1- J'aurais été plus inspiré, si j'avais dit : un droit ou une liberté. Le sujet suivant aurait été résumé en une formule. Une fois l'avortement admis, serons-nous libéraux ou socialistes sur la question, ou ce qui se produit le plus souvent, entre les deux ?
Le remboursement de l'IVG est socialiste. Alimenter un réseau d'adoption national serait une autre façon de régler le problème en socialiste. Par socialiste, j'entends le fait que la communauté prenne en charge les conséquences de l'acte d'une façon ou d'une autre à la place des individus concernés, des responsables, ce qui suppose financement par l'impôt, administration... Cette forme de charité que nous pratiquons implique que « la communauté », « l'Etat » si vous préférez, soustrait au moins en partie les individus aux conséquences de leurs actes : plus ou moins assistance.
La solution libérale par excellence serait de garantir la liberté ou le droit, et de laisser les individus se débrouiller, quant à l'offre et à la demande. Ce devient déjà un peu moins libéral dès lors que la communauté commence à organiser l'offre : des centres où l'avortement est pratiqué, des médecins payés pour cela, des gens qui informent les adolescents et jeunes adultes...
Pour continuer, la solution totalement libérale implique que la charité, si charité il doit y avoir, vienne d'autres individus : d'une certaine façon, elle est plus optimiste quant à l'homme que la solution étatique. Je veux dire, que l'étatiste aura tendance à penser qu'il est bien imprudent de s'en remettre aux hommes, sans Etat, comme s'il s'agissait de s'en remettre « au hasard ». Elle implique aussi que chacun dispose à sa convenance de ses deniers, plutôt qu'un quelconque impôt qui règle la question : dans le pays socialiste précédent, vous pouvez militer contre l'IVG, vos impôts contribuent quand même à son financement.
Elle est susceptible aussi d'impliquer une certaine dureté, si l'on s'émancipe de l'argument libéral précédent : vous avez fait les idiots ? Il s'agit de votre responsabilité ! D'autant plus, que les libéraux sont enfoncés jusqu'au cou dans le mythe de l'homme « rationnel » : est vertueux l'homme qui agit conformément à la raison ; la responsabilité est l'aiguillon ou la sanction qui permet de guider l'action.
Il y a une part de vrai : certains hommes seront plus responsables, s'ils doivent assumer les conséquences de leurs actes. Toute la question serait de déterminer la proportion. Les hommes ne se caractérisent pas simplement par leur aptitude à raisonner, mais aussi par des sentiments, un caractère qui implique telles faiblesses, telles vices, des mauvaises décisions, des conduites sociales partagées mais pas très intelligentes, je pense au tabac et à l'alcool comme pièges de soirée... Il me semble que les socialistes sont plus réalistes sur ces points que les libéraux qui envisagent l'individu comme rationnel et abstraction faite de sa situation, de ses relations, de sa place en société en un mot.
Alors, au risque d'être une nouvelle fois décevant, je ne sais pas quelle est la meilleure façon de faire. Je pense que l'espèce d'entre-deux qui existe dans beaucoup de sociétés résulte de la part de vrai qui existe dans les deux discours. Un compromis, en plus de violer la logique, ce qui n'est pas si grave, si l'on ne cède pas au mythe précédent, n'est pas forcément une meilleure solution.
Neodadais -être alors contre l'ivg ou plutôt uniquement contre son remboursement par la société, mais alimenter un reseau d'adoption national et accompagner psychologiquement les patients ?
Alimenter un réseau d'adoption serait encore bien plus compliquée que l'IVG : nous parlons de plus de 200 000 cas par an, à traiter, à caser, avec risque d'augmentation. Imaginez le système à mettre en place, son coût, son administration ou gestion... Surtout que la réflexion libérale mentionnée précédemment peut se nourrir de cette pièce : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications-communique-de-presse/etudes-et-resultats/le-nombre-des-interruptions-volontaires-de
Vous savez : quoi que nous en pensions, il est bien plus simple de liquider les embryons et fœtus, comme jadis les enfants étaient exposés dans certaines sociétés, tués dans d'autres. Notre mythe du progrès « moral » de l'homme n'en sort pas indemne : le moyen a changé, et la période de la vie à laquelle il est appliqué, voilà tout. Nous ne pratiquons plus l'infanticide, mais nous pratiquons l'avortement en masse.
Neodadais -être pour l'IMG, en étendre la définition et en simplifier la charge administrative.
L'IMG implique la question de l'eugénisme. C'est un cas qui pourrait mettre en lumière l'entre-deux : surtout pas d'eugénisme d'Etat, en raison des vilains nazis, mais quand même remboursement et machin. Nous sommes favorables à un eugénisme pratiqué par les individus, en l'occurrence les parents, mais quand même la collectivité doit venir en aide.
Il faut aussi se souvenir que nous pratiquons, mais nous culpabilisons aussi : nous employons des trésors de rhétorique pour expliquer que ce n'est pas de l'eugénisme.
Dans le cas de l'exposition, il était souvent question d'eugénisme aussi. Comment un souverain, ou ses agents, qui se soucient de la pérennité de la cité, pourraient-ils omettre cette question ? Il faut bien se soucier de la qualité des hommes, et limiter le nombre de très peu utiles, non ? On veut bien avaler la chose, avec l'IMG, mais pas le mot ?
D'ailleurs, ce n'est pas tout à fait notre sujet, mais il est tout à fait possible qu'il existe quelques facteurs "dysgéniques" dans notre société. Je ne me prononce pas plus, car cela touche quand même à une discipline que je ne maîtrise pas, la biologie.