Vit Jedlicka. Ce Tchèque de 31 ans est devenu, le 13 avril, le président du Liberland, un territoire de 7 km2 situé à la frontière entre la Serbie et la Croatie .
Le projet a commencé à mûrir dans son esprit à l’adolescence, après la lecture du pamphlet La Loi, écrit par Frédéric Bastiat en 1850. Le Français, présenté comme un « anarcho-capitaliste », plaide pour une autonomie de l’individu, caractérisée par la défense du libre-échange et de la concurrence, et défend une vision minimaliste de l’Etat : « N’attendre de l’Etat que deux choses : liberté, sécurité. Et bien voir que l’on ne saurait, au risque de les perdre toutes deux, en demander une troisième. » « L’Etat est une grande illusion qui pervertit la loi. Mon ambition est de trouver le minimum de régulation pour obtenir le maximum de liberté économique individuelle », poursuit le Tchèque.
Un ami lui parle un jour d’une terra nullius – locution latine signifiant « terre sans maître » – dans les Balkans, un espace idéal pour réaliser son fantasme politico-idéologique. Cet endroit situé à la frontière entre la Croatie et la Serbie n’est incorporé à aucun Etat en raison du conflit territorial qui oppose les deux pays depuis l’éclatement de la Yougoslavie dans les années 1990.
La Serbie fait même preuve d’une bienveillance passive à l’égard de la micronation. S’il ne la reconnaît pas officiellement, il a autorisé l’établissement de son « camp de base » sur son territoire. Quarante personnes y sont actuellement présentes en permanence.
Pour obtenir aujourd’hui la citoyenneté liberlandaise, il est nécessaire de se rendre au camp de base serbe ou de « contribuer positivement à l’édification de la nation ». Car, si des formulaires sont également disponibles sur Internet, « l’afflux de demandes a provoqué un retard dans leur traitement ». En deux mois et demi, quelque 325 000 candidatures ont été enregistrées, dont 31 400 jugées entièrement admissibles. Pourtant, le statut de citoyen n’a été accordé qu’à une centaine de personnes.
Près d’un quart des demandes de citoyenneté actuellement recensées viennent de ressortissants égyptiens (80 256). Les Turcs arrivent en deuxième position (42 328), devant les Algériens (23 522). Quelque 3 000 Français ont fait part de leur intention de grossir les rangs de cette incarnation d’utopie ultralibérale.