Worsley Évitez donc de vous y référer. Car il ne sert nullement votre propos.
Vous approprier un auteur n'a aucun sens. Je rappelle que son texte principal sur la nation date de 1882. Tout le monde connait ces quelques lignes:
Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. On aime en proportion des sacrifices qu'on a consentis, des maux qu'on a soufferts. On aime la maison qu'on a bâtie et qu'on transmet. Le chant spartiate : «Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes» est dans sa simplicité l'hymne abrégé de toute patrie.
En effet Renan envisage déjà une "confédération européenne" (pas mondiale vous le noterez), là commence les divergences mais sa conférence à la Sorbonne reste un classique qui a inspiré bien des nationalistes, Maurras en particulier.
Renan a aussi écrit des lignes qui vous plairaient moins, comme sur l'exécution de Louis XVI:
Ainsi pu s’accomplir l’opération la plus hardie qui ait été pratiquée dans l’histoire, opération que l’on peut comparer à ce que serait, en physiologie, la tentative de faire vivre en son identité première un corps à qui l’on aurait enlevé le cerveau et le cœur.
Intervention paradoxale car il envisage la continuité de cette nation française sans tête tout en concédant que cela n'est possible que par l'action des rois de France qui l'ont battit.
Il n'est pas étonnant que des nationalistes soient en accord sur cet autre extrait:
Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis. L'homme, Messieurs, ne s'improvise pas. La nation, comme l'individu, est l'aboutissant d'un long passé d'efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire, voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale.
Renan rejette le contractualisme pur, qui réduit la nation à une simple association volontaire, sans racine historique. Il se cantonne à un équilibre entre la part du déterministe et du volontariste dans sa définition. Ce qui est sensiblement différent des revendications actuelles et de la distribution de cartes plastifiées à tour de bras.
Bien entendu, Renan a tendance à confondre une véritable volonté d'intégrer une nation avec des caprices ou des "désirs" si vous préférez. On est ici dans la situation actuelle où tout en n'ayant rien à faire de "l'héritage qu'on a reçu" ou du "désir de vivre ensemble", certains n'hésitent pas à revendiquer l’appartenance à la nation française.
Renan voit le concept de nation comme empirique, mouvante selon de la tendance actuelle. "L’empirisme organisateur" hérité de Maurras peut s'adapter à cette perspective. Mais avec des réponses qui ne seront certainement pas les vôtres.