Voici quelques citations de Talleyrand, admirable cynique, opportuniste, né en 1754 et mort dans son lit en 1838, avec les honneurs de Louis-Philippe, qui servit 9 régimes, prêta 13 fois serment (mangeant chaque fois le précédent), toute honte bue, successivement évêque puis laïc, diplomate, ministre des affaires étrangères, chef de gouvernement, homme d'affaires, etc. :

"Agiter le peuple avant de s'en servir, sage maxime"

"Ceux qui parlent ne savent pas, ceux qui savent ne parlent pas"

"Dans les temps de révolutions, on ne trouve d'habileté que dans la hardiesse, et de grandeur que dans l'exagération"

"En politique, ce qui est cru devient plus important que ce qui est vrai"

"En politique, il n'y a pas de convictions, il n'y a que des circonstances"

"Être du monde, quel ennui ! - mais ne pas en être, quel drame !"

"Il faut se garder des premiers mouvements, parce qu'ils sont presque toujours honnêtes"

"Il n'y a qu'une façon de dire oui, c'est "oui"; toutes les autres veulent dire non"

"Il y a trois sortes de savoir : le savoir proprement dit, le savoir-faire et le savoir-vivre; les deux derniers dispensent assez bien du premier"

"Il y a une chose plus terrible que la calomnie, c'est la vérité"

"La franchise est toujours invoquée pour exprimer des choses désagréables à entendre"

"Là où tant d'hommes ont échoué, une femme peut réussir"

"La parole a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée"

"La politique, ce n'est qu'une certaine façon d'agiter le peuple avant de s'en servir"

"L'esprit sert à tout, mais il ne mène à rien"

"L'homme est une intelligence contrariée par des organes"

"Le meilleur auxiliaire d'un diplomate, c'est bien son cuisinier"

"Le meilleur moyen de renverser un gouvernement, c'est d'en faire partie"

"Le mensonge est une si excellente chose qu'il ne faut pas en abuser"

"Les financiers ne font bien leurs affaires que lorsque l'Etat les fait mal"

"Les mécontents, ce sont des pauvres qui réfléchissent"

"Méfiez-vous du premier mouvement, il est toujours généreux"

"Ne dites jamais du mal de vous; vos amis en diront toujours assez"

"On peut violer les lois sans qu'elles crient"

"Où il y a un traité, il y a un canif"

"Quel dommage, messieurs, qu'un si grand homme soit si mal élevé !" (sa réaction, en 1809, après que Napoléon l'eût traité de "merde dans un bas de soie")

"Qui n'a pas les moyens de ses ambitions a tous les soucis"

"Sachez, Monsieur, que lorsqu'une place est vacante, elle est déjà donnée"

"Si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant" (phrase historique lors du Congrès de Vienne de 1814)

"Si les gens savaient par quels petits hommes ils sont gouvernés, ils se révolteraient vite"

"Tout ce qui est excessif est insignifiant"

"Un ministère qu'on soutient est un ministère qui tombe"

"N'oubliez pas que je suis évêque" (sur son lit de mort, au moment de recevoir l'extrême onction, car le prêtre devait, en pareil cas, l'oindre sur le revers des mains et non sur les paumes)

"Sire, c'est un grand honneur que le roi fait à ma Maison" (sur son lit de mort, alors que le roi Louis-Philippe, contrairement à l'étiquette, lui rend visite)

"Je souffre comme un damné", aurait-il dit au roi. "Déjà ?", aurait répondu Louis-Philippe...

Et, comble de l'immodestie, lors de la même visite du roi Louis-Philippe sur son lit de mort :

"Sire, je veux que longtemps encore, on parle de ce que j'ai été, de ce que j'ai fait pour la France !"

Talleyrand reçoit des funérailles officielles et religieuses le 22 mai 1838. Embaumé à l'égyptienne, son corps est placé dans la crypte qu'il a fait creuser sous la chapelle de la maison de charité qu'il a fondée en 1820 à Valençay, où il est ramené de Paris le 5 septembre ; ce lieu devient la sépulture de ses héritiers et le reste jusqu'en 1952.

Jusqu'en 1930, une vitre laisse voir son visage momifié. La plaque de marbre qui recouvre une face du sarcophage de marbre noir placé dans un enfeu porte : « Ici repose le corps de Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, prince duc de Talleyrand, duc de Dino, né à Paris le 2 février 1754, mort dans la même ville le 17 mai 1838 ».

J'aime bien celle-ci :

"En politique, ce qui est cru devient plus important que ce qui est vrai"

6 juillet 1815

"Tout à coup, une porte s'ouvre: entre silencieusement le vice appuyé sur le bras du crime, Monsieur de Talleyrand soutenu par Monsieur Fouché."

C'est ainsi, dans ses Mémoires d'Outre-Tombe, que le vicomte François-René de Chateaubriand décrivit l'effet de saisissement que lui causa l'entrée dans une salle de l'abbaye de Saint-Denis de ces deux personnages, qu'il détestait et méprisait, venus se présenter à Louis XVIII rentré de Gand, "dans les bagages de l'armée anglaise", après Waterloo. A ce moment là, 6 juillet 1815, Talleyrand était ministre des affaires étrangères et Fouché venait d'être nommé par le roi, ministre de la Police.

Mitterrand s'est lui-même comparé à Talleyrand dans sa jeunesse.

Ainsi, vers 1946-47, alors qu'il est jeune ministre encore peu connu, invité au festival de Cannes, il est accosté par le prince de Monaco : "Et vous, mon ami, comment vous nommez-vous déjà ?". Et de répondre : "Mitterrand, comme Talleyrand".

Il valait mieux l'avoir avec soi que contre soi. Tous ceux qui l'ont écarté du pouvoir l'ont payé très cher, car Talleyrand était un visionnaire hors pair.

Ainsi, en juillet 1830 :

En juillet 1830, alors que l'incertitude règne, Talleyrand expédie le 29 juillet un billet à Adélaïde d'Orléans pour son frère Louis-Philippe, lui conseillant de se rendre à Paris :

« Ce billet qui amena sur les lèvres de Madame Adélaïde une exclamation soudaine : « Ah ! ce bon prince, j'étais bien sûre qu'il ne nous oublierait pas ! » dut contribuer à fixer les indécisions du futur roi. Puisque M. de Talleyrand se prononçait, Louis-Philippe pouvait se risquer. »

— Charles-Augustin Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis

Louis-Philippe revient à Paris le lendemain, se rend pour entretien chez Talleyrand et prend son parti. Celui-ci l'aide par l'entremise d'Adolphe Thiers.

Une fois roi, Louis-Philippe, après avoir souhaité faire de Talleyrand son ministre des Affaires étrangères, le nomme rapidement à sa demande ambassadeur extraordinaire à Londres, afin de garantir la neutralité du Royaume-Uni vis-à-vis du nouveau régime. La décision est critiquée à Paris, mais approuvée à Londres, où Wellington et Aberdeen sont ses amis depuis longtemps. Il est accueilli de manière grandiose le 24 septembre et reçoit le logis de William Pitt ; sa nomination rassure les cours d'Europe, effrayées par cette nouvelle révolution française, alors qu'éclate la révolution belge.