[supprimé]
1- L'analogie est bonne, mais ne tranche pas la question : Le droit et la médecine doivent-ils être au service de l'individu ou de la cité ? Que doit-on défendre en premier ? Sachant que peu importe le choix effectué, il faudra en assumer et les conséquences, et les excès, toute œuvre humaine étant imparfaite.
Que préférez – vous : des coupables trop sévèrement punis, des innocents dans quelques cas punis ? Ou des coupables trop peu punis, des victimes lésées, voire des coupables qui se soustraient à toute justice ? Des questions qu'il faut poser aussi pour la cité : quelles sont les conséquences d'une cité qui punit trop sévèrement les individus, qui châtie parfois des innocents ? Quelles sont les conséquences d'une cité qui lèse les victimes, permet aux criminels de s'en sortir à bon compte, de se gausser même de sa justice ? D'une cité qui parce qu'elle sacralise l'homme, plutôt que le vertueux, interdit de battre, de punir de mort les pires scélérats ?
Ainsi, il est fort possible, en raison de notre imperfection, que nous devions toujours faire face au choix suivant : soit une justice et une médecine qui considèrent l'individu aux dépens de la cité ; soit une justice et une médecine qui considèrent la cité, aux dépens des individus, plus particulièrement de certains présumés coupables ou patients ; et que jamais le débat ne sera véritablement tranché, qu'il ressurgira toujours en raison des injustices commises.
2- Les hommes que vous défendez, parce qu'ils incarnent des modèles de réussite, se sont distingués en défendant l'indéfendable, en connaissance de cause : après étude du dossier. S'ils ont montré leur intelligence et leur compétence, ils les ont aussi mises au service du mal, et d'un homme ; j'insiste bien, non au service du bien, ou de la cité. Ils se justifient par une éthique qui sacralise l'homme, quel qu'il soit, juste ou injuste : qui leur permet tout en défendant leur intérêt de se poser en champion des droits de l'homme, de l'individu, car il faut tout de même souligner qu'ils y gagnent : renommée ou gloire, fortune, carnet d'adresses, de futures affaires juteuses, des possibilités de carrière, des postes...
Alors s'il faut juger de cette éthique, comme d'un arbre à ses fruits, il me semble que l'on observe une pomme bien pourrie : un homme qui peut-être par éthique défend un criminel, et qui toujours y trouve son compte, qui fait tout pour le soustraire, au moins en partie, à la justice des homme. Faute de l'intelligence : éthique défendue viciée ou faute de la volonté ?
Ne soyons pas non plus naïfs : souvenons - nous que les procès, au même titre que l'enseignement et la politique, ont toujours été l'un des terrains de jeux favoris des sophistes ; que peut-être même, sont-ils toujours responsables non du droit, mais du tordu ; et que le principe qui veut que chacun a le droit à une défense, y compris les pires scélérats, les cas les plus extraordinaires, même bien établi et considéré comme l'aboutissement du progrès en matière de justice, soit est principe de tordu, soit est principe de droit qui ne correspond qu'à la justice très imparfaite des hommes ; que le sophiste qui en assume le rôle est alors au mieux moindre mal, comme le bourreau ; que l'homme qui en fait sa spécialité, nous en apprend beaucoup sur sa personne, qu'il n'est certainement pas objet de déférence.
3- Sachez que cette question est moins sujet de scandale pour moi que pour un autre : car le monde est toujours le lieu de l'épreuve, un domaine mêlé de mal : si je peux le déplorer, je sais aussi à quoi m'en tenir.
Je sais aussi qu'en bout de chemin, il y a la justice parfaite de l'Eternel : qu'elle n'est pas faite de lois viciées, d'hommes jugeant à l'aune de leur maigre intelligence, de ce qui leur tient lieu de science ; que tous nous passons sous les fourches caudines de cette merveilleuse justice : aussi bien les criminels que les ténors du barreau ; et que la sentence ne peut - être que bonne, ou juste, les deux étant la même chose en Dieu.
J'espère simplement que les champions dont nous parlons ne commettent pas l'erreur de ces hommes qui ne considèrent que le monde, qui ne déploient que des vertus du monde, et qui ne sont alors récompensés -avec justice- qu'en ce monde, en attente même du châtiment.