Odeur du temps
à la mémoire de René Guy Cadou
Quelque part, du côté de Saint-Aubin-de-Luigné,
Il y a des routes au corsage entr'ouvert comme des fiancées
Et la petite forge des grillons entre les herbes calcinées
En cet après-midi que je ne revivrai jamais
Dans la confrontation du souvenir, dans la jeunesse sans étais
Dans ce pays sans arbres, au pas ensoleillé.
La flamme des fuchsias s'infléchit sur le carrelage
D'une auberge, qui va à la dérive et flotte ainsi depuis des ans
Ouverte à la mémoire, ouverte à tous les vents,
Mais vide, avec ce reflet d'ombre et de vin de fumée.
Pourtant, tout est fraîcheur en cette halte singulière
Où les murs sont de marbre et les grappes de pierre,
Et l'on attend en vain dans un angle que vienne
Une main d'autrefois repousser les persiennes.
Saint-Aubin-de-Luigné, il ne reste de toi
Que ce nom, que je n'apprendrai jamais à prononcer
Avec cette retombée de la voix
Qui plonge jusqu'au fond des odorants celliers.
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Michel Manoll
(Extrait de "Louisfert-en-Poésie" in "Les Riverains du feu", p.91/ Ed. Le Nouvel Athanor)
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L'auberge évoquée par M. Manoll se situait à Saint-Aubin-de-Luigné, là se retrouvaient les poètes autour d'un verre de Coteaux-du-Layon.
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Plaque apposée à Saint-Aubin-de-Luigné sur la façade d'une maison d'habitation - rue du Canal Monsieur - rappelant l'existence de cette auberge.
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"Ancien café "Aux amis réunis" où au temps de Marie-Cécile la bonne hôtesse se réunissaient les
poètes de l’Ecole de Rochefort autour de Jean Bouhier et René Guy Cadou."