au-dessus du «Paquebot»
De l'extérieur, la bâtisse bourgeoise, d'époque Napoléon III, en impose avec ses 430 mètres carrés habitables et 11 pièces réparties sur trois niveaux, ses bâtiments annexes, et son gigantesque parc en pente qui domine la tour Eiffel et offre une vue imprenable sur toute la capitale. «Hôtel particulier dans parc privé et sécurisé. Vastes réceptions sur terrain arboré de 4 670 mètres carrés. Plusieurs dépendances en annexe. Nombreuses possibilités», résume l'annonce diffusée par Propriétés de France, une agence immobilière spécialisée dans les luxueux manoirs de l'Ouest parisien. Car, à 77 ans, Jean-Marie Le Pen a décidé de vendre. Liquidation totale ! Le poids des ans, le fisc de nouveau menaçant : le vieux chef de l'extrême droite éprouve le besoin de se renflouer. Il quémande la coquette somme de 6,45 millions d'euros, un montant surestimé d'un demi-million d'euros d'après plusieurs spécialistes de la pierre.
Depuis quinze ans, il vit chez sa seconde épouse, Jany, à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine). Un jardin de 1 645 mètres carrés, 200 mètres carrés habitables, une piscine : tout le confort nécessaire au repos du guerrier frontiste. A Montretout, Le Pen n'a gardé que ses bureaux. Symbole de son pouvoir, il domine de quelques centaines de mètres le siège du parti. Un ancien du cabinet résume : «Il y a le gouvernement et la Cour.» Quand celle-ci veut mendier une faveur, elle doit gravir la colline. Une fois dans la place, le «sujet» grimpe un majestueux escalier en bois, passe devant un grand tableau qui représente le chef, jeune, en tenue d'officier, avant de pénétrer dans une pièce surchargée : une statue de Jeanne d'Arc, une longue vue orientée du côté du balcon, un canapé d'angle un peu kitsch, une petite table autour de laquelle le noyau de fidèles se réunit chaque lundi matin pour «une discussion très café du Commerce» sur l'actualité du week-end. Et «le» fauteuil dans lequel le «Président» attend son hôte. De l'autre côté du couloir, la dévouée Marie-Josée veille et dépouille le courrier.
Bal masqué avec le Raïs
Même si l'endroit fut synonyme d'aisance et de luxe soudains après des années de vaches maigres, Le Pen n'a jamais vraiment aimé vivre à Montretout. Question de voisinage d'abord : les grandes familles bourgeoises qui peuplent le parc n'ont guère apprécié de voir débarquer ce parvenu peu au fait des bonnes manières. Pas présentable, ce Le Pen qui venait troubler la quiétude des lieux avec les membres du DPS (Département protection-sécurité, le service d'ordre du FN) montant la garde devant la maison et une voiture de police stationnée un peu plus loin. Pour s'intégrer à son nouvel environnement, Le Pen a fait quelques efforts. Au début des années 80, il organise des réceptions bien fréquentées : Alain Delon, le prince Sixte de Bourbon-Parme, le PDG de la compagnie des bateaux-mouches ou encore le giscardien Jacques Dominati, parrain de sa fille aînée, Marie-Caroline, viennent se désaltérer au champagne. Mais, à mesure que Le Pen devient infréquentable, le beau linge déserte l'endroit.
C'est la «bande des trois filles», adolescentes fêtardes, qui prend possession des lieux. Chacun de leurs mariages, ou remariages, est l'objet d'une fiesta arrosée dans le jardin avec plusieurs centaines d'invités. Le rituel de l'accueil est immuable : posté dans le hall de la maison, au pied de l'escalier, Jean-Marie Le Pen empoigne chacun des convives pour une photo-souvenir à ses côtés. Beaucoup sont flattés, d'autres crispés. Cédant «la place à la jeunesse», il laisse ensuite le champ libre aux joyeux drilles qui amusent ses filles, parmi lesquelles les pasticheurs du groupe Jalons emmenés par Bruno Tellenne, alias Basile de Koch, le frère de Karl Zéro. D'autres événements plus surprenants donnent l'occasion de festoyer. Le 15 janvier 1991 au soir, c'est le début de la guerre du Golfe. Les premiers obus tombent sur Bagdad. Jean-Marie et Jany reçoivent pour une soirée costumée. Le président du FN est déguisé en archiduc d'Autriche, Jany en tsarine. On rigole, on porte des toasts en hurlant «Yankee Go Home !», on trinque à la santé du «peuple irakien» et à la gloire du «raïs». Et un invité fait un triomphe déguisé en... Saddam Hussein !
Le mélange des genres procure des avantages matériels : l'essentiel des frais de réception et d'entretien de la maison est pris en charge par le parti. En revanche, ni le sérieux de l'activité politique «du charlatanisme qui s'exerce dans un joyeux bordel», selon un «ex» du cabinet , ni la solidité de la famille ne résistent à la promiscuité.
Pierrette et l'urne funéraire
Ainsi, à l'origine, la chambre du couple Le Pen est au premier, le bureau du secrétariat donnant sur la salle de bains. En octobre 1984, Pierrette, la première épouse, n'y tient plus. Elle se sent cloîtrée et étouffée. Alors que Le Pen est à Strasbourg pour une session du Parlement européen, elle s'enfuit du jour au lendemain, ses bijoux et ses fourrures sous le bras. Elle décampe avec un journaliste qui s'était installé à demeure pour écrire une hagiographie du «Président». Mais le départ est si soudain que Pierrette en oublie... les cendres de sa mère. L'urne reste dans un placard qu'aucun collaborateur de Le Pen n'ose plus ouvrir. «On en rigolait discrètement mais on trouvait ça glauque...», se souvient une ancienne collaboratrice. Après de longs mois de négociations, Le Pen finit par restituer le «trésor» à Pierrette.
A l'époque, c'est le garde du corps, Freddy Moreau, ancien catcheur devenu célèbre sous le nom de scène de «Bourreau de Béthune», qui habite dans le bâtiment annexe du jardin. Le couple de domestiques, Danièle et José, dont Le Pen aime à répéter qu'ils sont «Mauriciens», y logent aussi. La villa est ouverte à tous les vents. N'importe qui débarque, donne son avis, gagne l'oreille de celui que tous appellent «Président». Chargé de la campagne élyséenne de 1988, le méticuleux Bruno Mégret vient rendre compte tous les jours avec ses dossiers sous le bras. Il s'agace de devoir discuter des slogans et des affiches avec le chauffeur, la gouvernante ou, pire encore, les gendres. Ceux-ci se succèdent et ont, tour à tour, une grande influence. Dans les années 80, le premier époux de Marie-Caroline, l'aînée, Jean-Pierre Gendron, tient la corde.
Dans les années 90, c'est le mari de la deuxième fille, Yann, Samuel Maréchal, qui conquiert les attentions de «beau-papa». Mais Marie-Caroline se remarie avec Philippe Olivier, proche de Bruno Mégret. Les deux couples cohabitent à Montretout. A partir de 1997, au fur et à mesure que s'attise la guerre des clans, la table familiale devient glaciale. Le dimanche soir, les gendres s'empaillent, entre la poire et le fromage. Les soeurs s'y mettent. Marie-Caroline se fait traiter de «collabo». La benjamine, Marine, est, elle, mariée à l'époque à un commercial qui se contente de vendre du matériel au FN. C'est la plus proche de son père. Celui-ci l'installe au parti et la charge d'éplucher les notes des mégrétistes pour leur couper les vivres. Surnommée «la policière du Paquebot», Marine remonte chaque soir à Montretout faire son rapport. Elle serine à son père qu'il est entouré de «comploteurs».
Pendant ce temps, au rez-de-chaussée, la bande de Samuel Maréchal débarque «pour faire la bamboula». Le matin, de retour à Montretout, il n'est pas rare que les membres du cabinet de Jean-Marie Le Pen s'aperçoivent que leurs bureaux ont été fouillés. Epiée, évincée du clan, Marie-Caroline craque en février 1999 et choisit la même voie que sa mère quinze ans plus tôt : la fuite. Depuis, de nouveaux courtisans, plus jeunes, plus souriants, plus photogéniques, se sont installés à Montretout. Une bande de trentenaires piochés dans le carnet d'adresses des deux filles restées au logis. Ils s'emploient à déjouer les traquenards qui pourraient nuire au vieux chef. Et à sa fille, Marine. Celle-ci se désole à l'idée de quitter une maison où elle est arrivée à 8 ans : «Et dire que je viens de faire des travaux !...» Mais à défaut des murs, celle que Pierrette a décrite comme le «clone de son père» espère encore hériter du fonds de petit commerce familial.
27 janvier 2006
http://www.liberation.fr/grand-angle/01 ... montretout