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Début mai, Émilie Loridan avait sollicité « La Voix du Nord » d’Armentières pour parler de ses problèmes financiers. Maman de deux enfants de 8 et 6 ans, elle ne percevait plus d’allocations de la CAF depuis qu’elle touchait une allocation enfant handicapée par la Belgique pour sa fille trisomique. Elle s’est suicidée.
Le 6 mai, nous écrivions qu’Émilie était « une maman battante mais fatiguée ». Nous avions rappelé l’Armentiéroise en juin, pour avoir de ses nouvelles, et savoir où en était son dossier. « À part me dire que je dois demander une pension alimentaire au papa de mes enfants, je n’ai rien de plus. La CAF m’a même supprimé mon APL », nous avait-elle répondu. Encore un peu plus fatiguée par ses problèmes qui s’accumulaient et dont elle ne voyait pas d’issue. Sans RSA, sans APL, Émilie n’avait plus que l’allocation enfant handicapée belge pour vivre (398 euros), et nous avait dit doucement, sans s’énerver, « être à bout », ne plus savoir « comment s’en sortir ».
Respecter l’intimité
Dimanche, elle a mis fin à ses jours. Sa sœur Sarah demande que soit respectée l’intimité de ce drame. « On ne souhaite pas s’exprimer, je pense que vous le comprenez, on est entre nous… ». On le comprend, évidemment.
Son oncle a déposé à La Voix du Nord une petite lettre de remerciement au nom de la famille « pour l’aide et le soutien » que lui avait apporté cet article. Un appel au secours relayé mais qui n’avait pas pu débloquer davantage sa situation. Les explications, techniques, avaient été fournies par la caisse d’allocations familiales : le papa (dont elle est séparée) étant belge et en activité, la petite fille trisomique devait percevoir l’allocation belge, qui était prioritaire, ce qui avait effectivement pour conséquence de la priver des droits aux allocations françaises. Reste le drame humain, celui d’une maman à bout, qui nous avait expliqué son quotidien, avec deux jeunes enfants, dont une petite fille handicapée, scolarisée en Belgique. Les horaires étaient difficilement conciliables pour reprendre une activité professionnelle, et Émilie avait des revenus insuffisants pour faire face. L’histoire de cette maman pose question sur la prise en charge humaine de ce type de situation.
Les funérailles d’Émilie Loridan auront lieu ce samedi 9 juillet à 9 h 30 à l’église Notre-Dame-du-Sacré-Cœur à Armentières.
La ville l’avait aidée récemment
La directrice générale adjointe des services de la ville d’Armentières, Émilie Decarne, exprime d’abord son empathie pour la famille de cette jeune femme.
Les services de la ville connaissaient cette jeune maman : « Elle avait été accompagnée à trois reprises dans ses demandes de logement en fonction de l’agrandissement de sa famille, explique Émilie Decarne, le dernier changement remontait à avril 2011, après un rendez-vous avec le maire en janvier : elle avait pu obtenir une maison T 4 avec jardin rue du Général-Mangin. »
« Inscrite tout de suite à l’épicerie solidaire »
En mai, Émilie Loridan avait contacté le centre communal d’action sociale, où elle avait été reçue. « Un travailleur social la suivait, poursuit Émilie Decarne, elle avait pu être inscrite tout de suite à l’épicerie solidaire. Des bons en urgence lui avaient également été donnés pour répondre à sa situation immédiate ».
Il lui avait également été conseillé d’aller au Point d’accès au droit, ce qu’elle avait fait : elle avait pris contact avec le défenseur des droits. Mais plus récemment, les services sociaux de la ville n’avaient pas réussi à avoir de contact avec elle. La jeune maman ne s’était pas présentée au dernier rendez-vous, en juin. « Le travailleur social lui a laissé plusieurs messages. Elle n’avait pas rappelé. La ville l’a aidée dans tous ses champs de compétence. Ce qui est arrivé est dramatique », conclut la DGS adjointe.
Tout a-t-il été fait à la CAF pour aider Émilie ?
Nous avons contacté ce matin le service communication de la CAF pour les avertir du décès d’Émilie, dont ils n’avaient pas connaissance, et leur proposer de réagir dans cette affaire délicate.
Nous aurions souhaité connaître les actions qui avaient été menées par leurs services, au-delà de l’arrêt des allocations, pour l’aider. Étant bien entendu qu’un acte désespéré résulte rarement d’un seul problème. Nous n’avons pas eu de retour.