LES CROISADES, UN ÉTRANGE PETIT ÉPISODE DE L'HISTOIRE DU MONDE...
Oh le beau symbole que celui des croisades ! Voilà qui touche en plein cœur les croyances des uns et des autres ! Elles sont le sujet idéal pour nourrir la confrontation entre l'Orient et l'Occident, voire, le vecteur qui démontre la supériorité des Européens.
Peux t'on regarder cet épisode de manière moins simpliste ?
La réalité historique – comme presque toujours- remets les choses à leur place. Du côté Occidental, depuis le XIXes, tout l'appareillage univoque : Richard cœur de lion, Saint Louis, récupérer le tombeau du christ... sert à mobiliser une conscience collective en sa faveur. Sus aux infidèles !
Du côté Oriental pour Nasser et Saddam Hussein par exemple, l utilisation de la vie mythologisée de Saladin sert à se poser en héros du peuple Arabe, sus aux mécréants !
Si l'on se replace au XI et XIIIes, la réalité géopolitique et culturelle est très différente.
L'empire Arabe est immense, il s’étend de l'Océan Indien, jusqu'à l'Atlantique. La partie du moyen orient concernée par les croisades n'est pas grand chose*.
L'ennemi réel du monde arabe qui occasionnera son déclin ne vient pas d'Europe, mais de l'Est : les invasions mongoles avec les terribles Genghis Khan et Tamerlan qui développeront un empire inégalé de 33 millions de kilomètres carrés (La Russie actuelle en compte 7).
POURQUOI LES CROISADES ?
En 1080, l'empire Byzantin est attaqué de toute part. Se défendre devient impossible. Alexis Commène (10581110), fin diplomate, en vient à demander de l'aide à la papauté, jusqu'alors ennemie.
Cet SOS tombe à pic car les chrétiens venus d'Occident ne peuvent plus aller en pèlerinage à Jérusalem sans être également attaqués. Il faut donc défendre le tombeau du Christ.
Le pape Urbain II (10351099) répond à la demande d'Alexis en lançant un appel à ses ouailles
Tous ceux qui délivreront la terre sainte des infidèles auront droit au paradis éternel !
Le mot "Croisade" n'existe pas à cette époque. Il sera inventé plusieurs siècles après en référence à l a croix cousue sur les vêtements.
ENCHAINEMENT DES CROISADES :
Alexis ne demandait que le soutient de mercenaire pour l'aider. Funeste erreur, en 1097 l'occident en voie des foules de gens fanatisés. Des prédicateurs illuminés comme Pierre l’Ermite (1053115) galvanisent les foules. Elle quittent tout et se ruent sur les routes non sans massacrer les premiers "infidèles" rencontrés : les juifs du Rhin et les Hongrois.
Horrifié par cette marée incontrôlable, Alexis repousse tout le monde de l'autre côté du Bosphore. Lieu où les premier croisés iront mourir écrasés par les Turcs.
Mais une autre foule prends le relais : "La croisade des barons". Composée cette fois de chevaliers venus de tout le monde franc, donc plus efficace. Antioche, Edesse, Tripoli sont conquises.
Nouvelle déconvenue pour Alexis. Les terres prises sur les musulmans devaient lui revenir de droit. Les latins s'en moquent et commencent à s’octroyer des principautés indépendantes.
1099: Jérusalem tombe après un long siège suivi d'un massacre. Godeffroy de Bouillon(10581100) refuse de se faire couronner roi là où le christ a régné . Il devient "avoué du saint-sépulcre" au "royaume latin de Jérusalem. Durée : deux siècles (non sans querelles de succession).
CONTRE-OFFENSIVE DU MONDE ORIENTAL :
Le califat Abbasside est éclaté en émirats rivaux, turcs ou arabes. Il est trop divisé pour pouvoir résister aux assauts des croisés.
Zengi (108710146), émir de Mossoul et cruel guerrier réussit à reprendre le petit royaume latin d'Edesse et massacre tous les Francs au pouvoir.
Le pape déclenche alors une nouvelle croisade. Le roi de France Louis VII débarque avec ses forces pour reprendre la main. Impossible. Ils repartent.
Le fils de Zengi, Nur ad-Din (11181174) parvient à unifier les musulmans de l'Euphrate et du Nil et à s'emparer de l’Égypte (qui traitait avec les Francs). Son neveu Salah ad-Din (1138 1193) "Saladin", vizir du calife du Caire réunit sous sa coupe la Syrie et l’Égypte, pour jeter les croisés à la mer. En 1187, il reprend Jérusalem.
Nouvelle croisade : Frédéric II de Hohenstaufen (11941250), rival du pape donc excommunié, fait scandale : il est le seul à reprendre Jérusalem sans verser de sang. Il est le seul également à reconnaitre la culture Arabe.
Louis IX, plus pieux qu'une clôture, se croise deux fois : deux échecs.
En 1291 tombe Saint-Jean d'Acre, dernière place latine en terre sainte. Chypre reste le dernier vestiges de la présence Franque. Elle sera conquise au XVIes par les Ottomans.
L'ORIENT LATIN :
Les Occidentaux créent de petits royaumes appelés "royaumes d'outremer". D'eux naissent "les poulains" : descendants d'Européens nés sur place (sorte de "pieds noirs" avant la lettre).
Pour protéger ces territoires se sont formés des ordres religieux : les Templiers et les Hospitaliers.
On visite encore leurs châteaux en Syrie et en Jordanie.
DÉLIRES MYSTIQUES :
Le moyen âge en l'an 1000 connait une peur de l'apocalypse "Diaes irae" qui illumine encore les esprits lors des premières croisades.
Persuadés que la fin du monde va leur tomber sur la tête, des milliers de petites gens partent sur les routes avec pour guides des prédicateurs illuminés.
Le jugement porté sur les croisades a varié dans le temps. D'abord – pendant des siècles - la représentation de l 'idéal chevaleresque : quoi de plus noble que de donner sa vie pour délivrer le christ ?
Puis au XIXes, l'épisode devient synonyme de délire intolérant : écraser l'autre au nom de ses certitudes théologiques.
Oui les francs furent souvent de vrais barbares. Ils étaient grossiers et sans manière. Énorme contraste avec l'univers sur lequel ils posent leurs gros sabots où tout est d'un infini raffinement.
Oui l'orient fut aussi cruel. Le calife Al-Hakim (9851021), à la santé mentale douteuse, sorte de Néron à turban, fait détruire le tombeau du Christ et massacre à tour de bras au nom de dieu. Idem pour les nizarites : origine du mot "Assassin".
CONSEQUENCES :
Les croisades ont eu sur le monde musulman, l'effet d'un catalyseur. Elles ont réveillées un concept endormi depuis Mahomet : le Djihad. Saladin l'arbore en étendard. Dieu promet le paradis à celui qui meurt pour cette cause.
La papauté ravive également une vieille notion : "la guerre juste".
Fanatisme et intolérance intrinsèquement liés à l'Islam ?
La chrétienté n'a jamais promis le martyr à qui mourrait au combat. C'est vrai.
Mais pourquoi oublier les autres concepts du monde chrétien ?
Ce qui se passe avec les croisades à cette époque n'est pas sans poser des question de foi. Comment il est possible d'autoriser des ordres religieux à tuer leurs prochains ?
" De la mort du Païen, le chrétien peut tirer gloire puisqu'il agit pour la gloire du Christ." Saint Bernard.
Les chrétiens ne sont donc pas homicides mais "malicides". Il peuvent massacrer à loisir puisqu'ils ne font que tuer le "mal". Étrange vertu évangélique.
Tous les acteurs de cette histoire ont su se montrer à la fois cruels et humains.
Saladin tue mais il fait aussi rendre un petite fille chrétienne à sa mère. Apprenant que son ennemi est fiévreux il lui fait porter des sorbets pour le rafraichir.
Richard Cœur de Lion est t'il moins cruel ? En 1191, à Acre, il n'hésite pas à faire exécuter 3000 prisonniers que Saladin lui proposait de racheter à prix d'or.
Il n'y a ni bons, ni méchants. Seuls les intégristes pensent que la vérité est de leur côté.