gth
Oui, l'hypothèse d'un assassinat colle mal avec les constatations des experts ayant examiné la chose directement, et que je n'ai pas de raison de supposer plus incompétents ou plus malhonnêtes que moi, et les historiens sont d'accord sur l'explication que tu donnes, c'est le genre de trucs qui arrivaient fréquemment à l'époque. Ca ne colle pas non plus "idéologiquement", disons, ni dans les manières des assassins sur des questions comme ça. Buter Zola en faisant passer le truc pour un accident, ça n'a aucun intérêt : Zola était un symbole, les symboles on les tue officiellement, dans un attentat à la bombe, ou on lui tire une balle dans le caisson, tout en disant que Dieu est grand, ça fait sens, aller lui mettre du cyanure dans son café ou je ne sais pas quelle substance toxique dans son feu de cheminée, ce ne sont pas des manières, ce n'est pas raccord avec le projet.
Comme on dit, la vérité, on ne la saura jamais, c'est pas impossible qu'un allumé ait voulu liquider Zola de cette façon, mais là nous sommes dans la parano et le complotisme, c'est secondaire, anecdotique et inessentiel. Pour dire en plus court : on s'en branle.
Mais si vous voulez bien, revenons à des choses un peu plus importantes. On a parlé de "fait divers" concernant l'Affaire, et mis en parallèle avec l'affaire Grégory.
Première remarque, il y a une hélice, que j'ai essayé de pointer, mais de manière indirecte, c'est mon péché mignon, je postule toujours l'intelligence de mon interlocuteur et bien que maintes fois démenti par l'expérience, je persiste dans cette attitude déraisonnable, sur ce Forum ou ailleurs. Rationnellement, je sais que ce postulat est complètement faux, mais je ne peux pas m'en empêcher.
Il est beaucoup trop tard pour changer et je suis contraint de suivre maintenaint la même politique, je veux dire soutenir l'idée intenable que je cause à des sujets intelligents.
Ce que j'appelle une "hélice", c'est le fait que d'abord on dise que l'Affaire Dreyfus est un fait divers, avec l'idée de péjoriser, de minorer, d'ignorer l'incident, pour mettre en avant ensuite un fait divers (Grégory) comme un truc super-important, en faisant cette fois du "fait divers" quelque chose de très important. Et on me dit : l'Affaire Dreyfus, on s'en fout, ce n'est qu'un fait divers, mais par ailleurs on se passionne pour l'Affaire Grégory.... qui est un fait divers. Comprenne qui peut.
Deuxième idée : ce n'est qu'un fait divers, une broutille, l'histoire d'un capitaine qui se fait mettre en cabane sur une erreur (en réalité : une machination antisémite)
Mais c'est ici qu'il faudrait commencer à réfléchir et je suis obligé de constater que les intervenants ici ne le font pas. Il faudrait réfléchir sur ce que veut dire "fait divers".
Pour en donner une première approche, vous avez deux sortes de faits divers. Par exemple le fait divers Dreyfus et le fait divers Grégory, mais je vais prendre un autre exemple : la Prise de la Bastille.
C'est quoi, la prise de la Bastille, en résumé : un foule un peu excitée qui libère 7 prisonniers d'une prison. C'est peanuts, ça ne mérite pas plus qu'un petit entrefilet dans votre journal local. Mais comment expliquez-vous que depuis 200 ans, on commémore ce petit incident, plutôt que de faire, comme vous, 200 sujets sur l'affaire Grégory ? C'est le battage médiatique, comme osent dire ci-dessus des pseudo-habiles et qui sont en fait des infra-bulbés et intellectuellement sous dimensionnés, des larves ?
Le genre de larves qui vont vous dire que s'en prendre à une prison où il n'y a pratiquement personne, qui n'est défendue que par trois vagues clampins, c'est pas grand chose de plus que l'affaire Grégory.
Mais c'est pourtant cette date, le 14 juillet, que nous fêtons tous les ans depuis ce jour. Pourquoi ? Parce que ça veut dire quelque chose.
Ca veut dire quoi ?
Que la monarchie, c'est fini, qu'elle est à genoux. Dans sa grande époque, il y eu maints autres faits divers de ce genre, pour la monarchie. Mais les petits rigolos qui s'étaient permis des attaques contre des symboles du Pouvoir, même s'il n'y avait aucun enjeu véritable, se faisaient massacrer par la troupe, ou si on ne pouvait pas les prendre sur le moment, on les chopait plus tard et on les pendait. Mais dans cette affaire, la nouveauté, ce n'est pas de s'en prendre à une institution royale, mais le fait qu'on peut s'y livrer impunément, ce n'est pas qu'on prenne la Bastille, mais le fait que le roi soit contraint de supporter cela et qu'au lieu de punir ces matrotrus, il soit contraint de s'écraser comme une merde. Parce que son système ne lui permet plus de faire autre chose que subir et de s'écraser comme une merde. Le petit fait minuscule a donc un sens : la monarchie, c'est terminé, on peut lui chier sur la gueule, elle n'est plus en position de répondre.
Et puis vous avez les faits divers qui ne signifient rien. Le fait qu'on tue le petit Grégory et qu'on le balance dans la Vologne, n'a aucun sens, l'idée de se poser pour ou contre est absurde, les conclusions qu'on peut en tirer ne sont pas politiques, pas intéressantes et pas réflexives. Quelle est la puissance monstratrice (la Bastille montre ou démontre l'impuissance de Louis XVI, l'Affaire Dreyfus l'antisémitisme, etc.) de l'affaire Grégory ? Montrer qu'il y a des débiles mentaux qui tuent des gamins, qu'il y a des dingues dans la nature, quoiqu'on pense que ces dégénérés et ces psychopathes soient très probablement des membres de la famille ? On parle de cela pour montrer quoi ? Rien.
C'est juste rien.