visiteur
1- Vous souhaitez un exemple. Prenons le discours des humanistes à propos de la peine de mort. Lorsqu'il est question de son abolition, on verse toujours dans la sentimentalité, en plus d'un homme dont il faut considérer la nature quels que soient les actes : il est homme, on ne peut lui faire cela, presque un tabou.
Même lorsque l'on évoque l'acte du criminel, il est alors comme dit précédemment affaire de circonstances, ou résultat d'une condition, produite par la société : l'homme est bon par nature, la société le corrompt. On retrouve Jean-Jacques. L'humaniste défend l'idée qu'il y avait presque nécessité d'un tel acte, qu'il était un destin : il n'est plus question d'imputer totalement l'acte à la volonté de l'homme : on nie selon le cas plus ou mon totalement le libre - arbitre.
2- Considérant l'espèce comme si elle existait en tant que sujet ou substance première, et non en tant que nature ou essence en chaque homme, les humanistes ne cessent de nier la réalité. Pour eux, il y a l'Homme, pas des hommes qui sont sujets ou individus : il y a l'Homme, pas des anglais ou français, pas des chrétiens ou athées, pas des petits ou grands même si vous voulez ; et ces hommes ont des droits juste parce qu'ils sont de l'espèce humaine, non en considération d'une qualité comme la citoyenneté, ou d'un mérite, d'une situation acquise par le travail par exemple, ou acquis par des familles au cours de l'histoire passée.
Au contraire même de leurs pères libéraux comme Locke, ils ne se réfèrent plus à une réalité indépendante de l'homme, à une quelconque loi naturelle, à quelques exceptions près, car ils ne sont plus protestants ou déistes, mais athées. Ainsi, ils définissent de plus en plus les fameux droits en question à leur simple fantaisie. Ils se contentent de réclamer des droits, au nom d'une autre notion qu'ils ne définissent pas plus : " la dignité humaine", comme une chose allant de soi.
3- Je me contente de défendre une cité et une institution toujours attaquées, injustement, car les modernes sont les ennemis du catholicisme et de tout ce qu'y rapporte. Ils sont toujours dans l'esprit de Voltaire : écrasez l'infâme. Je ne m'oppose pas à une critique pondérée, que ce soit de l'Eglise catholique, ou d'une société chrétienne : j'admets qu'elles ont leurs mérites et leurs défauts.
Je ne sais ce qu'il naîtra des événements, je ne suis pas Cassandre. Je sais par contre que je vis dans une cité, où l'idée de res publica ou de bien commun a presque totalement disparu : qu'il existe une plèbe qui souhaiterait gouverner que pour elle même, et une élite qui elle aussi ne souhaite que gouverner pour elle-même. L'idée de constitution droite : que le souverain gouverne en fonction d'un bien commun pour l'ensemble de la cité n'existe presque plus.
Je demande aussi à ce souverain, qu'il soit un homme ou une assemblée, un ensemble d'hommes, qu'il sache encore ce qu'est la politique, qu'il ne la confonde pas avec l'art de l'intrigue, ou l'idée de contenter ses séides : l'art de constituer une cité, et de la conserver juste ou saine afin qu'elle soit pérenne ; ce qui signifie autant conserver les institutions en fonction d'un bien commun donné, qui reste à définir, que conserver les hommes justes, par une politique d'éducation relative à une doctrine donnée, qu'il faut aussi accepter et diffuser, et à condition qu'elle soit de nature à permettre cette fin.
Même lorsqu'il est question de bien commun, dans notre cité, je constate que nous ne le définissons jamais : qu'il oscille en fonction des événements ou des questions abordées pour le politique entre la sécurité un peu comme chez Hobbes, la garantie des droits naturels comme chez Locke, et parfois le simple fait de produire le plus de richesses possibles, un peu comme les anciennes cités commerçantes, Carthage par exemple.
Quant à l'éducation, il est évident que la doctrine des droits de l'homme, en tant qu'elle est universelle, s'oppose à l'idée de citoyen, être esclave/serviteur en tout de la cité, l'adopter comme suprême mesure. Ajoutons que l'humaniste, homme que nous formons, qu'il soit ensuite libéral, socialiste... ne sait plus ce qu'est l'éthique : soumettre ses passions à sa raison, savoir vaincre ses désirs, car il ne porte plus une conception du bien ou vrai, en plus des raisons évoquées dans le post précédent ; pour lui tout est affaire d'opinion, relative à l'homme simplement : il peut tout accepter. Il est un simple songe-creux, qui au quotidien se conduit au gré de ses désirs ou caprices.
Si nous ne savons plus ce qu'est la politique, ou plus exactement que nous nous en faisons une très mauvaise conception, et que notre doctrine n'est plus de nature à former un homme honnête, comment voulez-vos que notre cité/société ne dépérisse pas ? Comment voulez-vous que l'amitié ou fraternité règne si les hommes sont injustes ? Comment voulez-vous aussi que l'amitié règne si vous admettez par la tolérance que chacun peut avoir sa doctrine religieuse ou philosophique ?
4- Parlons maintenant de l'état des relations internationales. Vous avez raison : nous vivons en paix, en Europe. Mais vous oubliez, que la paix ne signifie pas l'amitié entre les sociétés, qu'elle n'empêche pas la concurrence ou rivalité entre les nations, que ce soit par le commerce, la propagande, la recherche scientifique même, la politique en un mot ; raison pour laquelle, j'affirmais précédemment que les sociétés connaissent soit la guerre directe, soit la discorde ou guerre indirecte.
On peut toujours affirmer que pour réglementer les relations entre Etats, il suffit que les hommes des sociétés en question, et les Etats à leur suite adhèrent à une doctrine commune ; qui permet de définir le juste et l'injuste en matière de diplomatie et de guerre ; et de former alors dans chaque société des hommes d'Etat honnêtes, qui se plient à une éthique relative à cette doctrine ; et non des princes ou gouvernants machiavéliens, qui au nom de la raison d'Etat se permettent à peu près toutes les transgressions plus l'on s'éloigne de la lumière.
C'est oublier qu'aujourd'hui, la politique des cités, comme la politique entre les cités, ne dépend pas que des hommes d'Etat, car les sociétés ont laissé émerger des individus qui par leurs affaires sont devenus presque aussi puissants et influents que les Etats en question, et dont il faut alors considérer l'action. Nous n'avons pas voulu freiner par la politique le développement économique. Nous ne l'avons même pas envisagé, car nous ne comprenons même plus le sens de l'opposition entre économie et chrématistique : nous en récoltons aussi bien les avantages, que les inconvénients.